Avec
un titre pareil, j'imaginais un film de guerre sur le front
Pacifique, plein de fureur et de batailles. Il n'en est rien,
ou plutôt, Le Cri de la victoire
se passe bien pendant la guerre, commençant son récit en octobre
1942, mais le conflit mondial serre de cadre à diverses romances
entre des soldats de l'US Marine et de jeunes et jolies femmes
rencontrées au gré des affectations. Une belle bluette signée
Raoul Walsh, extrêmement agréable et rondement menée, mais une
bluette tout de même. Ces Marine viennent de tous les coins des
Etats-Unis, engagés dans ce corps si fier, ils font route vers San
Diego dans le sud de la Californie. Leur rencontre se fait dans un
train qui les y conduit. Tous les types des Américains sont
représentés.
Marion
(John Lupton) est l'intello, puisqu'il porte des lunettes et passe
son temps à lire (son prénom est-il un discret hommage à John
Wayne ou une petite moquerie?). Joseph (Perry Lopez) est le latino,
franchement roublard et bagarreur. L.Q. Jones (Justus E. McQueen) est
la plaisantin du groupe (l'acteur prendra pour ses films suivants
comme pseudonyme le nom de son personnage). Ski (William Campbell)
est le déprimé de la troupe, incapable de se trouver sa place dans
l'armée. Deux Navajo (Felix Noriego et Jonas Applegarth) sont dans
le train, ils aideront à transmettre des messages codés pour que
l'ennemi ne les comprenne pas. Chacun aura sa saynète où il pourra
déployer son personnage.
Raoul
Walsh concentre son récit sur deux autres Marine. Andy (Aldo Ray)
est un bûcheron de l'état de Washington (pas la capitale comme il
dit). Un bon gars un peu rustre, toujours prêt de donner du poing
quand on le taquine et un dragueur invétéré. Il va tomber, en
escale en Nouvelle Zélande, sous le charme d'une ravissante veuve,
Pat Rogers (Nancy Olson). Andy se lie d'amitié avec Danny (Tab
Hunter), le beau gosse qui quitte sa fiancée de Baltimore, avant de
tomber amoureux, un peu par dépit, d'une femme plus âgée et
délaissée par son époux soldat. Sa liaison avec Elaine (Dorothy
Malone) provoque un dilemme pour Danny et seme le trouble dans la
compagnie. Il reprendra ses esprits lors d'une permission et renouera
avec Kathy (Mona Freeman).
Entre
les scènes de bluette, Raoul Walsh montre la vie dans la caserne. Le
film est narré en voix off par Mac (James Whitmore), chef de
l'escouade. On découvre les premiers jours où les recrues
s'entraînent, apprennent à manier leurs armes et les radios, car ce
sont des Marine spécialisés dans la communication par radio. Pas
facile pour Raoul Walsh, qui n'aime comme personne mettre en scène
le mouvement, de filmer ces éléments que sont les ondes radio. Ce
sera l'attente d'une bataille, la frustration de ne pas entrer dans
le combat et les à-côtés de la guerre dans le Pacifique qui seront
mis en avant. Mac doit sans cesse remonter le moral des ses hommes et
régler les conflits entre eux, Joseph qui arnaque les autres, Marion
qui tombe amoureux d'un call-girl, Ski qui veut mourir.
A
chaque changement d'affectation, les Marine pensent enfin se lancer
dans la bataille, et le spectateur admirateur du cinéma de Raoul
Walsh aussi. Le cinéaste fait longuement durer l'attente. Il se met
dans la position du commandant Huxley (Van Heflin) qui doit se
contenter d'envoyer les troupes dans les îles du Pacifique
« nettoyer » les zones, c'est-à-dire faire prisonniers
les soldats japonais. Quand le général en chef (comprendre les
producteurs) acceptent que l'escouade d'Huxley et Mac se battent pour
libérer l'île de Saipan, il reste à peine un quart d'heure de
film. Ça valait le coup d'attendre car la bataille est pleine de
fureur et de suspense. On tremble pour Andy et Danny, vont-ils
réussir à épouser Pat et Kathy à l'issue de ce combat meurtrier ?
Une bien belle bluette de Raoul Walsh.
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