C'était
l'époque où un gangster pouvait être le héros du film, explique
Raoul Walsh dans son autobiographie Un demi-siècle à Hollywood
(publié en 1976 chez Calmann-Lévy). Le cinéaste ajoute que
Regeneration est le tout premier film de gangsters de
l'histoire de Hollywood. Owen est sans doute un gangster, mais il a
ses raisons. Le film commence dans le très pauvre quartier de Bowery
à Manhattan où le gamin de dix ans est recueilli par ses voisins
quand sa maman meurt. Et quels voisins, le gros compère est toujours
soûl et balance le gamin à travers la pièce, la matrone, aussi
obèse que son mari, est plus commode mais force Owen à faire de
nombreuses corvées.
Après
une nouvelle dispute de ses parents adoptifs, Owen s'enfuit du foyer.
On le retrouve à 17 ans travaillant comme docker où ses poings le
font rentrer dans un gang. Puis, le film, après une ellipse
temporelle, retrouve Owen à 25 ans. Il sera désormais interprété
par Rockliffe Fellowes, un acteur à la gueule de l'emploi, nez
légèrement cassé et lèvres adipeuses, une tête qui rappelle
celle de Marlon Brando jeune. Casquette vissée sur la tête, clope
au bec, Owen est devenu un gangster et traîne avec sa petite bande
de va-nu-pieds aux mines patibulaires qu'un procureur jure de mettre
sous les barreaux. La pègre règne en maître dans le quartier.
La
jeune mondaine paresseuse Marie Deering (Anna Nilsson) trouve que les
gangsters sont d'une frivolité folle et souhaite en rencontrer. Le
procureur l'emmène dans la boîte où les gangsters se retrouvent.
Assez vite, les bourgeois sont malmenés par la bande d'Owen, mais ce
dernier, qui a un bon fond, défend Marie et la sort de là. Elle va
s'engager pour sortir ces gens de la misère en devenant bénévole.
Owen va être emmené à côtoyer Marie, à l'aider quand des
troubles se créent dans le quartier, et, forcément, ils vont tomber
amoureux, même si le procureur estime que deux personnes de classes
différentes ne peuvent pas s'aimer. Quand le malfrat Skinny s'en
prend à Marie, on ne sait pas si Owen sera loyal à son gang ou s'il
aidera sa bien-aimée.
Dans
son autobiographie, Raoul Walsh, à qui la mémoire fait un peu
défaut, notamment sur le finale où il confond deux personnages,
raconte surtout le tournage d'une scène d'action monumentale, celle
du bateau qui brûle lors d'une excursion. Il a dû déguiser des
hommes en femme et faire face à la censure. Le cinéaste explique
aussi avoir tourné son film en suivant les leçons de David W.
Griffith, dont il fût l'assistant. Son premier long-métrage, après
une vingtaine de courts, est très rythmé, mêlant allégrement la
romance et l'action. On y trouve des larges mouvements d'appareil (la
scène de la boîte qui commence par un gros plan sur les musiciens
pour finir sur l'ensemble de la salle), chose rare à une époque où
le plan fixe était la règle.
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