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dimanche 23 août 2020

The Magic crane (Benny Chan, 1993)

Il n'est pas sûr que la presse généraliste, les journaux parlent de la mort de Benny Chan survenue aujourd'hui. Le cinéaste de Hong Kong n'avait que 58 ans mais il avait commencé dans la redoutable industrie du cinéma de l'ancienne colonie britannique dès 1990 dans l'écurie Johnnie To (période pré Milkyway). Il a ensuite été à l'école Tsui Hark – Film Workshop (avec notamment ce The Magic crane) pour ensuite devenir l'un des « yes man » de Jackie Chan (New Police Story et Rob-B-Hood pour ne parler que de films édités chez nous en DVD. En tout 25 films en une trentaine d'années.

Le scénario The Magic crane vient d’un vieux récit de la littérature chinoise classique déjà adapté au cinéma dans les années 1960. Tsui Hark a toujours de l’engouement pour ces récits situés dans une époque passée et légendaire. Son ambition apparaît clairement dès le début du film quand il montre le moine et son disciple (Damian Lau et Tony Leung Chiu-wai) sont au beau milieu de deux confréries d’artistes martiaux. On pense immédiatement à Zu warriors from the magic mountain et pas seulement au début. Tsui Hark cherche évidemment à marcher sur les plates bandes de son propre film.

Inutile de chercher un crâne magique dans ce film, les faux amis en anglais sont parfois légion. The Magic crane, c’est une cigogne magique et cet oiseau géant vient à la rescousse de ceux qui ont des problèmes avec les méchants. Nuage (Anita Mui) chevauche sa cigogne et traverse le ciel avec majesté et son sourire énigmatique. Elle va aider le jeune disciple interprété par Tony Leung Chiu-wai. Et d’ailleurs de deux manières, en le sauvant régulièrement des griffes des vilains et en l’ouvrant à le sexualité, lui pauvre et gentil puceau.

Ainsi The Magic crane va mêler constamment les deux pôles de cette histoire. D’un côté, une aventure extrêmement basique avec des gentils (le moine Yat et le disciple Ma) et leurs alliés (Nuage et sa cigogne magique) qui vont aller à un tournoi d’arts martiaux. Un jeune prétentieux espère gagner tous les combats y compris avec des moyens peu honnêtes. C’est le chef du clan du Dragon. Il fera office de méchant. Au milieu se trouve le responsable du tournoi. Il est vite débordé par la tournure des événements. Les chefs des écoles martiales vont être empoisonnés et tout va aller de mal en pis.

Régulièrement, de nouveaux personnages arrivent dans le récit pour compliquer un peu tout et donner du ressort à l’histoire. Butterfly (Rosamund Kwan) sera l’ennemie de Nuage. Ce dernière a pour Maître le père de la première qui l’abandonnée vingt cinq ans auparavant, ce qui on le comprend rend les choses encore plus complexes. Elle va cherche à se venger. Les armes que les deux femmes vont utiliser sont le son, le sitar pour Butterfly et la flûte pour Nuage. Là réside à vrai dire le seul intérêt du film puisqu’elles vont se battre en jouant de la musique. Stephen Chow se rappellera ces combats dans son Crazy kung-fu.


Certes le film est divertissant et parfois beau à regarder. On rit franchement aux effets spéciaux primitifs (ah, la cigogne en papier mâché) et sur les tonnes de sang déversés. The Magic crane est une variation kitsch surtout avec l'arrivée dans le film d’une jeune femme, alliée du clan du Dragon, qui n’hésite à allumer tous les hommes présents. Tsui Hark met une pointe d’érotisme pas franchement brûlant. En fait, c’est même un peu vulgaire. Et le scénario continue à piquer quelques pans de l’histoire de Zu les guerriers de la montagne magique : le vieux enchaîné, les belles femmes vénéneuses. Tsui Hark sert, dans cette série B, ce qui a déjà marché 10 ans plus tôt. Ce kitsch sera aussi la marque de fabrique de Benny Chan, il suffit de voir Gen-X-Cops pour s'en convaincre.



































vendredi 4 novembre 2016

Chungking Express (Wong Kar-wai, 1994)

Deux histoires largement improvisées, la nuit (Brigitte Lin et Takeshi Kaneshiro) et le jour (Faye Wong et Tony Leung Chiu-wai), les hommes sont des policiers et viennent tous les jours manger au restaurant d’un quartier populaire que tient Piggy Chan qui vante toujours les qualités de ses serveuses aux garçons célibataires (en tout bien tout honneur). Ils viennent manger là tous les jours et la voix off de Kaneshiro indique que dans quelques heures il va tomber amoureux de Brigitte Lin puis celle de Faye Wong avertit qu’elle va tomber amoureuse de Tony Leung Chiu-wai.

Le récit ne sera donc pas la force première de Chungking Express puisque même les protagonistes annoncent ce qu’il va se passer. L’important c’est les images, les plans, les clichés, d’aller vite quitte à ne rien raconter. Le film est constitué d’une suite de détails qui forment la psychologie des personnages, dans une idée de scénario impressionniste. Le problème majeur du film est de se rappeler tous ces détails pour en avoir une vision globale. L’aspect visuel dans la scène d’ouverture où Takeshi Kaenshiro court après quelqu’un, dans un accéléré ralenti, accentue cet aspect impressionniste avec ses touches de couleurs bleues.

Brigitte Lin est blonde aux cheveux longs, lunettes de soleil constamment sur le nez. Elle organise un trafic de cocaïne avec des Indiens comme mulets. Ils la planteront à l’aéroport. Valerie Chow est l’ex de Tony Leung Chiu-wai. Elle est hôtesse de l’air. Dans l’appart de Leung, ils jouent ensemble à des jeux sensuels où il fait atterrir sur le dos nu de sa copine des avions miniatures. Faye Wong est brune aux cheveux courts, lunettes de soleil qui tombent sur son nez. Elle lance des petits regards furtifs sur Leung. Elle passe ses journées à écouter dans le restau California Dreamin’ à fond. Elle rêve de partir en Californie et va devenir hôtesse de l’air. Tout cela forme une allusion au désir de quitter Hong Kong alors que la rétrocession se prépare.

La musique comme moyen d’évasion est là. A la fin du film, après avoir entendu des dizaines de fois California Dreamin’, on n’en peut plus. Brigitte Lin écoute dans le bar de son ex (Christopher Doyle), toujours la même chanson sur le juke box. Dans le restau, un Indien se sert d’une carotte comme micro et chante. Les voix off participent de cette ambiance sonore où chacun exprime ses pensées en s’inventant un avenir meilleur qui passerait par le sentiment amoureux. Le personnage de Tony Leung Chiu-wai parle chez lui tout seul. Il s’adresse à son savon, aux petits avions, aux peluches qu’il peigne. La parole est libérée mais n’est jamais entendue.

Le sur-place des personnages est un fait. Leung est souvent assis, en tenue de flic au resto avec ses collègues, en slip et débardeur blancs chez lui. Takeshi Kaneshiro aime au contraire courir et attend de fêter son anniversaire le 1er mai 1994. Il ne peut pas rester en place et quand il s’amourache de Brigitte Lin, il balance vers l’inconnu pour abandonner la routine. Chaque jour, il achète une boîte de conserve d’ananas qu’il mangera toutes d’un coup, un soir de déprime. Faye Wong a la clé de l’appartement de Tony Leung. Chaque jour, secrètement, elle va chez lui et déplace les objets, remplace le vieux savon, nettoie le sol, ajoute des poissons dans l’aquarium. Tony Leung Chiu-wai ne s’en apercevra pas, coincé qu’il est dans sa vie routinière.

Le mouvement et la vitesse sont les marques de fabrique de Wong Kar-wai. Il filme l’ennui de ses personnages, leur alanguissement, leur petite vie faite de creux. Il développera ces motifs plus encore dans Les Cendres du temps son film de sabres où rien ne se passe, où rien n’évolue, qu'il tourne en même temps que Chungking Express. Wong Kar-wai considère son film comme un repos comparé au tournage épuisant et complexe des Cendres du temps. Chungking Express était le premier film du cinéaste à sortir en France. Tout cela semble si loin maintenant, c'était il y a plus de 21 ans, quand il sortait encore des films venus de Hong Kong.