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samedi 16 février 2019

J'ai aussi regardé ces films en février

La Favorite (Yorgos Lanthimos, 2018)
Sur le site imdb.com on trouve, pour presque chaque film, une rubrique « goofs » sur les erreurs commises dans les films. Exemple de goof dans La Favorite, l'utilisation du mot posh est impossible, il est apparu en 1914 pour la première fois (moi je ne le connais que parce que c'était le surnom de Victoria Beckham au sein des Spice Girls, ça veut dire chic). L'emploi de posh n'est pas le seul anachronisme, on entend Emma Watson, enfin son personnage d'Abigail, dire trois fois fuck dans un couloir. On se traite aussi de cunt. Bref, notre cinéaste veut faire comme Sofia Coppola dans Marie-Antoinette. Si Lanthimos avait eu quelques idées pour agrémenter son récit, il aurait pu faire entonner « Marlbrough s'en va-t-en guerre » puisqu'on ne cesse de parler de ce général Marlbrough, Marlborough en anglais, l’ancêtre de Winston Churchill, dont l'épouse Sarah gouvernait à la place de la Reine. Si je pensais à chaque fois que j'entendais le nom de Marlborough sur l'écran, c'est parce que je m'emmerdais ferme. Cela dit, La Favorite est moins pénible que La Mise à mort du cerf sacré, ce qui ne veut pas dire grand chose.

Kabullywood (Louis Meunier, 2017)
J'espérais beaucoup de ce film tourné à Kaboul où le cinéma, la salle de cinéma, sauve le monde de l'obscurantisme et surtout de la bêtise. Le dernier exemple serait ce documentaire sur cette salle de Roumanie dans Cinéma mon amour. Mais le film est terne et joue sur la frontière entre documentaire et fiction mais sans jamais réussir à créer un lien fort entre les deux tendances. La reconstruction du cinéma ne semblait pas suffire alors il est ajouté de la romance mièvre, un père récalcitrant et un frère ultra-conservateur. L'histoire se fourvoie dans un schéma typiquement américain (ascension, chute et rupture, réconciliation). C'est une manière réductrice de parler de ces jeunes Afghans comme si ils étaient incapables d'être montrés autrement que dans une narration conformiste. La dernière séquence où les artistes qui jouent sur scène, devant l'écran de cinéma, se veut libératrice mais on n'entend pas ce qu'ils jouent, une musique passe sur leur son, certes c'est peut-être à cause d'un manque de moyens, mais encore une fois, on les empêche de s'exprimer par leur art.

Nicky Larson et la parfum de Cupidon (Philippe Lacheau, 2019)
Mais qu'est-ce qu'on a encore fait au bon dieu (Philippe de Chauveron, 2018)
All inclusive (Fabien Onteniente, 2019)
Une réussite enthousiasmante et deux ratages intégraux. La réussite est Nicky Larson où il est assumé un esprit catoonesque qui doit plus au Niky Larson de Jackie Chan, un chef d’œuvre dans son genre, qu'à la série animée qui passait au Club Dorothée (Dorothée qui fait une courte apparition savoureuse en guichetière d'aéroport). Philippe Lacheau parvient à fournir une scène d'action en caméra subjective qui fonctionne, c'est pas seulement rare dans le cinéma français c'est carrément inédit. La force de Nicky Larson made in France est de varier les comiques, situation, gags visuels, jeux de mots et calembours, références à la sous-culture. Le gros défaut reste les clichés sur les homos, encore et toujours. Dans ces trois films, être gay est un ressort comique qui inspire aux scénaristes des lieux communs. Dans Nicky Larson, le personnage éponyme tombe amoureux de Didier Bourdon à cause de ce parfum qui rend dingue d'amour celui qui sent la personne aspergée. Dans All inclusive, Dubosc et Demaison se font passer pour un couple pour pouvoir profiter d'un grand bungalow. Pas une seule scène drôle ici mais on est ravi de voir que toute l'équipe a passé de chouette vacances en Guadeloupe. Le comique de Franck Dubosc est un mélange désagréable de grande naïveté et d'immense vulgarité dans l'archétype de son personnage, un premier degré dans sa manière de vivre, un enfant dans un monde d'adultes, mais un enfant qui déploierait une ultra sexualité. Dubosc fait semblant de se moquer de son corps en le dénudant, en le plaçant dans des situations a priori ridicules mais paradoxalement il fait preuve d'un pudibonderie qui tourne à l'obsession. Deux mots sur la suite de Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu. En voyant les efforts démesurés des 8 jeunes acteurs sortir leurs répliques fadasses en espérant un rire voire un sourire, c'est déprimant (ici ils ne causent que sécurité comme dans un discours du RN ou de Wauquiez). Ça doit pas être simple de savoir que pendant encore des années les seuls rôles qu'ils auront seront ceux des prochaines suites du film. Ici, le film tente un renouveau avec un mariage lesbien. C'est le seul moment un peu intéressant. Non, je déconne, c'est aussi malencontreusement démagogique et raté que le reste.

jeudi 15 juin 2017

Nothingwood (Sonia Kronlund, 2016)

Le cinéma d'Afghanistan existe, Sonia Kronlund l'a rencontré et il est un homme caméra nommé Salim Shaheen (et le film est distribué par Pyramide avec la signature de son quasi homonyme Youssef Chahine). Depuis plus de 25 ans, il est l'unique vedette du cinéma afghan et a réalisé plus de 100 films dans lequel il a toujours le rôle principal. Comme il le dit dès l'ouverture de Nothingwood, ses films ne sont faits avec rien, aucun argent. Ni Hollywood, ni Bollywood.

Mais c'est ce dernier cinéma qui l'inspire le plus. Salim raconte qu'enfant, il adorait aller voir les comédies musicales de Mumbay, qu'il resquillait pour entrer dans les salles, qu'il se faisait souvent sortir par le caissier. Les quelques extraits des films de Salim Shaheen dans Nothingwood montrent cette influence, plus tard Sonia Kronlund observera la méthode de la star. Il lance sur son téléphone une chanson, danse devant la caméra et le son sera rajouté au montage.

Le film adopte un récit en road-movie et en flash-back. Sonia suit Salim qui tourne 4 films en même temps et il se rend, en avion car les routes sont peu sûres, dans le village de son enfance, Bamiyan, là où les taliban avaient détruit les Bouddhas géants (qu'il visite en rigolant avec Sonia). Il tourne son propre biopic, son enfance, l'armée avec son propre fils l'incarnant, quand il n'est pas occupé à servir de cameraman, sous les engueulades du paternel.

Car Salim n'aime rien tant que parler, tout le temps, avec une forte voix qui couvre toutes les autres, il veut impressionner Sonia qui en a vu d'autres (elle bourlingue en Afghanistan depuis 15 ans). Homme de coffre (son physique a bien changé depuis ses débuts), il ne cesse de fanfaronner, de rire, de se moquer gentiment de ses amis, de poser pour ses fans. Partout où il se rend, il est reconnu. Il a traversé toutes les époques, occupation soviétique, régime taliban, guerre civile.

Ce voyage en Afghanistan est inédit, on découvre un pays que l'on ne connaît pas et qui n'a jamais été filmé depuis des années. Les films de Salim Shaheen semblent être un havre de paix au milieu des routes et maisons en ruine et des attentats. Pour Shaheen, le plus dur est de trouver des actrices tant le poids des traditions est pesant. En début de film, un père accepte que sa fille joue dans un film, à condition qu'elle ne danse pas. Elle ne pourra pas s'empêcher d'avoir le plaisir de danser.

Partout où il va, sa troupe le suit fidèlement. Son fils cameraman, issu d'une fratrie pléthorique (Salim a deux femmes, 8 fils et 6 filles, on ne verra que les hommes). Son dialoguiste attitré, sorte de rocker portant des lunettes de soleil pour masquer ses blessures. Qurban qui adore se travestir à l'écran (il joue la mère de Salim dans son biopic) qui présente, hilare, sa femme et ses enfants, comme s'il avait fait une bonne blague à Sonia. Il vaut à lui tout seul qu'on regarde Nothingwood.