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samedi 25 juillet 2020

La Folie des grandeurs (Gérard Oury, 1971)

Une exposition sur Louis de Funès devait commencer le 1er avril mais Covid19 oblige, elle a été reportée au 15 juillet. J'imagine que l'on peut voir les costumes que l'acteur portait dans ses films en costumes justement et ses films d'époque. Son képi du Gendarme de Saint-Tropez, sa parure de paon de L'Avare mais aussi ceux de La Folie des grandeurs dont la couleur, la plupart du film, est verte, sans doute pour reprendre la phrase de William Shakespeare dans Othello sur la jalousie de ce monstre aux yeux verts. Ici, le symbole du pouvoir sont deux pompons verts qui ballottent au gré des mouvements de la tête de Louis de Funès.

Don Salluste, tel est le nom de ce Grand d'Espagne qui traverse la campagne aride sur son carrosse tiré par une demi-douzaine de chevaux et entouré par des hommes de garde. Don Salluste va collecter les impôts. À l'arrière du carrosse le fidèle Blaze (Yves Montand). Blaze le valet voit tout. Il anticipe tout. Ainsi, quand il arrive dans le village pour les impôts, Blaze fait comprendre au villageois qui pourront récupérer leur en or. Don Salluste penser dominer la situation, il pensait être aimé. Avec ses pompons et ses gants verts, il va se retrouver cul par terre parce que Blaze a scié le siège, de faussement acclamé, il se retrouve chassé par les paysans armés de fourches.

Après cette mésaventure de la collecte des impôts, Don Salluste se fait bichonner par son valet. C'est la célèbre scène du bain, Louis de Funès tout nu dans un baquet et Yves Montand qui lui nettoie les oreilles avec son mouchoir de part en part. Puis cette célèbre réplique « flattez-moi ». « Monsieur est beau », lui répondra le laquais. Le seigneur n'en croit pas ses oreilles, il doit aller vérifier dans un miroir, le flatteur est flatté, même s'il n'y croit guère. Il n'aime que l'argent, la seules chose concrète dont il aime entendre le son « il est l'or, l'or de se lever, monsignor »... « Il en manque une », affirme-t-il dans sa grande cupidité.

Personne n'aime Don Salluste. Ni la reine (Karin Schubert), ni les autres Grands d'Espagne. Il fomentent un complot ces Grands d'Espagne, ceux-là qui sont réellement de très grande taille. Au milieu du cadre de La Folie des grandeurs, Louis de Funès apparaît riquiqui à côté des autres acteurs dont Venantino Venantini. Puis, c'est la Reine d'Espagne avec son accent allemand qui accuse Don Salluste d'avoir engrossé une bonne. Ridicule dans son accoutrement qu'il n'a pas eu le temps d'enfiler, le pantalon glisse, la fraise à peine fixé, il a bien du mal à se défendre. C'est le bannissement. Au tour de Don Salluste de fomenter son complot.

S'il ne peut pas épouser l'Infante (« mochet »), s'il ne peut pas accéder au pouvoir, alors César pourra. César ce neveu de Salluste est un brigand qu'il faut le retrouver pour l'expédier aux Barbaresques puis le remplacer tout simplement par le fidèle Blaze. Voici donc à ce stade du film deux complots qui vont s'entrechoquer, deux complot ourdis par deux clans différents avec chaque fois des rebondissements afin de créer toute une panoplie de quiproquos. Et dans cette complexité, il y a un élément qui va jouer à la faveur de Don Salluste. Blaze ce simple serviteur est tombé amoureux de la reine.

Sauf que la reine comme le dit sa suivante, la stricte Dona Juana (Alice Sapritch) n'a pas le droit de se voir offrir des myosotis, la reine n'a pas le droit d'écouter des chansons sur le balcon. Ainsi quand les Grands envoient une bombe sur le roi d'Espagne, Blaze jouant César sauve la situation. Et au creux de l'épée de ce faux César, Don Salluste a bien pensé à ajouter un bouquet de myosotis. La reine comprend immédiatement que cet homme est celui qui lui a fait la cour dans le jardin sous le balcon. Immédiatement elle tombe amoureuse de lui. Blaze remplace son ancien maître à la collecte des impôts et se met à dos les Grands qui doivent y contribuer.

« Encore un complot, cette fois ils veulent tuer Blaze, il faut absolument que je le prévienne, sinon c'est mon complot à moi qui s'effondre ». Dans cette magnifique réplique envoyée par Louis de Funès, Don Salluste tente de faire le point sur le complot pour déjouer le complot qui doit donc déjouer le premier complot. Il pousse jusqu'à l'absurde la situation. En fin de film, il dira « j'ai un petit plan pour tous nous évader, nous rentrons à Madrid, nous conspirons, le roi répudie la reine, la vieille épouse le perroquet, César devient roi, je l'épouse et me voilà reine ». Chacun se retrouve à la place de l'autre dans un échange des personnalités des rôles et des rangs ce qui permet à Louis de Funès de se déguiser successivement en vieille femme, en valet, en moine lors de la procession religieuse.

Dans chacun des films de Gérard Oury joué par Louis de Funès, il incarne toujours un personnage englué dans son délire de troubles de la personnalité dans Le Corniaud l'escroc fera tous les métiers, dans La Grande vadrouille le chef d'orchestre va se travestir à plusieurs fois et l'année suivante dans Les Aventures de Rabbi Jacob Pivert deviendra rabin. Cette folie des grandeurs le pousse à devenir le gendre du roi et de la reine mais évidemment tout se solde par un échec lamentable qui le conduira aux barbaresques où il retrouvera les autres Grands d'Espagne et mais aussi Blaze, qui était pourtant parvenu à présenter au roi, venu vérifier si la reine le trompait avec César (le dernier complot de Don Salluste) et feignant d'avoir un rendez-vous galant avec Dona Juana.


J'aime beaucoup ce personnage d'Alice Sapritch. L'actrice a finalement que peu de rôle au cinéma. Elle apparaît d'abord dans La Folie des grandeurs comment un personnage hautain et reigide (le menton en l'air), elle ordonne à la reine de respecter le protocole à la lettre une personne extrêmement rigide. Dans le jeu de colin-maillard, les suivantes de la reine l'écartent de la reine. Mais elle est persuadée que le Don César qu'incarne Blaze est amoureux d'elle, elle se trompe bien sûr, elle se trompe d'autant plus que ce n'est pas César dont elle embrasse les mains mais un gros mâtin. Le morceau de bravoure est cette dans l'auberge. Dona Juana débarque dans la chambre de Blaze et entame un strip-tease. C'est l'une des plus délirante du cinéma français.

































mercredi 29 mai 2019

La Grande vadrouille (Gérard Oury, 1966)

Le Paris de La Grande vadrouille grouille de résistants. Partout, dans le parc zoologique de Vincennes, à l'opéra Garnier, sur l’échafaudage d'un immeuble, personne n'aime l'occupation allemande et quand trois aviateurs anglais, contraints et forcés par les tirs de la DCA, se trouvent à sauter en parachute après s'être perdus en vol, ils atterrissent dans le ciel de Paris et la folle course poursuite démarre, ce sera à celui qui échappera le premier aux soldats allemands.

Rien n'est dit sur cette époque bénie où aucun Français n'était collabo. C'est qu'ici, on n'est pas encore dans Papy fait de la résistance, l'autre film comique sur l'occupation et la résistance secrète. Les deux films, distants de 18 ans seulement, fonctionnent sur un comique similaire qui file tout le récit, le conduit pour indiquer que tout cela n'est qu'un gentil simulacre : le déguisement, le travestissement.

Pour Martin Lamotte chez Jean-Marie Poiré, ce sera le costume de Super Résistant, chez Gérard Oury, le premier opposant à l'occupation est le comédie lyrique de l'opéra qui doit incarner Méphistophélès dans le Faust. Dans son bel habit rouge de diable, il indique à trois ou quatre techniciens où et comment installer la bombe qui doit exploser quand un ponte de la Wehrmacht va venir assister au spectacle. Le diable pour sauver la France.

On remarquera dans cette séquence de préparatifs d'un attentat que tout le personnel de l'opéra semble convaincu de cette cause. Que personne n'a peur d'agir, ni de s'exprimer, certes tout dans la discrétion. Mais c'est bien une France unie contre l'occupant qui est décrite rapidement dans les diverses séquences d'ouverture, tout le monde sauf nos deux héros, le chef d'orchestre Stanislas Lefort (Louis de Funès) et le peintre Ausgustin Bouvet (Bourvil).

Le premier est lui aussi déguisé, il porte une perruque à la Beethoven et se fait donner du « Herr Kappelmeister » par le commandant à la recherche des Anglais. Quand Stanislas comprend que McIntosh (Mike Marshall) le parachutiste est dans sa loge, hop, il le déguise en élève bien propre sur lui à qui il donne des leçons de harpe, puis il sera déguisé en jeune femme quand il faudra le faire sortir de l'opéra.

Augustin reçoit sur la tête Cunningham (Claudio Brook, l'acteur mexicain jouait la même année Simon du désert pour Luis Buñuel). Après une course sur les toits de Paris, Augustin et l'Anglais débarquent chez une jolie jeune femme Juliette (Marie Dubois) et pour tromper les soldats allemands, ils se font immédiatement passer pour mari et femme (l'une de ces scènes où Bourvil s'extrait pour un court temps de son apparence naïve pour devenir un macho).

Enfin, pour retrouver le troisième Anglais, Sir Reginald (Terry-Thomas), un homme à la moustache proéminente – qu'il devra couper, autre travestissement mais inversé – le peintre et le chef d'orchestre vont aux bains turcs et se font passer pour des Anglais, chantant Tea for Two, cherchant un moustachu, la scène flirte avec la drague homosexuelle quand les deux hommes tournent autour d'un gros moustachu qui n'a rien demandé.

La grande vadrouille, la course vers le sud et la France Libre commence. Encore une fois, un changement de tenues s'effectue quand les quatre hommes volent des vêtements à des passants (McIntosh travesti en fille de joie attire les hommes sur le trottoir). Habillés en civils, pouvant passer inaperçus, ils finissent pour ne pas se faire prendre par les hommes du Major Achbach (Benno Sterzenbach) par se faire passer pour des postiers.

Au fur et à mesure de leur trajet, au fil des séparations et des retrouvailles, Augustin et Stanislas doivent changer leur identité, devenir les époux ivrognes de Juliette et de la patronne de l'auberge (Colette Brosset), porter des uniformes allemands pour traverser la frontière mais avant cela ils auront le malheur de se tromper de chambre dans l'hôtel et vont se retrouver dans les chambres et les lits de ceux qui le traquent.

Face à tous ces changements, déguisements, travestissements, seuls les Allemands ne changent pas, toujours obnubilés par les ordres qu'ils donnent et reçoivent. C'est cela qui va les perdre, ils ne s'adaptent jamais aux situations contrairement à nos héros français comme anglais, hommes et femmes courageux qui décident de ridiculiser l'imposant et intransigeant Major Achbach pour lui prouver qu'il a toujours tord.


Tous les Allemands seront ainsi ridiculisés, humiliés (dès le départ avec ce pot de peinture qui gicle sur un général), réduits à des animaux stupides (Achbach ronfle comme un cochon), c'est ce qui s'appelle une revanche sur l'Histoire, le grand travestissement de la résistance et de l'occupation en un généreux compromis comique.