Je
continue mon périple dans le film biblique, je crois que j'aime bien
ça surtout quand le combo nanar / délire bigot pointe le bout de
son nez et avec Darren Aronofsky derrière la caméra et Russell
Crowe devant, c'est la garantie de bien rigoler. Effectivement ce Noé
millésimé 2014 est d'une nullité pratiquement du début à la fin,
avec en prime Anthony Hopkins plus mauvais que jamais, cabotinant en
oracle conseillant Noé et toute sa famille, habillé de tissu en
lambeaux, le visage boursouflé de rides exagérées et une tignasse
de longs cheveux blancs laissant apparaître une large calvitie.
Le
destin de Noé est connu de tous mais il s'agit dans ce long, très
long, trop long film de le rendre hollywoodien. Il est nécessaire de
la rendre spectaculaire car des les quelques versets du live de la
Genèse, rien n'est spectaculaire, bien au contraire. Les lignes
consacrées à l'arche de Noé se contentent de donner les dimensions
de l'embarcation, d'indiquer qui a embarqué et que les animaux sont
recueillis en couple pour repeupler la Terre. Si Darren Aronofsky
s'en était tenu à la Bible, le film aurait duré 40 minutes comme
dans ce film muet que j'avais vu en décembre, Noah's ark et
The Deluge. Déjà un film édifiant.
Noé
a des visions, un serpent au yeux perçants qui s'avancent dans
l'herbe grasse, une main phosphorescente qui saisit un fruit. Oh
l'allusion au Jardin d'Eden, à Adam et Eve dont il est rappelé à
plusieurs reprises dans des dialogues grandiloquents qu'il en est le
descendant (au cas où on aurait oublié). Plus tard, Noé fait un
terrifiant cauchemar. Il est sous l'eau et voit des milliers de
personnes se noyer, il voit des milliers d'animaux remonter à la
surface pour rejoindre un immense bateau en parallélépipède.
Tiens, je crois que je vais construire une arche et faire grimper des
animaux dedans dit-il au bord de son lit à son épouse (Jennifer
Connelly) qui acquiesce.
Le
temps d'une pause, parlons de la famille de Noé. Avec sa femme, il a
eu 3 fils. Attention Shem (Douglas Booth) l'aîné est un mannequin
pour shampoing, il a de très soyeux cheveux longs et un sourire
ultra-brite. Le second Cham (Logan Lerman), cheveux courts, est un
rebelle, il est peu jaloux de la meuf de son grand-frère, Ila (Emma
Watson, l'actrice se croit dans un soap opera). Les deux amoureux se
roulent des pelles dans la forêt. Mais Ila est toute triste car elle
ne peut pas tomber enceinte. Enfin, le petit dernier Japheth (Leo
McHugh Carroll), un rôle qui ne sert absolument à rien. Tous sont
des jeunes gens, à peine adultes.
Evidemment
Darren Aronofsky modifie beaucoup le récit de la Genèse pour
apporter un peu de chair car non seulement Noé était un vieillard
dans la Genèse mais en plus ses trois fils étaient mariés et
accompagnés de leur famille dans l'arche. Le film joue sur un
suspense existentialiste : l'humanité va-t-elle survivre avec
Ila comme unique femme sur l'arche ? Car elle est stérile,
comme je le disais plus haut, et son fiancé le rappelle à chaque
ligne de dialogue. Quand le cadet se trouve une fille, son père la
laisse crever quand l'eau commence à tomber pour entamer le déluge
divin. Cham en est tout fâché.
Mais
surtout Noé est un film d'action avec des effets spéciaux
délirants (les géants de pierre qui aident à la construction de
l'arche) mais hideux, une bataille épique avec le descendant de Caïn
(Ray Winstone), soit des milliers d'hommes qui veulent embarquer dans
l'arche. On ajoute une pincée de complot, le fils Cham qui recueille
en secret ce aïeul de Caïn. Bref, il y a de quoi tenir une heure de
plus avec tout un tas d'éléments dignes d'un film d'action,
paradoxalement, une fois que l'eau a tout envahi, le film ne cherche
pas à créer du suspense sur un éventuel danger aquatique (par
exemple un trou dans la coque de l'arche).
En
revanche, le film se lance dans un défi scientifique et là est le
seul intérêt du film. Noé cherche à faire coïncider la
bêtise du récit biblique avec la science. Ainsi, une fois les
animaux entrés dans l'arche, ils sont endormis grâce un encens créé
SCIENTIFIQUEMENT par l'épouse de Noé. Astucieux. Mais le morceau de
bravoure est le récit de la création de la Terre en 7 jours sur des
images qui illustrent la théorie du Big Bang et de l'évolution des
espèces. Tout ça en quelques minutes à peine. Ça ressemble
vaguement à la séquence cosmique de Tree of life. Tout cela
dénote surtout l’ineffable naïveté de Darren Aronofsky dans
cette tentative risible de réconcilier deux courants si opposés, en
tout cas aux USA où le créationnisme a tant d'adeptes.
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