Avant
d'avoir pu voir un seul de ses films, j'avais en tête une image
parue dans les Cahiers du cinéma, dans ce fameux numéro spécial
« Made in Hong Kong » en septembre 1984. (je ne l'ai pas
lu à l'époque mais une quinzaine d'années plus tard). Cette image
montrait Michael Hui la gueule enfarinée, mais pas totalement, il
avait placé un écumoire pour se protéger de son agresseur, d'où
ce résultat en petit pois. La photo, recadrée, était en noir et
blanc, ce n'est qu'en 2011 que j'ai pu enfin voir que cela venait de
The Private eyes.
Les
aventures de Michael Hui ont été connues sous le nom de Mr. Boo
(appelé ainsi au Japon), un personnage récurrent antipathique,
injuste et radin. Il est la mesquinerie incarnée, un peu comme Louis
de Funès, mais parlant cantonais et toujours pauvre. Dans The
Private eyes, connu sous le titre français Mr. Boo détective,
il fait son nid sur la misère des autres, en l'occurrence la misère
sexuelle des habitants de Hong Kong. La majorité des cas qu'il
traite concerne l'adultère. Il suit la maîtresse qui va rejoindre
son amant, il les prend en photo sur le fait et vend les photos à
l'épouse cocue.
Le
comique naît de son incapacité à être discret (il espionne sans
subtilité), de sa maladresse (dans la première filature il manque
de se faire écraser par un ascenseur puis finit dans un trou plein
d'eau) et du mépris qu'il génère (la cliente refuse de payer pour
quatre pauvres photos et s'en va). Résultat, il se venge sur son
pauvre assistant surnommé Bouffi (Ricky Hui) déjà rudement mis à
l'épreuve, sa minerve en témoigne, traité comme un malandrin, mal
payé et racketté. Au moindre pot cassé, le patron se rembourse sur
le salaire de son employé, laissant le pauvre diable à son air
dépité.
Malgré
tous ces défauts, Kit (Samuel Hui) débarque un jour dans le bureau
de Wong (le nom du personnage de Michael Hui). Ce dernier est
serviable à souhait, obséquieux, offre des chocolats à ce nouveau
client potentiel. Il faut être sympathique car les affaires ne
tournent pas bien, « en déficit pour la 8ème année
consécutive » dit-il. Mais Kit n'est pas un client mais vient
pour se faire embaucher après s'être fait virer de son usine de
bouteilles de lait, le gars passait plus de temps à draguer et
imiter Bruce Lee, une habitude chez l'acteur, qu'à surveiller les
bouteilles qui forcément s'entassent et se cassent.
Dès
que Wong comprend sa méprise, il devient bien moins agréable et
récupère son chocolat, non sans avoir batailler avec encore
quelques prouesses de kung-fu. Devant l'incompétence de Kit (il ne
sait pas conduire, il ne sait pas prendre de photo, il n'a jamais été
détective), le patron l'embauche immédiatement. Voici son nouveau
soufre-douleur, tout neuf, tout beau, tout propre. Et c'est parti
pour quelques enquêtes diverses et variés, histoire de ne pas faire
mentir le titre. Comme à son habitude, Michael Hui fait une suite de
sketches de valeur inégale, certains sont désopilants, d'autres ont
mal vieillis.
Le
moment tant attendu de l’écumoire dans la cuisine arrive. Wong
poursuit un pickpocket (Chan Kim-wan). Ils se battent avec ce qui
leur tombe sous la main (on sent la patte de Sammo Hung), par exemple
des carcasses de poisson avec la musique des Dents de la mer,
puis avec des saucisses utilisées comme nunchaku sur la musique d'un
film de Bruce Lee (ça recycle le gag supprimé de Samuel Hui dans
Games gamblers play). Et cet écumoire qui remplace
partiellement un sabre et qui parsème le visage de notre détective
à la manque de taches de farine.
Le
plus gros récit de The Private eyes suit une bande de
malfrats menée par Sheh Kin. Il a une méthode bien à lui pour
dérober le bien des autres. Sa bande les coince dans une ruelle
déserte, leeur fait enlever leurs vêtements et leur pique tout. En
début de film, Michael Hui nous présente ces gangsters et les fait
croiser Kit qui n'a pas compris qui ils sont. Il prenait tout
simplement le bus et quand l'un d'eux devenait un peu menaçant, Kit
utilise son habileté et ses poings pour lui donner une bonne leçon.
En prime, il se sert de la mâchoire de ce malfrat pour ouvrir sa
bouteille de lait piquée à l'usine.
Le
grand finale du film retrouve Sheh Kin et ses malfrats. Ils vont
détrousser tout un public dans une salle de cinéma comble (ils
regardent un film d'action). Seulement voilà, rien ne se passe comme
prévu, d'abord parce que Wong est dans la salle pour une filature
ensuite parce que les quiproquos mêlés aux maladresses des malfrats
se succèdent. C'est dans cette dernière partie que la mise en scène
de Michael Hui produit ses meilleurs effets, quand il mélange les
variations comiques. Comme les spectateurs dans la salle devant tant
de couillonnades, on rit nerveusement.
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