Il
pleut, des trombes d’eau, il n’arrêtera pas de pleuvoir, le son
de l’eau qui coule, entre ploc ploc des fuites au plafond et le
ruissellement ininterrompu dans la cour de l’immeuble déserté en
cette semaine de changement d’année. On va rentrer dans l’an
2000 avec son bug informatique mais surtout un virus qui se répand
dans toute la ville. Tous les habitants ont fui leurs logements parce
que le gouvernement va couper l’eau potable. Tous sauf deux, lui
(Lee Kang-sheng) et elle (Yang Kuei-mei). Il habite au dessus de chez
elle et ne se sont jamais rencontrés.
Il
boit beaucoup, rentre chez lui saoul et vomit dans le trou creusé
par le plombier pour réparer une fuite qui se répandait dans la
salle de bains de la voisine du dessous. Il tient le dernier magasin
ouvert dans la galerie, de temps en temps un vieux monsieur (Miao
Tian, qui jouait le père dans La
Rivière) vient acheter
un produit. Le vendeur est à côté, en train de donner à manger au
chat errant qui a élu domicile ici et qui semble être la seule
raison pour laquelle le jeune homme reste dans l’immeuble.
Elle
passe son temps à écouter les infos à la télé (pas très
rassurantes les infos qui semblent annoncer une fin du monde très
proche), elle fait pipi avec une bassine sur la tête pour ne pas
recevoir les gouttes de fuite, elle déplace des centaines de
rouleaux de papier hygiénique du débarras dans le couloir et,
surtout, elle essaie de convaincre le voisin de faire enfin réparer
ce trou qui les conduit à la promiscuité. D’un appartement à
l’autre, c’est un échange continu. Le réveil de l’homme
sonne, ça dérange la femme, elle tue des cafards au spray, l’odeur
rentre chez lui.
Les
deux appartements de The
Hole n’en formeront
bientôt qu’un seul. Et les deux derniers survivants (puisque Tsai
Ming-liang les voit ainsi) vont sans doute former un couple. Le
cinéaste reste assez elliptique sur ce sujet mais les chansons qui
ponctuent le film semblent plus claires. Régulièrement, comme
mouvement du récit, des chansons de Grace Chang prennent en charge
les sentiments des personnages. Jolies chorégraphies dans les
couloirs où des couleurs vives viennent illuminer un quotidien
blême. Le procédé sera repris par Tsai Ming-liang dans La
Saveur de la pastèque,
amplifié même.
Les
chansons sont pimpantes, Yang Kuei-mei chante en play-back, danse en
robe de soirée avec trois jeunes femmes ou cinq danseurs en tuxedo.
Lee Kang-sheng, en smoking blanc, tente, tant bien que mal,
d’esquisser une danse, un tango. Il a toujours du mal à bouger son
corps qui semble endolori à jamais. C’est tout à fait charmant
alors que les chorégraphies sont fauchées, le play-back à la
limite de l'approximation. Mais quand c’est la fin du monde, on ne
fait pas attention à cela. Qu’importe le flacon, pourvu qu’on
ait l’ivresse.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire