Dernier
film (chronologiquement) de Hou Hsiao-hsien programmé par Carlotta
cet été, Poussières dans le
vent était déjà sorti en
France en 1991. Deux personnages, un homme Yuan et une femme Yun,
pris dans une histoire d'amour qui ne cessera jamais d'être
reportée, qui semble jamais ne pouvoir démarrer et s'épanouir, qui
s'englue dans le quotidien morne et banal que le cinéaste taïwanais
se plaît à décrire avec minutie, dans ses moments de creux en
fiction où les deux héros vont passer de la jeunesse à l'âge
adulte, comme une suite directe à Un
temps pour vivre un temps pour mourir
où Ah-ha, le personnage miroir d'Hou Hsiao-hsien, pourrait enfin
tenter de séduire la fille à qui il parlait à la fin du film.
La
famille est moins nombreuse, cette fois c'est un grand-père qui
tisse un lien très fort avec le jeune homme. Ce grand-père cherche
à le retenir dans cette campagne d'où l'on accède qu'avec un vieux
train qui traverse les tunnels de la montagne. Le vieillard lui
enseigne les vieilles traditions taoïstes, il veut lui transmettre
son passé. Mais Yuan s'ennuie terriblement malgré l'amitié qu'il a
pour Yun. Le jeune homme veut absolument quitter la montagne pour
Taipei, dans le même mouvement d'indépendance qu'avaient Les
Garçons de Fengkuei. On a un
peu l'impression d'être dans un film d'époque jusqu'à son départ
où la grande ville est synonyme de modernité. Avec son visage
triste (l'acteur ne semble jamais vraiment vouloir esquisser un
sourire), Yuan se retrouve dans la capitale.
La
jeune fille ne va pas tarder à rejoindre Yuan à Taipei, sans jamais
oser franchir le pas de l'histoire d'amour véritable. Et là-bas, il
faut bien vivre. Yuan bosse dans une imprimerie où la patronne le
traite pis que pendre (l'engueulade pour ne pas avoir apporter le
repas à son fils est terrible, d'autant qu'il n'ose pas répondre).
Yun travaillera chez un couturier mais elle n'est pas très
dégourdie. Là, le matérialisme romantique se met en place, Yun
coud une chemise à Yuan, mais elle s'avère trop large. Toute la
maladresse du couple qui ne se formera jamais est décrite dans cette
chemise. Et plus tard, ce seront les lettres qu'ils s'échangeront
pendant qu'il est à l'armée (le film évoque d'ailleurs dans ces
séquences les réfugiés chinois qui fuient le continent), des
dizaines de lettres où ils se racontent leur vie réciproque.
Derrière
cette romance toute en langueur, en longs plans où la caméra fixe
recule pour cadrer l'ensemble de la scène, Hou Hsiao-hsien nous
parle de cinéma. En début de film, Yun et Yuan voient dans le
village l'écran de toile s'installer pour une projection de film.
Plus tard, à cause des coupures d'électricité, la projection sera
interrompue (quel est donc ce film où une paysanne conduit une
troupe de canards au champ ?). Entre ces deux scènes, Yuan
logera dans le grenier d'un cinéma (dans Cute
girl, c'était un théâtre),
où l'on entend le son des répliques du film de kung-fu projeté. Et
le colocataire de Yuan a pour métier d'être peintre de ces affiches
de cinéma au format géant qui ornait les salles de cinéma jadis.
Au moins pour ces notations sur le cinéma, on peut dire que
Poussières dans le vent a
une inspiration autobiographique.
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