« Je
suis un solitaire. Un rebelle ». Voilà ce que dit Pee-Wee
quand on lui vole son beau vélo chromé rouge. Pee-Wee Herman (Paul
Reubens, mais le générique l'annonce sous le nom de son personnage
très populaire à la télé américaine dans les années 1980) a une
passion folle pour la bicyclette, ce qui au pays de la voiture comme
valeur suprême pose déjà Pee-Wee dans une position de marginal, de
solitaire, de rebelle. Au mieux, il est l'égal des enfants avec qui
il converse, eux sur leur BMX, lui sur son super biclou, au pire, il
n'est pas mûr pour conduire une voiture.
Pee-Wee
Big adventure commence par un
rêve, en France, lors d'une étape du Tour de France. Tout les décor
est construit pour faire factice, une Tour Effeil de carton, des
cyclistes portant tous le même maillot et le même casque. Et
Pee-Wee sur son vélo qui les dépasse et qui remporte la victoire.
Il s'apprête à recevoir sa médaille quand il se réveille. Il est
là, dans son petit lit, dans sa petite chambre, avec son grand
sourire. Et l'idée géniale de Tim Burton, dont la marque est
présente partout dans le film, est de faire de cette chambre un
endroit aussi factice que le rêve vu juste avant.
La
maison de Pee-Wee, que l'on ne verra que dans cette séquence du
petit-déjeuner, est un bric-à-brac où les jouets s'accumulent dans
la chambre. Il quitte son lit en pyjama, joue un peu, descend dans la
cuisine par une rampe de pompiers et le voici déjà dans son costume
étriqué gris avec un nœud papillon rouge. Le mécanisme du
petit-déjeuner s'enclenche, sur une musique guillerette de Danny
Elfman. Tout un tas de machines hétéroclites issues de jouets qui
deviennent des appareils ménagers pour faire les crêpes, presser
une orange et dresser la table. Tim Burton utilisera cette idée du
mécanisme pour la machine à fabriquer Edward
aux mains d'argent.
Les
longues scènes de présentation permettent à Tim Burton d'élaborer
son imagerie gothique, ce qui semble un paradoxe avec l'image de
marque de Pee-Wee Herman, personnage puéril et enfantin, où chaque
objet est source d'amusement. Mais on remarque, rétrospectivement,
ici un squelette stylisé, plus loin une animation comme celle de
Beetlejuice,
dans une scène de cauchemar le visage d'un clown proche du rictus du
Joker de Batman,
des dinosaures à la forme similaire à ceux taillés dans Edward
aux mains d'argent. Le film
comme un navet à sa sortie par la critique française a depuis gagné
ses gallons de la cinéphilie.
Le
film se faufile dans la parodie avec l'aide de la musique de Danny
Elfman. Pee-Wee cache son vélo dans un lieu secret, quand il
apparaît pour la première à l'image, un pastiche du thème d'Ainsi
parlait Zarathoustra présente l'engin, quand Francis (Mark Holton)
vient taquiner Pee-Wee pour qu'il lui offre la bicyclette pour son
anniversaire, on se croirait dans un film de John Waters, puis quand
le vélo est volé et qu'il s'en aperçoit, la musique évoque
Hitchcock, autant celle de Psychose
que celle de Sueurs froides.
Les parodies auront lieu aussi en fin de film avec les faux tournages
de film, celui de Godzilla
est superbe.
On
l'aura donc compris, Pee-Wee s'est fait fauché son vélo si
précieux. Le gentil visage se transforme en monstre de haine qu'a du
mal à contenir Dottie (Elizabeth Dailly), une amie de Pee-Wee qui
aimerait devenir sa petite-amie. Elle a beau l'aider, sa fureur le
rend aussi monstrueux que Mister Hyde errant dans les rues (encore
une ombre gothique typique de Tim Burton) à la recherche de
vengeance. Pee-Wee va voir une voyante qui, tout en lui piquant son
argent, lui annonce que son vélo est à Fort Alamo. Pee-Wee annonce
à Dottie qu'il part à la recherche de sa bicyclette.
Muni
d'une pancarte pour le Texas, il fait du stop pour découvrir
l'Americana.
Son premier conducteur est Mickey (Judd Omen) qui vient de s'évader
de prison. A un contrôle de police, Pee-Wee se déguise en bonne
femme pour qu'ils puissent passer. Mickey s'est fait un nouvel ami
mais l'abandonne en pleine brousse car lui aussi est « un
solitaire, un rebelle » et il doit poursuivre seul sa cavale.
Il se fait remorquer par Large Marge (Alice Nunn) au visage
impassible et une coiffure digne de La
Fiancée de Frankenstein. Elle
lui raconte une horrible histoire d'accident.
L'équipée
avec Large Marge tourne court, elle laisse Pee-Wee à un Drive Inn de
routiers où il fait connaissance de Simone (Diane Salinger). Dans la
bouche d'un dinosaure, ils observeront le lever de soleil en se
confessant. Puis, c'est un clochard édenté dans un train, des
touristes à Fort Alamo et tout un gang de bikers passablement
énervés qu'il ait renversé leurs motos pour lesquels il dansera,
non sans talent, sur le comptoir du bar. Pee-Wee rencontre pendant
tout le film, des Américains, rednecks, déclassés ou tristement
banaux. Avec chacun d'eux, il se sent comme chez lui.
Quand
enfin, il découvre où se trouve son vélo, Pee-Wee
Big adventure se poursuit avec
une mise en abyme dans les studios de la Warner. On découvre un
enfant star capricieux et détestable, Milton Berle venu faire un
coucou, des tournages de films à la chaîne comme à l'époque
glorieuse des premiers temps de l'industrie. Evidemment, Hollywood
s'empare de l'histoire de Pee-Wee pour tourner un film « inspiré
de faits réels » où James Brolin jouera Pee-Wee et une blonde
peroxydée (Morgan Fairchild) incarnera Dottie. Par chance, Tim
Burton nous a évité ce film-là.
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