Comme
j’apprécie ce que font Eric et Ramzy, ensemble ou en solo, je vais
voir les films qu'ils font. Six mois après La Tour 2 contrôle infernale
par Eric Judor, que j'avais qualifié de film au futur antérieur,
voici Hibou
de Ramzy Bedia, un film, pour sa part, au conditionnel. Sur le mode
de ces jeux pour enfants « alors, on dirait que je suis un
hibou et toi on dirait que tu es un panda ». Mais avant que le
costume de hibou n'enveloppe Ramzy Bedia et que celui de panda ne
couvre Elodie Bouchez, on fait connaissance avec les personnages sans
déguisement.
Ramzy
est Rocky. Même lettre de début et de fin, idéal pour un prénom
qui roule. Rocky a un boulot dans une entreprise de pharmacie. Il
contrôle les notices des médicaments. Son bureau est un foutoir
improbable où les modes d'emploi tous froissés s'amoncellent sur
son espace de travail. Il est intéressant de voir que son ordinateur
est un iMac, ces vieux Apple en forme d'escargot qui faisaient fureur
au début du millénaire. Il est bordélique, il oublie toujours son
pass pour le portique, sous le regard méprisant de Christel,
l'hôtesse « d'accueil ».
J'aime
beaucoup les regards que lance Rocky à ses collègues qui ne
daignent pas jeter un œil sur lui. La « charmante »
Christel prend une photo à chaque gaffe de Rocky, les quatre
collègues de son bureau ouvert prennent le café ensemble, le
déjeuner ensemble, passent le week-end ensemble, sans que jamais ils
ne pensent à l'inviter ou lui proposer de participer. Rocky
s'incruste dans les conversations, balance une blagounette, répond à
une question. Personne ne fait attention à lui. Rocky est « seul
one ».
Plus
qu'un scénario vraiment développé, Hibou
prend la voie buissonnière avec des petits détails insignifiants
mais qui constituent les personnages. Rocky ne mange que des boîtes
de conserve de thon, de toutes les recettes, de toutes les variétés.
Son placard en est rempli. Rocky porte des pantalons trop courts, ce
qui sur un grand échalas comme Ramzy Bedia confère un aspect
enfantin qui rappelle Pee-Wee Herman. Rocky dort sur son canapé et
son réveil a une drôle de sonnerie. Et un matin, un hibou est là à
le regarder.
Pourquoi
un hibou ? La seule réponse valable est : pourquoi pas ?
Un hibou, surtout ce grand duc, c'est très beau. Il lance son petit
cri, il tourne la tête, il ouvre ses grand yeux jaunes et noirs. Et
ça mange quoi un hibou ? Direction l'animalerie tenue par
Etienne Chicot (et la voix d'Elodie Bouchez). Ça mange des souris.
Va pour les souris. Rocky va décider de porter ce costume de hibou
pour attirer l'attention sur lui, mais personne ne va même remarquer
la différence, sauf cette fille qui porte un costume de panda.
Les
acteurs québécois (le film a été tourné au Canada) jouent tous
des personnages falots. Le film développe, à côté de son récit
gentiment surréaliste, une galerie de personnages farfelus. Le
patron irascible (François Rollin), le père musicien retraité (Guy
Marchand), le voisin du dessous (Philippe Katerine) chanteur de la
Banane, un bénévole associatif (Franck Gastambide) et bien-sûr
Eric Judor en vendeur de café. Le film a la bonne idée d'être
court, il trébuche parfois, il est inégal, on sourit un peu, c'est
tout en douceur. J'attends son deuxième film.
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