Dans
le cinéma italien, Luigi Comencini a longtemps été cantonné par
la critique à la case « cinéaste de l'enfance », de
L'Incompris à Un enfant de Calabre en passant par Les
Aventures de Pinocchio. C'est sans doute pour cela que La
Femme du dimanche a tant décontenancé lors de sa sortie en
avril 1976. Cette comédie policière menée tambour battant par le
commissaire Salvatore Santamaria (Marcello Mastroianni) tourne autour
d'un objet, scabreux et incongru : une sculpture de phallus en
érection, grandeur nature. Pas tout à fait un jouet pour bambins.
L'homme
qui a été assassiné par ce phallus s'appelle Garrone (Claudio
Gora), un architecte un peu véreux, peu scrupuleux et dont le
passe-temps favori est de draguer les femmes. Adipeux et peu aimé de
ses contemporains, Garrone ne manque à personne et surtout pas à
Anna Carla Dosio (Jacqueline Bisset), une bourgeoise bon teint. Elle
devient la première suspecte quand ses deux domestiques, vexés
d'avoir été renvoyés, envoient à Santamaria un brouillon de
lettre écrite la veille de sa mort où elle veut éliminer Garrone.
Compromettant, en effet.
Le
chef de Santamaria ne voit guère d'un bon œil que son flic suspecte
l'une des membres de l'élite turinoise (le film se déroule dans la
capitale du Piémont), il envisage d'accuser les terroristes rouges
(déjà à l'époque on ne parlait que de ça). Santamaria est
secondé par deux flics peu doués et pas franchement fins limiers,
histoire d'apporter un peu de comédie burlesque (la filature ratée
et grotesque) au sein de l'enquête policière. Mais le commissaire
tient bon et à chaque rencontre, il imagine cet éventuel suspect le
phallus à la main en train de frapper le crâne de Garrone.
Cet
objet est un simple MacGuffin, le commissaire partage le point de vue
du spectateur : il avance en tâtonnant dans son enquête,
recevant de maigres indices. Ce qui compte dans La Femme du
dimanche c'est l'étude des mœurs. Le libertinage de Anna Carla,
l'homosexualité de son meilleur ami Massimo Campi (Jean-Louis
Trintignant), aristo et de son amant Lello Riviera (Aldo Reggiani),
un journaliste qui mène sa propre enquête, histoire de dédouaner
son amoureux, lui aussi suspect. Le tout sous la musique grinçante
d'Ennio Morricone, mélange de piano et de cordes, au diapason de
cette société cynique.
La
société de Turin, ville du siège de la FIAT, est au centre de
toutes les critiques que professent Luigi Comencini et ses deux
scénaristes Age et Scarpelli, une société obsédée, pas seulement
par le sexe, mais par le pouvoir, l'argent, leur réputation. Ils
sont racistes, égoïstes, homophobes, rancuniers, vénaux. Bref, des
affreux, sales et méchants et pour confondre le meurtrier, le
commissaire originaire de Rome (ce qu'on lui reproche) est prêt à
tout, y compris séduire Anna Carla et vaguement Massimo, avant de
résoudre l'énigme et retrouver son épouse, satisfait d'avoir
achevé sa tache.
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