mardi 30 mai 2017

Jaguar (Jean Rouch, 1967)

Jaguar, c'est l'histoire de trois mecs du Niger qui décident de partir en Gold Coast, aujourd'hui le Ghana. Lam est Peul, il est gardien de vaches dans la brousse, Ilo connaît le fleuve comme sa poche et sait conduire les pirogues pour pêcher et chasser l'hippopotame, Damouré, à la coiffure parfaite, se définit comme un galant, il admire toutes les femmes. Jean Rouch est allé les filmer en 1954, avant la décolonisation et le film est sorti en 1967.

Avant le départ, il faut consulter l'imam et faire un tour à la Mosquée. Il faut prendre conseil auprès du chef de village. Pour compléter, il faut rendre hommage aux fétiches et rencontrer le marabout. Pour s'assurer les bonnes augures, ils sacrifient un vautour qui n'en demandait pas tant. Le marabout lit dans les étoiles et leur dit que le voyage sera très difficile, qu'ils devront se séparer dès le premier croisement passé dans le Gold Coast.

Le voyage dure un mois et cinq jours disent les amis. La bande sonore composée des commentaires des trois amis est d'un humour et d'une ironie particulièrement plaisants où ils se chamaillent, s'envoient de gentilles vannes, commentent ce que le spectateur voit comme un retour sur leur parcours à pieds à travers la brousse et le désert. C'est un voyage vers l'eldorado et leur ton est plein d'espoir mais d'une analyse profonde.

Ainsi lorsqu'ils se retrouvent à la frontière, le fanfaron Damouré va voir les douaniers qui refusent qu'ils rentrent au Ghana. Dans son commentaire, il traitent les douaniers de couillons et on voit les trois amis contourner le poste de police pour se rendre dans le Gold Coast par la plage. Auparavant, sur le même ton mais dans une visée ethnographique de Jean Rouch, ils ont croisé une tribu qui vit entièrement nue.

Comme promis, ils se séparent au premier croisement de route. Chacun va suivre son destin et chercher à trouver du travail. Sans papiers, dans un pays qui parle et écrit anglais et sous domination britannique, ils font des petits boulots. Travailler dans une mine d'or, sans doute la séquence la plus critique du colonialisme « ils nous volent notre or les anglais pour le mettre dans une banque, ça se mange pas l'or ».

Dans le bidonville d'Accra, avec Douma, un quatrième larron, ils créent une boutique « Petit à petit l'oiseau fait son bonnet ». Ils se font un peu d'argent pour rentrer au pays pour la saison des pluies. Pendant ce temps, ils se promènent en ville, ils observent les élections et Damouré photographient les candidats. Le retour se fait en camion, un voyage difficile, avec plein d'autres expatriés, sous les orages, rackettés à la frontière de Haute Volta. Mais ils reviennent en héros modernes.



















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