Les
sirènes existent, c'est vrai puisque Stephen Chow le dit dans son
dernier film tout simplement titré Mermaid.
Non pas une seule sirène mais toute une population, hommes, femmes,
enfants, de tous les âges. Ils habitent, en secret depuis des
siècles, dans une petite île au large des côtes chinoises. C'est
justement à cet endroit que le millionnaire Liu Xua (Deng Chao) a
décidé de construire un parc de loisirs et pour cela, il a acheté
cette île des milliards de dollars.
La
zone est protégée, pas de soucis pour le millionnaire qui se moque
de la nature. Il fait installer des sonars dans la mer pour éloigner
les dauphins et autres animaux marins. Stephen Chow lance son film
avec des images de destruction de la planète, pollution,
déforestation sur la musique de Fist
of fury, histoire de placer
Mermaid
sous le signe de la fable écologique et de la métaphore du western,
les millionnaires qui s'unissent, tels des cow-boys (parmi ces gens
Tsui Hark, qui vient faire un coucou) et les sirènes seront les
Indiens.
Pour
l'instant, c'est le temps de la comédie comme Stephen Chow sait en
concocter. Il commence par la visite d'un musée d'histoire
naturelle. Les visiteurs sont médusés devant la pauvreté et la
fausseté des pièces présentées. Une grosse lampe est placée
devant un dinosaure en jouet et l'ombre est censée représenter le
T-Rex. Le patron du musée est un hilarant tocard obligé de se
déguiser lui-même en sirène dans sa baignoire quand les visiteurs
protestent devant le hareng saur sur le corps d'une poupée, c'était
sa sirène initiale.
Cela
permet de prolonger avec la peuplade des sirènes cantonnée dans un
paquebot échoué et emménagé par leurs soins, un lieu de vie fait
de bric et de broc. Loin d'être des canons de beauté (comme la
légende l'aurait laissé imaginer), les sirènes sont à l'image du
groupe des visiteurs, mais aussi de tous les déclassés des films
précédents de Stephen Chow, les pauvres hères de la porcherie de
Crazy kung-fu,
les footballeurs ratés de Shaolin
soccer. Une société de gens
certes unis mais tellement incompétents et maladroits.
Trois
personnages se distinguent parmi ces bras cassés. La grand-mère
(Zhang Mei-e), ancêtre des sirènes qui avait épousé jadis un
Mandarin, un îlot de sagesse au milieu de tous ces crétins. Pieuvre
(Show Lo), jeune blond à dreadlocks qui lui n'est pas une sirène
mais une pieuvre mâle et qui dirige la troupe pour assassiner Liu
Xua. Pour cela, il envoie Shan (Jelly Lin) sur la terre ferme pour le
séduire. Bien évidemment, puisqu'on est d'abord et avant tout dans
une comédie, Shan est une grande timide qui va bien avoir du mal à
séduire cet arrogant qu'est Liu Xua.
Je
vous passe comment Shan réussit à marcher, comment elle parvient à
contacter Liu Xua et pourquoi ce dernier entonne une chanson de Bruce
Lee. La naïveté et la candeur de Shan sont ses atouts et à
l'opposé total de Ruo-lan (Zhang Yu Qi), la partenaire dans le crime
du millionnaire. D'abord adversaire, Ruo-lan s'est ensuite alliée
avec Liu Xua et compte bien exterminer les sirènes (avec un savant
anti-écolo américain, ces blancs sont de vrais diables). La part
sombre de Stephen Chow est là, dans ce massacre des sirènes aux
armes automatiques d'une violence inouïe.
La
part claire de Stephen Chow, les gags les plus drôles, est d'abord
dans les tentatives de tuer le millionnaire qui se soldent toutes par
des échecs cuisants. Pieuvre se déguise en cuisinier de teppanyaki,
coupe et cuit ses propres tentacules. Plus tard, Liu Xua va à la
police déclarer l'existence des sirènes, les flics hilares
dessinent des portraits robots les plus invraisemblables possibles au
grand désarroi du millionnaire qui ne comprend pas qu'on puisse
douter de sa parole. Alors que nous, on sait bien que les sirènes
existent puisque Stephen Chow les a filmées.
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