jeudi 18 mai 2017

Les Fantômes d'Ismaël (Arnaud Desplechin, 2017)

Ma déception devant Les Fantômes d'Ismaël est relative, je suis persuadé qu'Arnaud Desplechin enchaîne un très bon film, Un conte de Noël, Trois souvenirs de ma jeunesse, avec des films passables Jimmy P. et ces Fantômes d'Ismaël. Des trois récits, celui qui prend le plus de place est la confrontation entre Sylvia (Charlotte Gainsbourg) et Carlotta (Marion Cotillard), logiquement ce sont ces deux actrices qui trônent sur l'affiche.

Au détour d'un plan en demi-bonnette (visage de profil de Sylvia à gauche, celui de Carlotta de face à droite), on se prend à imaginer qu'Arnaud Desplechin fait son petit Persona, en tant que fan inconditionnel d'Ingmar Bergman. Cette affrontement a lieu d'ailleurs au bord de la mer, où les personnages ne rencontrent jamais personne, ils se contentent de passer quelques jours dans une grande maison de pierres.

Carlotta, c'est le fantôme vivant d'Ismaël (Mathieu Amalric), son passé à jamais enfoui ne survit que par la présence angoissée du père de Carlotta (Laszlo Szabo) et un portrait d'elle quand elle avait 17 ans. Plutôt que préserver le mystère de son retour après une disparition de 20 ans, Arnaud Desplechin lui fait raconter qu'elle est revenue parce que son mari indien est décédé. Elle veut reprendre sa place.

Seulement voilà, Sylvia est là et ne compte pas, elle, disparaître. Avec une ouverture à l'iris, le film amorce le deuxième récit, celui deux ans auparavant, de la rencontre entre Sylvia et Ismaël, un récit peuplé des propos alcoolisés d'Ismaël et de la personnalité complexe de Sylvia, il est veuf, elle ne sort qu'avec des hommes mariés. Ce récit est « desplechinissime » et très court, composé de longues discussions en marchant et de scènes de lit.

Le jeu de Mathieu Amalric est régulièrement pénible, même s'il incarne un personnage en attente de deuil, un alcoolo, un cinéaste tyrannique, il n'y va pas avec le dos de la cuiller. Sa plus grosse crise, il la joue avec Hippolyte Girardot, le producteur exécutif, lui aussi en plein cabotinage, dans la maison en bord de mer, devant des projections de toiles de Pollock. Ça hurle très fort, ça remue dans tous les sens, ça brandit un revolver. Ça m'épuise surtout.

Je garde le meilleur pour la fin, ce troisième récit est l'écriture du scénario du film d'espionnage d'Ismaël, avec quelques bons seconds rôles. Louis Garrel est le bien nommé Dédalus, l'agent secret qui s'amuse à faire l'espion au Tadjikistan, Jacques Nolot en éminence grise, Bruno Todeschini aussi inquiétant que dans La Sentinelle. Le film se lance sur ce récit d'espionnage, mystérieux, hélas trop succinct et laissé en suspens. Pourvu que Desplechin s'y consacre entièrement pour son prochain film.

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