Ma
déception devant Les Fantômes d'Ismaël est relative, je
suis persuadé qu'Arnaud Desplechin enchaîne un très bon film, Un
conte de Noël, Trois souvenirs de ma jeunesse, avec des
films passables Jimmy P. et ces Fantômes d'Ismaël.
Des trois récits, celui qui prend le plus de place est la
confrontation entre Sylvia (Charlotte Gainsbourg) et Carlotta (Marion
Cotillard), logiquement ce sont ces deux actrices qui trônent sur
l'affiche.
Au
détour d'un plan en demi-bonnette (visage de profil de Sylvia à
gauche, celui de Carlotta de face à droite), on se prend à imaginer
qu'Arnaud Desplechin fait son petit Persona, en tant que fan
inconditionnel d'Ingmar Bergman. Cette affrontement a lieu d'ailleurs
au bord de la mer, où les personnages ne rencontrent jamais
personne, ils se contentent de passer quelques jours dans une grande
maison de pierres.
Carlotta,
c'est le fantôme vivant d'Ismaël (Mathieu Amalric), son passé à
jamais enfoui ne survit que par la présence angoissée du père de
Carlotta (Laszlo Szabo) et un portrait d'elle quand elle avait 17
ans. Plutôt que préserver le mystère de son retour après une
disparition de 20 ans, Arnaud Desplechin lui fait raconter qu'elle
est revenue parce que son mari indien est décédé. Elle veut
reprendre sa place.
Seulement
voilà, Sylvia est là et ne compte pas, elle, disparaître. Avec une
ouverture à l'iris, le film amorce le deuxième récit, celui deux
ans auparavant, de la rencontre entre Sylvia et Ismaël, un récit
peuplé des propos alcoolisés d'Ismaël et de la personnalité
complexe de Sylvia, il est veuf, elle ne sort qu'avec des hommes
mariés. Ce récit est « desplechinissime » et très
court, composé de longues discussions en marchant et de scènes de
lit.
Le
jeu de Mathieu Amalric est régulièrement pénible, même s'il
incarne un personnage en attente de deuil, un alcoolo, un cinéaste
tyrannique, il n'y va pas avec le dos de la cuiller. Sa plus grosse
crise, il la joue avec Hippolyte Girardot, le producteur exécutif,
lui aussi en plein cabotinage, dans la maison en bord de mer, devant
des projections de toiles de Pollock. Ça hurle très fort, ça remue
dans tous les sens, ça brandit un revolver. Ça m'épuise surtout.
Je
garde le meilleur pour la fin, ce troisième récit est l'écriture
du scénario du film d'espionnage d'Ismaël, avec quelques bons
seconds rôles. Louis Garrel est le bien nommé Dédalus, l'agent
secret qui s'amuse à faire l'espion au Tadjikistan, Jacques Nolot en
éminence grise, Bruno Todeschini aussi inquiétant que dans La
Sentinelle. Le film se lance sur ce récit d'espionnage,
mystérieux, hélas trop succinct et laissé en suspens. Pourvu que
Desplechin s'y consacre entièrement pour son prochain film.
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