Puisque
à peu près personne (je parle des textes des quotidiens et des
journaux en ligne et en kiosque) ne l'a écrit, il faut le rappeler,
Michel Galabru n'a pas seulement tourné dans Le Gendarme de
Saint-Tropez, dans Le Juge et l'assassin ou dans Subway,
il était aussi dans Soigne ta droite l'un des films les plus
étranges de Jean-Luc Godard. Assez peu vu, rarement cité par les
exégètes, ce film de 1986 réunit à son casting toute une kyrielle
de vedettes comiques de l'époque, soit Michel Galabru dans le rôle
de l'Amiral un pilote d'avion qui emmène Jean-Luc Godard, Eva
Darlan, Philippe Khorsand à Hollywood pour y emmener des bobines de
films à la Banque incarnée par Dominique Lavanant. On trouve aussi
éparpillés dans les méandres du film, Jacques Villeret, Jane
Birkin, Rufus, Pauline Lafont et François Périer.
Soigne
ta droite fait partie de ces films de Godard avec une chouette
distribution de stars, comme il en faisait dans les années 1980 :
Sauve qui peut (la vie), Jacques Dutronc / Isabelle Huppert /
Baye, Passion, Isabelle Huppert / Michel Piccoli / Hanna
Schygulla, Détective, Nathalie Baye / Johnny Hallyday /
Claude Brasseur. Cette fois, Jean-Luc Godard se presse encore moins
d'élaborer un scénario et compose un film à sketches à tendance
burlesque avec comme thème commun, le cinéma, sa fabrication et son
commerce. On y croise un scénariste (Villeret) qui cherche à vendre
son histoire à un producteur (Périer) qui ne veut jamais des thèmes
proposés. Un cinéaste (Godard) qui porte ses bobines 35mm (« ce
qui est le plus lourd quand on fait un film, c'est de porter les
bobines »), la Banque (Lavanant) qui veut acheter ce film
intitulé « Une place sur la terre ».
Godard
fagoté comme Jacques Tati dans Playtime (le titre du film
rappelle Soigne ton gauche un court-métrage de Tati et Godard mime
une scène de boxe en ouverture de film) se jette dans une voiture,
tombe par terre avec ses bobines, se fait rabrouer à l'aéroport.
Mais son personnage surnommé Le Prince garde toujours un sourire
benêt, reste constamment poli et il est d'accord avec tout le monde.
François Périer, dans une voix off quasi constante, et Michel
Galabru déclament des textes d'auteurs. La musique est celle des
Rita Mitsouko qui sont en train d'écrire et d'enregistrer leur album
The No Comprendo. Godard abandonne sa passion pour le classique et
pose des extraits des chansons du groupe, extraits en construction,
inaboutis sur lesquels Chichin et Ringer se chamaillent gentiment. La
fragmentation, visuelle, sonore et scénaristique n'est pas encore
celle que Godard explorera à partir de Nouvelle vague et
jusqu'à maintenant, mais elle est très amusante.
Captures
d'écran effectuées à partir du DVD édité par Gaumont en 2010.
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