Prendre
un serial killer, le mettre au milieu d'une bande de surfers, et voir
ce qui arrive. C'est en gros le projet de Psycho
beach party, unique film (ou
presque) de Robert Lee King qui reprend les codes des films des
années 1960, et en tout premier lieu la mentalité de cette Amérique
WASP et fière de ces valeurs. C'est ainsi qu'a été élevé
Florence (Lauren Ambrose), jeune femme qui vit encore chez sa mère,
Ruth Forrest (Beth Broderick), une femme élégante et moderne qui
conduit sa Dodge. Florence n'a qu'une amie, Berdine (Dani Wheeler),
un gamine à lunettes aussi coincée qu'elle. Sa mère héberge un
étudiant suédois, Lars (Matt Keeslar) d'une grande politesse.
C'est
une Amérique, et plus précisément une Californie, de la
frustration sexuelle qui passe d'abord par les jeux de mots des
dialogues, parler d'une saucisse fait penser à un pénis, puis par
le mime, manger une glace évoque un acte sexuel. C'est tout un
langage et son phrasé (qui passe mal dans les sous-titres) et un jeu
de l'époque qui sont reproduits, notamment par Lars qui ignore le
double-sens de ce qu'il dit mais il le dit à moitié nu les bras
ballants. Mais Florence et Berdine ne parlent pas ce langage, on ne
leur a pas appris. Innocemment, les deux amies sont tout simplement
au drive in pour voir un film d'horreur fauché au titre
invraisemblable. Sur l'écran, une femme à trois têtes puis une
géante détruit la ville, dans le drive in, un meurtre est commis.
Une
jeune femme est égorgée. Elle avait un bec de lièvre. Les meurtres
continuent, c'est un surfeur qui souffrait de psoriasis. Puis un
autre qui n'avait qu'un testicule. Ensuite, une jeune femme
handicapée. La police met ses plus fins limiers sur l’enquête. Le
capitaine de la police de Malibu est une femme, Monica Stark (Charles
Busch, auteur de la pièce à l'origine du film), elle est assistée
d'un policier nommé Cookie (Jenica Bergere). Le film entre dès lors
de plein pied dans le mélange des genres, dans le sens de gender,
comme on dit aux USA. Que l'inspectrice soit jouée par un homme
n'est pas en soi un élément comique, car aucun personnage ne doute
que l'inspectrice soit une femme, c'est un moyen pour pousser les
limites de la différence (« Je ne suis pas différent »,
dira Yoyo).
Monica
Stark soupçonne la bande de surfers que mène Kanaka (Thomas Gibson)
d'être responsables du premier meurtre. Seulement voilà, deux
autres surfers sont aussi assassinés. Cette bande est composée de
Starcat (Nicholas Brandon) un étudiant en psychologie, Yoyo (Nick
Cornish) et Provoloney (Andrew Levitas). Ces deux derniers passent
leur temps à jouer sur la plage, à se chamailler, des chamailleries
qui se transforment assez rapidement en caresses lascives et en jeux
sensuels, sans que là aussi les personnages ne comprennent
l'homo-érotisme qui les lie. Tous acceptent Florence dans leur bande
et elle sera surnommée Chicklet (la poulette).
A
l'exception de Yoyo et Provoloney, trop occupés à enlever leur
chemise pour se badigeonner de crème, Chicklet devient le centre
d'intérêt de Kanaka et de Starcat, et sans doute de Lars. Starcat
est censé sortir avec Marvel Ann (Amy Adams), la jolie fille du
coin. Mais il passe plus de temps avec Chicklet. Quand elle se rend
dans la cabane du Kanaka, elle se transforme à la vue de cercles et
devient Ann Bowman, une femme autoritaire et nymphomane, au grand
plaisir de Kanaka, qui se soumet comme un gentil toutou. Il en
profite pour l'inviter à la fête des surfers, espérant que ce sera
Ann Bowman qui viendra et non Florence / Chicklet.
Les
diverses personnalités de Florence sont l'un des hommages à ce
cinéma américain des années 1950-1960, où la psychologie des
personnages étaient le moteur de l'action. Il est amusant d'entendre
Starcat sortir ses théories et de le voir psychanalyser Florence
dans cette tenue (torse nu et en bermuda) et dans ce cadre (un surf à
la main au bord d'une plage). Le cadre ne colle pas avec ses
répliques et crée, logiquement, des effets comiques irrésistibles.
C'est aussi l'abondance des références psychologiques (expliquer
les déviances par les trauma de l'enfance) qui les portent vers
l'ironie. Starcat aidera aussi Provoloney à soulager sa constipation
grâce à la psychanalyse.
A
une époque, le site nanarland avait chroniqué Psycho
beach party, l'auteur n'était
pas dupe que le cinéaste portait volontairement son film vers la
série Z. Le film est un hommage fébrile à ces films de drive in
avec l'arrivée dans le récit de l'actrice qui joue dans le film
fauché vu en ouverture. Bettina Barnes (Kimberley Davies) vient se
réfugier à Malibu. Bettina représente tout ce cinéma
d'exploitation, ces films d'une heure de cette époque aujourd'hui
revisités et parfois surestimés avec cette envie du spectateur de
voir du kitsch pour s'amuser. Ces films, comme on dit, frôlent le
bon goût sans jamais tomber dedans. Psycho
beach party a été l'un des
films pionniers de ce mouvement cinéphile.
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