On
connaît tous, au moins dans ses grandes lignes, cette aventure menée
en pleine présidence Sarkozy par un groupe de soi-disant humanitaires
partis en Afrique aller chercher des enfants pour des familles
d'accueil françaises. Vincent Lindon incarne Jacques, le chef de ce
groupe. Il est en mission avec une demi-douzaine de personnes qu'il
dirige avec énergie, assignant chacun à un poste. Toi tu monteras
les tentes, toi tu installes le dortoir, toi tu déballes les
valises. Tout le monde est enthousiaste, car la mission est vitale
pour ces orphelins dans un pays en proie à une guerre civile.
Pourtant
dès la séquence d'ouverture le plan que Jacques croyait bien huilé
voit son premier déraillement. Entre l'aéroport et la maison qui va
servir au groupe de quartier général, les 4X4 sont attaqués par
des miliciens. Les Chevaliers blancs ne va jamais cesser de
montrer toutes les embûches qui se mettent au travers de la mission
de Jacques et ses comparses. Les réactions à ces obstacles sont
diverses au sein du groupe, certains sont toujours partant pour
atteindre leur but, d'autres perdent rapidement l'espoir que cela
fonctionne convenablement.
Premier
pépin, l'avion qu'a loué Xavier (Reda Kateb) est en panne.
Impossible de traverser le pays pour rejoindre un village contacté
par Xavier, présent sur place avant l'arrivée de Jacques, pour
recueillir des orphelins. Jacques fait pression pour emprunter
l'avion de secours (engueulade par le chef des pompiers à leur
retour) et, parce que la pièce du moteur n'est pas encore arrivée,
pour partir en Jeep à travers le désert et se faire canarder par
les rebelles. Là, Jacques, toujours inconséquent, se fera engueuler
par un militaire de l'ONU.
Pas
d'enfants, donc pas de travail pour les bénévoles. Une infirmière
désœuvrée en profite pour troquer sa blouse pour un boubou mieux
adapté au climat local. Celui lui vaudra le courroux de Laura
(Louise Bourgouin), la compagne de Jacques. Le couple est toujours
prompt à faire la morale aux membres de l'équipe, à leur faire un
chantage où, chacun l'un après l'autre, va voir la personne qui
commence à douter en lui affirmant qu'elle ne pense qu'à elle et
pas aux enfants. Joachim Lafosse filme ces conversations comme autant
de lavage de cerveaux.
Voyant
les risques pris pour se déplacer, puis quand les premiers enfants
arrivent au camp, que certains ne sont pas orphelins, une violente
dispute se déclenche lors d'un déjeuner. Les premiers à partir
sont deux infirmières et le médecin (Yannick Renier), malgré les
chantages de Jacques et Laura. Les clans se forment, et au milieu
deux femmes. Bintou (Bintou Rimtobaye) sert d'interprète et
Françoise (Valérie Donzelli) fait un reportage sur l'épopée. Même
si on connaît l'issue du film tout comme les vraies ambitions de
Jacques, ce sont Bintou et Françoise qui révèlent au spectateur ce
qui se passe vraiment.
Joachim
Lafosse a le tact pour ne pas créer un suspense racoleur, et, plus
grand exploit, de ne pas enfoncer ses personnages dans une vision
unidimensionnelle. Vincent Lindon en gourou narcissique dépassé par
les événements mais incapable de se remettre en question est comme
Jonathan Zaccaï dans Elève libre (le meilleur film de
Joachim Lafosse) ou Niels Arestrup dans A perdre la raison.
Oui, c'est cela, ces humanitaires ont perdu la raison et le film
montre, non sans un humour glaçant, les fondations de cette prison
mentale.
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