vendredi 27 novembre 2015

Vingt et une nuits avec Pattie (Arnaud & Jean-Marie Larrieu, 2015)

Pour avoir une petite idée de ce à quoi ressemble Vingt et une nuits avec Pattie, il faudrait imaginer que des personnages échappés d'un Bertrand Blier auraient été filmés par Jean-Marie Straub. Versant Blier, la saine et communicative vulgarité de Pattie (Karin Viard, épatante), totalement assumée quand elle raconte ses frasques sexuelles à Caroline (Isabelle Carré), petite sainte-nitouche débarquée dans la maison de sa mère défunte. Karin Viard faisait déjà preuve dans Lolo de Julie Delpy d'un bel abattage, mais ne faisait que fantasmer sur les hommes. Dans Vingt et une nuits avec Pattie, son personnage raconte sa vie. Versant Straub, c'est donc cette manière de raconter ces histoires tandis que les deux femmes se promènent dans les clairières et que les récits de Pattie prennent la forme de flash-backs par le seul pouvoir des dialogues. Le film est dans un format carré (1:37), sauf dans son dernier quart d'heure, cadre intangible des Straub-films quelles que soient les années.

Mais ce format étonne puisqu'il coupe tous ces beaux paysages de l'Aude où le tournage a eu lieu. Le coin est charmant mais isolé (pas de réseau) et les occupants de la maison de la mère de Caroline amènent une gaieté incongrue. Les frères Larrieu ne parleront de deuil, thème tant à la mode dans le cinéma français. De toute façon, Caroline ne connaissait pas vraiment sa mère, baroudeuse qui accumulait les liaisons. Justement, un certain Jean (André Dussolier) débarque à l'improviste pour rendre ses derniers hommages. Caroline se met à imaginer qu'il pourrait JMG Le Clézio, dont tous les livres ornent la bibliothèque de la maison. Et si elle était la fille de cet homme et de sa mère ? Jean n'aura pas le loisir de voir le corps de la défunte, puisqu'il a disparu. Le Capitaine de gendarmerie viendra faire une enquête. Il est persuadé que le corps a été enlevé par un nécrophile. Là encore, les Larrieu plutôt que d'exploiter l'aspect scabreux de la chose, la transforme en un motif comique.

Malgré son titre, le film ne dure vingt et une nuits. L'aventure se concentre sur quelques jours autour du 15 août où trois bals seront donnés dans trois hameaux différents. Caroline décide de vivre au rythme de Pattie, de ses amis (trois ouvriers venus faire des travaux dans la maison), un loufoque libidineux (Denis Lavant), un ancien amant de Pattie qui ne se déplace jamais sans son vin et Kamil le fils 20 ans de Pattie toujours accompagné de ses amis. On vit tous ensemble, on mange sur la terrasse, on se baigne volontiers dans la piscine ou sous une cascade, on boit beaucoup de vin, on regarde les corps dénudés. Caroline écoute les histoires de cul de Pattie et se met à s'enivrer, dans tous les sens du terme de cette situation. Elle se met à fantasmer tout autant sur le personnage de Denis Lavant que sur le jeune Kamil, qui, l'été aidant, se promène toujours torse nu. Les Larrieu, après raté leur film précédent pour avoir trop filmé la neige suisse, ont bien fait de revenir au soleil de leur terre natale.

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