Pour
avoir une petite idée de ce à quoi ressemble Vingt et une nuits
avec Pattie, il faudrait imaginer que des personnages échappés
d'un Bertrand Blier auraient été filmés par Jean-Marie Straub.
Versant Blier, la saine et communicative vulgarité de Pattie (Karin
Viard, épatante), totalement assumée quand elle raconte ses
frasques sexuelles à Caroline (Isabelle Carré), petite
sainte-nitouche débarquée dans la maison de sa mère défunte.
Karin Viard faisait déjà preuve dans Lolo de Julie Delpy
d'un bel abattage, mais ne faisait que fantasmer sur les hommes. Dans
Vingt et une nuits avec Pattie, son personnage raconte sa vie.
Versant Straub, c'est donc cette manière de raconter ces histoires
tandis que les deux femmes se promènent dans les clairières et que
les récits de Pattie prennent la forme de flash-backs par le seul
pouvoir des dialogues. Le film est dans un format carré (1:37), sauf
dans son dernier quart d'heure, cadre intangible des Straub-films
quelles que soient les années.
Mais
ce format étonne puisqu'il coupe tous ces beaux paysages de l'Aude
où le tournage a eu lieu. Le coin est charmant mais isolé (pas de
réseau) et les occupants de la maison de la mère de Caroline
amènent une gaieté incongrue. Les frères Larrieu ne parleront de
deuil, thème tant à la mode dans le cinéma français. De toute
façon, Caroline ne connaissait pas vraiment sa mère, baroudeuse qui
accumulait les liaisons. Justement, un certain Jean (André
Dussolier) débarque à l'improviste pour rendre ses derniers
hommages. Caroline se met à imaginer qu'il pourrait JMG Le Clézio,
dont tous les livres ornent la bibliothèque de la maison. Et si elle
était la fille de cet homme et de sa mère ? Jean n'aura pas le
loisir de voir le corps de la défunte, puisqu'il a disparu. Le
Capitaine de gendarmerie viendra faire une enquête. Il est persuadé
que le corps a été enlevé par un nécrophile. Là encore, les
Larrieu plutôt que d'exploiter l'aspect scabreux de la chose, la
transforme en un motif comique.
Malgré
son titre, le film ne dure vingt et une nuits. L'aventure se
concentre sur quelques jours autour du 15 août où trois bals seront
donnés dans trois hameaux différents. Caroline décide de vivre au
rythme de Pattie, de ses amis (trois ouvriers venus faire des travaux
dans la maison), un loufoque libidineux (Denis Lavant), un ancien
amant de Pattie qui ne se déplace jamais sans son vin et Kamil le
fils 20 ans de Pattie toujours accompagné de ses amis. On vit tous
ensemble, on mange sur la terrasse, on se baigne volontiers dans la
piscine ou sous une cascade, on boit beaucoup de vin, on regarde les
corps dénudés. Caroline écoute les histoires de cul de Pattie et
se met à s'enivrer, dans tous les sens du terme de cette situation.
Elle se met à fantasmer tout autant sur le personnage de Denis
Lavant que sur le jeune Kamil, qui, l'été aidant, se promène
toujours torse nu. Les Larrieu, après raté leur film précédent
pour avoir trop filmé la neige suisse, ont bien fait de revenir au
soleil de leur terre natale.
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