Un
roi à New York a été jugé
mou, sans humour, revanchard et vieillot à l’époque de sa sortie
en 1957. Tourné après Le
Dictateur,
après Monsieur Verdoux et
Les Feux de la rampe,
Un roi à New York est
le premier film de Chaplin en exil, puisqu’il s’est enfui des
Etats-Unis pour ne pas avoir à s’exprimer devant la Commission Mc
Carthy des activités anti-américaines. Accusé d’être
communiste, ce qu’il ne fut pas bien qu’il est des sympathies
pour les indigents, sympathies tout à fait légitimes compte tenu de
son personnage de Charlot, incarnation du prolétariat et du défi au
monde aliénant du travail.
Ce
roi chassé de son pays d’Europe de l’est par des
révolutionnaires, c’est le Roi Shadowe (Charles Chaplin), nom qui
évoque le fait qu’il est déchu, qu’il n’est plus que l’ombre
de lui-même. Mais, c’est une manière pour Charles Chaplin de dire
définitivement adieu au personnage de clown burlesque, car il reste
quelques gags dans le film, celui dans la cage d’ascenseur où se
prend le doigt dans la lance incendie, celui au restaurant où le
percussionniste le frappe sur le crâne, ils se font toujours au
dépends du personnage du roi.
Charles
Chaplin lui cherche à stigmatiser les hypocrites de la télévision
qui utilise le roi comme appât dans un repas où les convives
donnent dans leurs conversations des marques de publicité. Pour le
cinéaste des Temps modernes,
l’époque innocente du divertissement est définitivement terminée.
Il n’y a de place que pour l’abrutissement général des masses.
De la même manière, lorsqu'il se rend au cinéma, les bandes
annonces vues avant le film sont toutes stupides (et en cinémascope)
montrant que de la cinéma de l'époque est strictement industriel.
Mais
le film ne serait pas grand-chose sans le personnage du petit Ruppert
(Michael Chaplin, le fils du cinéaste). Le roi Shadowe est convié à
visiter une école américaine. Il entre en grande conversation avec
un enfant qui lui débite des slogans, qui pour n’importe quel
spectateur un tant soit peu averti, correspondent à des formules de
l’idéologie communiste. Bien que particulièrement fustigé et
humilié, le roi va se prendre de sympathie pour ce garçon, qui se
réfugie chez lui après l’arrestation de ses parents accusés
d’intelligence avec l’ennemi.
On
sent chez le petit Ruppert toute la misère du monde s’abattre sur
lui, tout le poids de l’injustice qui pèse sur un enfant qui n’a
pas eu le temps de grandir. Le reproche que fait Charles Chaplin à
l’Amérique qui l’a accueilli, c’est non seulement celui de
pratiquer une chasse aux sorcières aveugle et incohérente, mais
surtout celui qu’une démocratie puisse priver des citoyens de leur
liberté au nom de la liberté. Ce qui est encore plus émouvant pour
nous, spectateurs, dans Un roi
à New York, c’est de savoir
que Ruppert est interprété par son fils, et de penser que ce jeune
enfant aurait pu se retrouver dans cette même situation.
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