Tourné
en 1957, Charlotte et Véronique est plus connu avec son
deuxième titre Tous les garçons s'appellent Patrick.
Jean-Luc Godard, dans son court générique introductif écrit de sa
main inimitable, annonce que le scénario est d'Eric Rohmer (le
cinéaste a tourné en 1951 Charlotte et son steak et fera
Véronique et son cancre en 1958). Jusqu'à quel point le
script de Rohmer a-t-il utilisé par Godard ? Ni la légende ni
l'Histoire ne le disent vraiment, mais la mise en scène est déjà
bien speed, c'est la vitesse qui fait la différence entre les deux
cinéastes. De toute façon, Jean-Claude Brialy a toujours raconté
que Godard avait improvisé les répliques qu'il donnait aux deux
filles. Seul le squelette scénaristique subsiste : deux filles
se font draguer par le même garçon.
Charlotte
(Anne Colette), cheveux courts et Véronique (Nicole Berger), cheveux
longs, vivent ensemble dans un petit appartement. Un seul lit double
et sur la tapisserie un poster d'une exposition de Picasso. Une salle
de bains où une immense affiche de La Fureur de vivre avec un
James Dean qui fait presque la taille des actrices. Véronique doit
partir, Charlotte lui donne rendez-vous plus tard au jardin du
Luxembourg. Elle lisait sur son lit Hegel, elle lira dans le parc un
polar (déjà la passion des livres de Jean-Luc Godard utilisés
comme citations). Au Luxembourg, Charlotte se fait draguer par
Patrick (Jean-Claude Brialy), ils prennent un verre dans un café et
à peine partie, il croise Véronique qu'il drague aussi et ils
prennent un verre dans un café. Les deux amies se retrouveront plus
tard et parleront de leur après-midi.
Dans
les deux cas, son baratin triomphe. Il parvient à les inviter au
cinéma, l'une le samedi, l'autre le dimanche. Les dialogues se font
sur le mode du match de tennis. Les répliques de Patrick sont des
smashs et celles des filles sont de fond de court. Il leur sort à
peu près la même chose, notamment une réflexion sur Henri IV qui
aurait été le premier roi à avoir fait planter des arbres dans
Paris. L'une prend un lait grenadine « c'est snob » lui
dit-il, l'autre boit un Coca « c'est tellement démodé ».
Il porte des lunettes de soleil avec Charlotte puis c'est Véronique
qui en aura. Une fois rentrées chez elles, les filles se lanceront
les phrases banales que Patrick leur a proférées. Là réside la
grande part de l'humour du film, tout comme dans cet homme au café
qui lit Arts (l'hebdo dans lequel écrivaient Godard et Truffaut) ou
Véronique qui pose un exemplaire des Cahiers du cinéma sur la
table.
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