mardi 20 juin 2017

Hudson Hawk (Michael Lehmann, 1991)

En 1991, Joel Silver était le Roi du monde, le champion du cinéma d'action à Hollywood. C'est lui qui a fait passer Bruce Willis de l'acteur comique qu'il était (la série Clair de lune, Boire et déboires de Blake Edwards) à un héros viril et martial dans Piège de cristal, l'égal de Mel Gibson, Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger, leaders du box-office dans les années 1980. L'idée de Bruce Willis est de s'offrir un joyau de comédie d'action, il écrit le script, il coproduit Hudson Hawk, et là, c'est le drame, c'est un flop, on annonce la fin conjointe de Bruce Willis et de Joel Silver. D'autant que le duo va également se ramasser avec Le Dernier samaritain de Tony Scott. Depuis, ces deux films ont été réévalués et adorés et Silver comme Bruce sont remontés au sommet.

Alors Hudson Hawk, qu'est-ce que c'est ? L'histoire d'Eddie (Bruce Willis), quatre anneaux à l'oreille gauche, t-shirt noir, chapeau sur la tête. Un gars du New Jersey qui vient de passer dix ans an prison, « disons, que je n'ai pas vu la sortie de ET » explique Eddie à Anna (Andie MacDowell). A sa sortie de Sing Sing, son vieux complice Tommy Five-Tone (Danny Aiello) vient le chercher en décapotable. De retour à New York tout a changé, son vieux bar préféré est devenu le lieu de rendez-vous des golden boys mais rien n'a changé, Eddie se voit proposer par les frères Mario, deux malfrats en complet veston, Anthony (Carmine Zozorra) les bras et Cesar (Frank Stallone) le cerveau, de voler une sculpture de Léonard de Vinci mise aux enchères le soir-même.

Jusqu'à la rencontre avec les frères Mario, il se dessinait un gentil polar comme les autres. Tout part en vrille dès le premier coup de feu qui atteint la tasse de cappuccino que Eddie attendait depuis 10 ans. Ce dernier sursaute, logiquement, mais il est le seul, personne ne réagit dans le bar. Non pas qu'ils ne soient pas étonnés que Anthony Mario ait tiré un coup de feu, mais parce que le film tend doucement mais sûrement vers autre chose, ce que confirme les personnalités des deux frangins, l'un totalement stupide l'autre plus malin mais pas tant que ça. Michael Lehmann, le réalisateur attitré de Hudson Hawk, pousse son film vers un burlesque extrêmement proche du cartoon, à l'opposé de la tentative de Warren Beatty, Dick Tracy sorti peu avant.

Le plus fort dans Hudson Hawk est que ça marche et ce jusqu'à la toute fin du film quand Tommy sort rescapé d'une explosion. Mais avant cette fin, tout est mis en œuvre pour échapper au carcan du classique schéma du film de voleur-policier. Le casse de la galerie où se trouve la sculpture de Léonard de Vinci est le morceau de bravoure. Cambriolant à l'ancienne, Eddie et Tommy décident de compter le temps entre leur entrée dans l'immeuble et le moment où les gardiens pourraient les repérer en chantant un classique de Bing Crosby « Swinging on a star ». Cela donne des relents, fort agréables, de comédie musicale au film là où on s'attend à un banal suspense. Les deux hommes réitèrent la méthode lors de l'assaut en Italie en chantant « Side by side ».

L'idée du film est de supprimer toutes les ellipses et par là-même de se débarrasser des liaisons entre les scènes. Cela atteint son paroxysme entre l'explosion de la galerie et la scène de course poursuite de l'ambulance sur un pont de New York, Bruce Willis se retrouve sur un brancard, tente de le piloter, discute avec deux jolies blondes dans une voiture, doit payer le péage à l'autoroute. Eddie vit comme un personnage de dessin animé (mettons, ceux des Looney Tunes) débarquant ici ou là par magie (celle du cinéma bien entendu), annihilant tout sens de vrai ou faux raccord dans le montage, toute cohérence scénaristique sans que cela ne pose de problème ni aux personnages ni au spectateur.

Le bonheur de Hudson Hawk ce sont ses personnages tous plus étranges les uns que les autres. D'abord Anna la bonne sœur qui aide Eddie sans qu'il ne comprenne qu'elle est une religieuse (ce qui lui vaudra les moqueries de tous les autres), mais particulière puisqu'elle est une espionne. Elle imite à la perfection le dauphin. Ensuite, c'est George Kaplan (James Coburn) ancien de la CIA qui dirige une équipe d'élite qui portent tous des noms de barres chocolatées, ce qui est déjà mieux que les maladies vénériennes constate Almond Joy (Lorraine Toussaint). Le costaud stupide Bounty (Andrew Brinyaski), le mime Kit-Kat (David Caruso) et Snickers (Don Harvey) surveillent tous Eddie.

Il ne reste plus qu'à présenter le plus grand duo de la comédie d'action de tous les temps qui font élever Hudson Hawk à la postérité, les Mayflower aspirants maîtres du monde et qui veulent transformer le plomb en or grâce à l'invention de Vinci vue en ouverture du film. Lui Darwin (Richard E. Grant), elle Minerva (Sandra Bernhardt). Ils sont arrogants, fringués n'importe comment, ils parlent très fort, ils ont des mimiques improbables, ils sont obsédés sexuels. Dans leur délire, ils n'hésitent jamais à tuer tout le monde. On compte beaucoup de morts dans Hudson Hawk grâce au terrible majordome Alfred (Donald Burton). Et Minerva a un chien aussi dégénéré. « Bunny, ba-ball ! » Un chef d’œuvre.































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