Beau
joueur (Delphine Gleize, 2019)
Jadis
espoir du court-métrage, Delphine Gleize n'a jamais vraiment réussi
à passer le cap du long métrage mais Beau joueur son nouveau film
s'avère délicieux et d'une cruauté imparable. Elle a filmé un an
de matchs de l'équipe de rugby de Bayonne. Un an à se prendre tôle
sur tôle et pas des moindres, parfois les scores des adversaires
sont 10 fois plus importants que le leur. Elle ne filme jamais les
matches, c'est le métier de la télé et des spectateurs dans le
stade, mais elle scrute avec attention et précaution les visages
défaits des joueurs du banc de touche, les vestiaires, les voyages.
Le film fourmille de scènes tendres telle ce matin où tous les
joueurs qui passent devant la cinéaste lui disent bonjour. Delphine
Gleize trouve son rythme sans systématisme (sa voix douce vient
parfois commenter), sans formalisme trop voyant, sans ironie (c'est
bien là l'essentiel alors que cela aurait été très facile). On
s'attache à deux trois rugbymen dont le charisme se détache des
autres. On suit l'avant dernier match de la saison, l'un des rares
gagné, celui contre Grenoble et je me rappelle qu'un film comme
celui-là aurait pu être fait sur Grenoble quand l'équipe de foot
avait réussi à aller en Ligue 1 en 2009. Seulement voilà, je crois
que les rugbymen sont plus cinégéniques.
Noureev
(Ralph Fiennes, 2019)
D'abord
il faut ce que le film n'est pas : il refuse la projection de
l'état actuel de la Russie en la comparant avec celle de
Khrouchtchev, contrairement à Leto par exemple. Ralph Fiennes
a le bon goût de faire parler les personnages russes dans leurs
langues, les personnages français dans leur langue, ça peut pas
paraître grand chose mais c'est au contraire énorme. Noureev se
contente de parler de cette semaine cruciale dans le vie du danseur,
celle où il quitte l'URSS pour l'occident. Le film prend le pari
modeste de ne parler que de cela, avec honnêteté et un sens
consommé de l'observation d'autant plus agréable à l’œil que le
film est en partie tourné en 16mm, le grain se sent donnant une
sensualité aux gestes de Noureev. Le personnage décrit dans cette
folle semaine française loin d'être agréable suscite une certaine
antipathie, c'est un homme cassant, intransigeant, désinhibé, il ne
sait dire que ce qu'il pense, on est loin d'un portrait sucré,
hagiographique mais tout aussi éloigné de ces biopics hollywoodiens
(j'inclue là-dedans les navets Bohemian Rhapsody et
Rocketman) qui nous montre les aspects sombres (toujours les
mêmes, drogue, sexe, et toujours causé par leur problème avec
maman et le revers du succès). Le film s'arrête avant que Noureev
ait du succès. Noureev aurait gagné sans ces flashbacks en
cinémascope dans un coloris sépia qui décrivent la dure vie en
Sibérie et la découverte de l'art.
Conséquences
(Darko Stante, 2018)
Cette
année je découvre le cinéma de l'ex Yougoslavie, la Serbie avec
Teret, la Macédoine du Nord avec Dieu existe son nom est
Petrunya et la Solvénie avec Conséquences. Ce qui
ressort de ces trois films vus en moins de 6 mois est la sinistrose
ambiante, le poids des archaïsmes quels qu'ils soient. Conséquences
s'attache à Andrej un jeune gars, bien propre sur lui qui se rêve
autant en petit loubard qu'en amoureux éperdu, là est toute la
contradiction de son personnage qu'il ne cesse d'inventer,
d'improviser au cours du film tandis qu'il se frotte à ses parents
inconséquents, à l'institution (il est dans un centre pour jeunes
délinquantes) et au crime, il deale pour le petit chef du centre. Ce
dernier a bien compris que notre jeune Andrej est complètement
amoureux de lui et il va le manipuler et Andrej va se laisser
manipuler par le jeune brute dont le visage menaçant est terrifiant
quand il se met à fixer la caméra.
Made
in China (Julien Abraham, 2018)
La
bande annonce est horrible, elle laisse présager un film à la Mais
qu'est-ce que j'ai fait au bon dieu. Les morceaux comiques
extraits pour cette bande annonce sont dans les 10 premières minutes
du film. Passés ces vannes, le film devient un peu meilleur que les
autres comédies sorties ce mois de juin (je pense aux atroces Venise
n'est pas en Italie ou Beaux-parents). Made in China parle
du schéma familial chinois à travers trois générations aux
ambitions et comportements différents. En ce sens, malgré les
nombreux écueils, le film se débrouille pas mal pour retourner les
clichés sur les Chinois de France, notamment en substituant l'épouse
enceinte par le meilleur ami, c'est ce dernier qui découvre leur
manière de vivre au milieu de l'avenue d'Ivry et devient l’œil du
spectateur.
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