vendredi 14 juin 2019

Jeux d'artifices (Virginie Thévenet, 1987)

Ah les belles tignasses que voilà ! La jeunesse de 1987 des Jeux d'artifices le deuxième film de Virginie Thévenet, porte une chevelure libre et ondulée, à l'image de ces groupes de pop qui fleurissaient sur les bandes FM, je pense aux Max Valentin qui accompagnait Etienne Daho dans ses tournées, lequel vient faire un petit tour dans le film pour se faire prendre en photo par Eric (Gaël Séguin) et Elisa (Myriam David) avec la complicité de leur ami Jacques (Ludovic Henri).

Etienne Daho n'est pas le seul à être photographié, c'est toute une ribambelle qui défile devant l'objectif. Daho est en Joconde, Marco Prince le chanteur de FFF est en Napoléon, Ariel Genêt, présent dans La Nuit porte jarretelles, tout en blondeur peroxydé est Al Johnson soit le chanteur de jazz de 1927 et quelques autres encore. Les photos sont de Pierre et Gilles mais ce qui plaît est l'artisanat que le trio met pour créer ces photos. C'est très beau.

Seulement voilà, Eric en a un peu marre que sa sœur Elisa ramène tant d'hommes à la maison, il est un peu jaloux. Virginie Thévenet ne le cache pas, ne serait que le dernier plan pour l'affirmer haut et fort, Jeux d'artifices est une version moderne des Enfants terribles de Jean Cocteau. Le frère et la sœur sont en symbiose totale, ils partagent la même chambre, c'est-à-dire qu'ils ont posé leur matelas l'un à côté de l'autre.

C'est presque de l'inceste qui se dégage de leur rapport, de la relation compliquée qu'ils entretiennent malgré cette symbiose. Eric n'hésite pas à se masturber sous ses draps et suggère à Elisa de faire de même, Elisa débarque totalement nue après avoir couché avec un des ces hommes que son frère a pris en photo. Autant dans La Nuit porte jarretelles, Virginie Thévenet ne parlait que de sexualité, autant dans Jeux d'artifices on évite royalement le sujet.

Aucune pudeur à cela, c'est qu'Eric et Elisa vivent dans un autre monde. Comme chez Cocteau, ils s'isolent ne mangeant que quand ils ont faim et encore, ils ne se font jamais à bouffer, ils ouvrent une boîte de sardine et s'y jettent dessus comme la vérole sur le bas clergé. Cette maison est l'un des décors les plus étranges donnés à voir, là aussi on se croirait dans une demeure à la Cocteau, telle celle de la Bête.

S'ils débarquent dans cette maison construite par David Rochline, l'un des amis de la réalisatrice, c'est qu'ils se sont fait viré de leur appartement précédent par la propriétaire qui en avait marre qu'ils ne paient pas le loyer. Car vivre à part, en marge – dans une métaphore filée de ce cinéma dans lequel Virginie Thévenet évolue – ce n'est pas ce qui rapporte le plus d'argent, ni permet de faire des entrées au box office, pour continuer sur la métaphore.

La sœur et le frère refuse l'aide de leur père (Philippe Colin, le critique de cinéma, dans une courte scène) mais acceptent les pellicules photo du père de Jacques (Claude Chabrol, parfait). Puis arrive Stanislas (Dominic Gould), un Américain qui transformer la vie d'Elisa, en premier lieu, puis celle d'Eric. Stan est follement amoureux d'Elisa mais une distance constante est établie entre eux, toujours ce refus du sexe.

Il ne sera pas vraiment dit combien de temps dure ce récit, c'est-à-dire combien de mois vivent reclus Elisa et Eric dans ce bric-à-brac et ce décor gigantesque. Ils sortent parfois (le récital d'Arielle Dombasle en compagnie de Chérubin alias Virginie Thévenet), parfois le monde vient à eux (Frédéric Mitterrand passe à la télé et radote avec ironie). Un jour, plus aucun homme ne vient se faire prendre en photo.


Des projets, Elisa en établit avec Stanislas, il veut l'amener en Amérique, à New-York. Chaque fois, elle cède au chantage affectif de son frère, augmentant encore plus cette impression durable d'inceste. En conséquence, le finale tout en non-dits a de quoi étonner mais il est finalement logique pour les personnages, il place le récit hors de ces murs malfaisants dans l'une des rares scènes hors de l'appartement, hors de Paris. 



























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