vendredi 28 juin 2019

Le Professeur (Valerio Zurlini, 1972)

Dans un long entretien accordé à Jean-François Rauger (Cahiers du cinéma N°501 avril 1996) à l'occasion d'une rétrospective à la Cinémathèque Française, Alain Delon déclarait que Le Professeur était l'un de ses films préférés, qu'il avait effectivement remplacé Marcello Mastroianni pour le rôle et qu'il espérait que la version présentée serait intégrale. Il aura fallu attendre 23 ans pour la découvrir cette version complète du film de Valerio Zurlini.

Le gris de la ville maritime de Rimini est intact, c'est une atmosphère cotonneuse, presque poisseuses qui enrobe ce personnage de Dominici que joue Alain Delon. Il n'esquissera pas un sourire (ou presque) de tout le film, ne quittera jamais son manteau marron, il porte une barbe de trois jours et fume des cigarettes. Ce professeur est un solitaire, il ne vit que pour lui, ses élèves et le proviseur de son lycée vont vite le découvrir.

En cours, il achète le Figaro littéraire et le lit pendant que ses lycéens font une dissertation. Il les autorise à fumer en classe. Ça fait enrager la direction, mais Dominici n'en a pas grand chose à faire. Il ne fait que remplacer un collègue. Il n'est là que pour quelques semaines. Il va vite se faire une bande d'amis à jouer au scopone, au poker, au cartes avec Marcello (Renato Salvatori), Spider (Giancarlo Giannini), Gerardo (Adalberto Merli).

Ils sont fringants ces quadragénaires, vieux beaux qui passent leur temps à traiter les femmes de salopes, à leur mettre la main au cul, à courir après le poker les boîtes de nuit en costard cravate et picoler jusqu'à plus soif. Valerio Zurlini n'est pas tendre avec ces hommes machos qui ne pensent qu'à la bagatelle, seul Dominici semble observer ce petit manège d'un peu haut, ce qui d'ailleurs lui sera reproché par ses nouveaux amis.

Le regard glacial d'Alain Delon se porte sur une de ses élèves, Vanina (Sonia Petrova), 19 ans, par ailleurs la petite amie de Gerardo, ce qui n'est pas sans créer au sein du groupe quelques troubles. Gerardo vient la chercher en Ferrari bleue, Dominici n'a qu'une vieille traction avant Citroën, le cœur de la jeune fille balance entre le beau riche et le triste pauvre qui n'a comme cadeau à lui faire qu'un exemplaire du roman Vanina Vanini de Stendhal.

Spider, presque le sosie jovial et dévergondé de Dominici, encourage cette liaison amoureuse. Marcello, agent immobilier, prête les maisons qu'il loue pour le parties de poker puis les amourettes clandestines. L'une des choses les plus frappantes, peu soulignée par le cinéaste mais constamment visible, est le décor de ces maisons, sur les murs se trouvent toujours des toiles, natures mortes, peintures religieuses ou classiques ou référencées comme telles.


Il faut s'habituer à ce que Alain Delon parle italien avec la voix d'un autre et à l'infinie mélancolie du film. Il n'est pas étonnant que Le Professeur soit l'un de ses films favoris, il jure tant dans son travail de l'époque (essentiellement des gros films commerciaux entre Henri Verneuil et Jacques Deray), comme plus tard son travail avec Bertrand Blier (Notre histoire) lui apportera un rôle encore plus à l'opposé des balourds films policiers des années 1980.

















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