Quand
une aristocrate âgée devient veuve dans le Londres de 1937, elle
décide de trouver un hobby. Laura Henderson (Judi Dench) suit les
précieux conseils de sa meilleure amie Lady Conway (Thelma Barlow),
également veuve : faire de la broderie, aider les pauvres dans
des œuvres de charité ou avoir des amants. Son tempérament et sa
richesse la porteront à faire un tout autre projet. Tandis qu'elle
se promène dans les rues de Londres dans sa belle automobile
cramoisie, elle passe devant un théâtre décrépi et à vendre.
Le
théâtre est le Windmill, le Moulin. Il demande de nombreux travaux,
elle a l'argent pour cela. Il nécessite un directeur artistique, ce
sera Vivian Van Damm (Bob Hoskins, également producteur du film).
Leur première rencontre est houleuse. Devant son nom, elle lui
demande s'il est Hollandais, puis s'il est Juif. Avec sa grosse voix,
il rétorque sur le même ton à ces outrecuidances et s'en va,
refusant net ce travail. Avec un petit sourire, Madame Henderson
comprend qu'elle a trouvé en Van Damm son alter-ego. Il devient le
directeur du théâtre.
La
construction comique de Madame Henderson présente est connue
et attendue par les spectateurs. Un vieux bougon face à une
excentrique frivole, les deux comédiens jouent à grand renfort de
répliques qui font mouche (et qui sont excellemment écrites) les
archétypes du buddie movie désaccordé, elle dit blanc, il dit
noir. Les castings, les choix des numéros, les décors, Madame
Henderson se mêle de tout, ce qui met en rage Van Damm. Et une idée
surgit, ouvrir le théâtre toute la journée pour avoir plus de
spectateurs.
L'idée
fonctionne. Tout le gratin (dont Lady Conway qui s'amuse comme une
petite folle) assiste à la première. Triomphe. Habituel défilé de
coupures indiquant que le théâtre est complet, mélangé avec des
extraits du show, strass, paillettes et lumières étincelantes des
numéros de vaudeville. Seulement voilà, le succès amène les
théâtres concurrents à copier la recette de Van Damm et Henderson
et leur théâtre voit le nombre d'entrées diminuer. Réunion de
crise, Madame Henderson propose de montrer des femmes nues.
Comme
dans ses films précédents, Stephen Frears joue sur la pudibonderie
des autorités britanniques incarnées ici par le Lord Chamberlain
(Christopher Guest), conseiller du roi, sorte de censeur et
d'indicateur des bonnes mœurs à suivre. Le directeur artistique
pense qu'il ne pourra jamais monter un spectacle de nu, mais Madame
Henderson a plus d'un atout. Elle connaît le Lord Chamberlain, le
comte de Cromer, qu'elle appelle par son petit nom Tommy et contre
lequel elle lance des petites piques quand elle lui parle.
Avec
son chorégraphe vedette Bertie (Will Young), jeune homme fringant
peu enclin à admirer la gent féminine et sa fidèle assistante
Maggie (Doraly Rosen), Van Damm auditionne des jeunes femmes qui
accepteraient de se dévêtir sur scène. Franchement inquiètes,
elles suggèrent que tous les hommes présents se déshabillent
également, et là, Madame Henderson, avec un petit sourire malin, ne
perd pas une miette de ce strip-tease improvisé. Tout le film est
composé de ce genre de petites saynètes cocasses.
Mais
il faut revenir sur cette censure de la nudité et sur la pression
qu'exerce Madame Henderson au Lord Chamberlain. Après l'avoir autant
rabroué qu'amadoué en lui offrant du brie et du vin, il accepte
(grâce à sa force de persuasion, l'un des ressorts du film, elle
manipule habilement les gens sans qu'ils ne s'en rendent compte), à
condition que les jeunes femmes ne bougent pas. Il faut que cela soit
de l'art. Les filles seront donc comme dans des tableaux, immobiles
mais la poitrine dénudées. Le Lord viendra approuver en personne le
spectacle.
Le
film de Stephen Frears s'étend sur cinq ans, ce qui inclue la
seconde guerre mondiale. On avait vu en début de film que Madame
Henderson se rendait sur la tombe de son fils mort à 21 ans dans les
tranchées de la guerre de 14. Et la guerre arrivant, le théâtre se
peuple de soldats qui viennent admirer les actrices bien plus que les
chansons interprétées par Bertie et Jane (Camille O' Sullivan),
chanteuse au bagout certain. Des chansons romantiques et patriotiques
où les tableaux nus varient régulièrement selon l'actualité. Au
dessus du théâtre, les bombes allemandes éclatent et détruisent
les quartiers de Londres.
Au
centre des tableaux nus se trouve la vedette du spectacle, celle que
tous les hommes viennent voir et dont tous les soldats tombent
amoureux. Maureen (Kelly Reilly) a été découverte par hasard par
Van Damm et Bertie (elle est tombée de son vélo dans un canal un
soir de pluie). Madame Henderson se retrouve en Maureen, sa jeunesse
lui rappelle la sienne. L'arrivée d'un jeune soldat amoureux de
Maureen, l'inquiétude de la guerre, la menace de fermeture (et un
discours poignant de Madame Henderson) amènent le film sur une
tonalité plus sombre et funeste.
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