jeudi 9 juin 2016

The Mission (Johnnie To, 1999)



Il faut protéger Lung (Eddy Ko) qui a manqué de se faire assassiner au restaurant. Lung ne sait pas qui lui en veut mais il sait comment se défendre. Il va demander à son frère Frank (Simon Yam) d’appeler Curtis (Anthony Wong) et d’autres hommes pour qu’ils deviennent ses gardes du corps. Curtis est connu sous le nom du « diable », c’est un homme impitoyable. Les autres gardes du corps seront Roy (Francis Ng) qui tient une boîte de nuit et porte des chemises hawaïennes. Shin (Jackie Lui), le plus jeune qui rêve d’enfin entrer dans une triade. Mike (Roy Cheung), cheveux blonds qui fait le larbin dans une boite de nuit. Et le dernier est James (Lam Suet) qui passe son temps à fumer et à manger des pistaches. Lung va discuter avec l’oncle Cheung (Wong Tin-lam) pour s’assurer de son soutien, mais le vieux parrain veut se retirer des affaires.

Les cinq mercenaires changent de fringues, s’habillent en costumes genre Hugo Boss, chemise à pelles à tartes. Ils vont habiter dans la maison de Lung. Et ils vont surtout devoir apprendre à se connaître (un petit peu) et à cohabiter (beaucoup). C’est qu’ils ne parlent pas vraiment entre eux les bougres. Sauf pour se faire quelques reproches. Ils leur arrivent de se taper dessus. Roy fout une grosse branlée à Curtis quand celui-ci l’a abandonné dans une ruelle après une fusillade. Ils ont beau être là, on en veut encore à Lung et les ennemis frappent au fusil à lunettes du haut d’un immeuble. Ou ils provoquent une embuscade dans un grand magasin. Mais ils s’en sortent toujours et rentrent sains et sauf dans la villa clinquante de Lung dans l’attente d’une nouvelle sortie dangereuse.

Attendre, attendre. C’est la seule chose qu’ils font. Shin fait des blagues. Il met des pétards dans les cigarettes histoire de faire marrer ses camarades et de détendre l’atmosphère. Les cinq hommes sont de caractères très différents, leurs histoires propres sont variées et aucun n’a le même âge. Mais ils vont devenir amis. Ces moments d’attente composent l’armature du récit de The Mission. La recherche de l’ennemi de Lung n’est qu’un macguffin qui sera révélé au bout d’une heure. Johnnie To fait ralentir le temps lors des fusillades, il ne fait donner aucun dialogue à ses personnages. Cela n’avait jamais été fait. Lors d’une fusillade dans n’importe quel film de triade, les personnages se croient toujours obligés de discuter entre eux. Ici, ils restent immobiles et se taisent. Ils essaient de combler leur ennui par des âneries et Johnnie To ne filme que les pics du récit (fusillades) et les creux (l’attente) le tout avec une ritournelle lancinante qui reste dans la tête longtemps après le film.

Et les femmes dans tout ça ? Elles sont bien absentes. Sauf Madame Lung (Elaine Eca Da Silva) qui ne doit pas avoir plus de trois lignes de dialogues dans  tout le film. Dans une facétie scénaristique à la Psychose, cet unique personnage féminin deviendra le centre du film dans sa dernière partie. C’est alors l’amitié naissante entre les cinq gardes du corps qui l’enjeu du film. Un événement va mettre à rude épreuve leurs rapports. The Mission est alors un film sec et tendu, subtilement mis en scène dans les regards entre les hommes, dans leurs postures et sans fioriture. Certes, c’est un film un peu lent surtout en comparaison de Running out of time qui est sorti juste avant. C’est en tout cas le tout premier film de Johnnie To à sortir dans les salles françaises, deux ans après sa sortie à Hong Kong, certes. The Mission a cependant été l’arbre qui cachait la forêt Johnnie To et Milkyway Image en faisant croire qu’il n’était qu’un bon réalisateur de polar. Et encore aujourd’hui, chez certains cancres de la critique ce simplisme du cinéaste auteur persiste. En dépit des films qu’il a pu réaliser avant ou depuis.




















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