lundi 13 juin 2016

A mort l'arbitre ! (Jean-Pierre Mocky, 1983)

Depuis quelques semaines, on lit dans la presse et on entend à la télé que cet Euro 2016 doit être une fête. Il y a un glissement de langage, finis la compétition, le championnat, les adversaires. Tous ces mots sont remplacés par « fête » et même le terme football est évité. A la fin d'A mort l'arbitre !, Jean-Pierre Mocky fait dire au personnage de flic qu'il incarne, que les supporters viennent assister au match pour expulser leurs pires pulsions et faire la fête avant et après le match.

Tout ça c'est sans compter sur l'arbitre (Eddy Mitchell) qui flanque un carton rouge à un joueur de l'équipe des Jaunes (aucune ville n'est donné, les équipes de football ne sont désignées que par la couleur de leur maillot). Résultat : les Jaunes perdent le championnat. Rico (Michel Serrault), le meneur des supporters veut faire payer à « l'arbite » (comme il le prononce) son erreur de jugement. La course poursuite s'engage.

D'un côté, Maurice l'arbitre et Martine sa copine (Carole Laure), venue assister au matc,h et qui se retrouve, précisément, dans la tribune des Jaunes, juste à côté de Rico qui en profite pour lui faire des gestes déplacés. A l'issue du match, Martine et Maurice sont exfiltrés dans une fourgonnette pour échapper aux supporters et se rendre à France 3. Maurice est persuadé que Rico et son gang ne vont pas les poursuivre plus longtemps.

De l'autre côté, Michel Serrault est accompagné de l'habituelle déclinaison de tronches chères au cinéma de Mocky. Dominique Zardi, Hervé Pauchon, Jean Abeillé, Jean-Claude Romer, François Toumarkine. Laurent Malet, muni d'une minerve, et Claude Brosset, dans un rôle d'ultra, viennent compléter le tableau des supporters. Au premier, le rôle de celui qui veut calmer le jeu, au second celui qui jette de l'huile sur le feu.

Dans leur course-poursuite, les personnages changent régulièrement de décors. Une pizzeria, les locaux de FR3, une galerie commerciale, un immeuble et enfin une usine. Rico mène la danse et dans ce personnage vulgaire, violent, misanthrope, misogyne, salace, scabreux, Michel Serrault campe l'un des rôles les plus abjects du cinéma de Mocky, qui en compte beaucoup. Il est aussi d'une grande lâcheté.

Cette lâcheté, il l’exerce dans le centre commercial. Munis d'une trompette, les supporters recherchent Maurice. Ils s'infiltrent dans tous les couloirs. Rico aperçoit une ombre et se munit d'une hache de pompier. Il l'abat sur cette ombre qui se trouve être, non Maurice, mais le conducteur du bus. Rico ne se démonte pas et va accuser l'arbitre de ce crime et encourager les autres à le tuer, comme mesure de rétorsion.

Le choix des décors est l'une des choses primordiales dans A mort l'arbitre ! Ils font passer le film vers le thriller et Mocky vise Shining en faisant de ce grand ensemble d'immeubles digne de l'ère stalinienne le cœur de l'angoisse. Un ascenseur rouge sang, la main et la visage de Serrault derrière une porte qui attaquent Carole Laure. Plus tard, le car poursuit la voiture dans un labyrinthe, non pas de glace mais dans un tunnel creusé sous terre.

Succès modeste à sa sortie, A mort l'arbitre ! est devenu assez vite emblématique de ce qui existe de pire dans le sport. Avec les titres des journaux ces jours-ci sur les holligans russes et anglais qui « gâchent la fête », pour reprendre les termes des journalistes, et bien, il faut bien voir que Mocky, las de ces comportements dans son personnage de flic, visait juste et fort et que pas grand chose n'a changé.




















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