vendredi 15 juin 2018

Trois visages (Jafar Panahi, 2018)


Trois visages commence comme Happy end de Michael Haneke avec un cadre horizontal et une image de smartphone. Mais pour le reste, Jafar Panahi fait, heureusement, un film totalement différent. Une grosse bagnole, un chauffeur, Jafar Panahi lui-même, plus jovial que jamais, une passagère à la chevelure rouge écarlate Behnaz Jafari, une actrice de soap opera iranien, ultra connue à qui la vidéo a été adressée. Ils se rendent dans le nord de l'Iran dans une région où l'on parle turc et où les routes sont fort étroites.

On croise comme dans les films véhiculés d'Abbas Kiarostami, des géraniums sur les balcons, des maison brinquebalantes, des discussions avec les villageois. Chaque villageois est porteur d'un sketch, celui avec les klaxons, celui avec le prépuce, celle dans la tombe, celui qui éructe, tous sont dans le domaine de la comédie. Depuis Taxi Téhéran, on sait que Jafar Panahi est un cinéaste à l'humour délicat. Le tout pour composer une enquête qui traîne parfois en longueur sur Marzyieh, la jeune fille dont on découvrait la parole en début de film.

On l'écoutait attentivement mais paradoxalement Jafar et Behnaz eux ne voit que la mise en scène de l'image : est-elle truquée, est-elle montée ou au contraire peut-on en déterminer la vérité bazinienne dans l'absence de montage ? Là est la plus grande réflexion sur l'image de Trois visages. Une habitude chez le cinéaste dès Le Ballon blanc superbe film sur le un tournage de film. Le dernier plan séquence fixe, le seul avec de la musique, voit Behnaz longuement marcher et rejointe par Marzyieh, rappelle le dernier et magnifique plan dans Au travers des oliviers.

Il était logique que Jafar Panahi s'approprie la plus belle séquence du cinéma d'Abbas Kiarostami mais avec une plus grande sécheresse, chez Abbas Kiarostami, Tahereh et Hossein se rejoignaient dans une paysage verdoyant qui aurait pu annoncer un avenir meilleur, chez Jafar Panahi le chemin rocailleux est la parabole de la difficulté actuelle du cinéma iranien à se renouveler, à briser dans l’œuf le rêve de Marzyieh de devenir actrice, le plus audacieux pied-de-nez de Jafar Panahi aux mollahs, Trois visages est la meilleure comédie du cinéma iranien.

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