mercredi 13 juin 2018

L'Aigle de la 9e Légion (Kevin MacDonald, 2011)

Au premier coup d’œil, le centurion Marcus Flavius Aquila (Channing Tatum) tombe amoureux du jeune esclave Esca (Jamie Bell) qu'il voit dans l'arène des gladiateurs. Torse nu, portant des braies marrons, pieds nus, Esca n'est muni que d'un court sabre pour se défendre contre un gladiateur extrêmement musclé, portant un casque et puissamment armé. Esca refuse de se battre et reçoit de violents coups dans la tête qui le mettent à terre. Quand le public exige la mise à mort en baissant le pouce, Marcus lève le sien pour sauver le jeune homme.

Nous sommes en 140 après Jésus-Christ, dans un coin perdu de la Bretagne, c'est-à-dire l'Angleterre encore et toujours occupée par Rome. En tout cas au sud du mur d'Hadrien. C'est une contrée fort peu accueillante, filmée tout en gris et verdâtre par Kevin MacDonald, qui fait un péplum crépusculaire comme d'autres des western. Ce qui n'empêche pas de créer des peuplades barbares que n'aurait pas renié John Milius pour son Conan le Barbare. Voilà où débarque Marcus, dans une garnison sans cesse assaillie par les barbares.

Avant qu'ils ne se rencontrent et partent au-delà du mur, dans une balade vers l'inconnu, une excursion où ils font se découvrir l'un l'autre, L'Aigle de la 9e Légion cherche un prétexte. Marcus doit laver l'honneur de son père accusé par le Sénat d'être un traître, il compte ramener cet aigle de métal. Le film se veut une réflexion sur le colonialisme avec les Romains qui envahissent des pays en imposant leur civilisation, là le réalisme de la mise en scène a pour objectif de relever cette sauce politique. Ce qui n'empêche pas que tout soit tourné en Hongrie et non en Ecosse.

Acheté par l'oncle (Donald Sutherland) à l'issue de ce combat inégal, car l'oncle a bien compris le regard pénétrant de son neveu pour le jeune homme, Esca est offert comme esclave personnel à Marcus. Ce dernier est blessé salement au genou après un difficile combat, il est en convalescence. La scène où Marcus se fait opérer à vif et sans anesthésie, évidemment, est filmée comme une scène d'amour, Esca se love sur Marcus avec des échanges de regard extatiques dans un champ contre-champ sur les visages des deux acteurs.

La chronique amoureuse entre les deux jeunes hommes adoptent le point de vue d'Esca. Il sait que le père de Marcus a tué toute sa tribu et cherche à se venger en menant Marcus vers le nord, dans un Terra Incognita où il doit perdre son maître. Marcus tout à son honneur familial qu'il doit laver auprès des magistrats romains ne voit pas le stratagème. Il se laisse guider par son esclave qui a tôt fait de diriger l'expédition, servant de traducteur à chaque rencontre, inversant les rapports de domination esclave maître entre eux pour enfin les mettre sur un pied d'égalité.

Dans ce monde peuplé d'hommes (aucune femme ne compose un personnage, elles ne sont que des silhouette), l’ambiguïté n'a pas cours. Le film fonce tête baissée vers ce plan final où Marcus et Esca quittent le monde civilisé qui les ignore, les yeux dans les yeux, le sourire en bandoulière, pour de nouvelles aventures. Les alliés tel Guern (Mark Strong) ancien légionnaire perdu ou les adversaires comme le seigneur des montagnes (Tahar Rahim) ne font qu'approfondir les liens entre Marcus et Esca, défiant toutes les adversités à l'unisson.





















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