Sur
le livret qui accompagne le DVD de Roar, on peut voir une
affiche promotionnelle récente avec le slogan suivant « aucun
animal n'a été blessé pendant le tournage, 70 membres de l'équipe
ou acteurs l'ont été ». Depuis sa sortie en salle en février
dernier puis son édition en DVD & BluRay, j'avais envie de voir
ce film dont je n'avais jamais entendu parler auparavant. Je ne suis
pas déçu, Roar est tout à fait la bizarrerie malsaine et
hippie annoncée un peu partout dans la presse cinéma, en substance,
un film monstrueux.
Les
héros s'appellent Robbie, Gary, Togar, les noms des lions sont au
générique à égalité avec Tippi Hedren, Melanie Griffith, John
Marshall et Jerry Marshall, la famille de Noel Marshall. Les enfants
portent leurs prénoms, Tippi Hedren s'appelle désormais Madelaine,
comme un résurgence du cinéma d'Alfred Hitchcock (on pense
constamment aux Oiseaux), Noël Marshall devient Hank, médecin en
Afrique de l'est (Kenya et Tanzanie où le film est censé se
passer), enfin Kyalo Mativo, l'acolyte de Hank se fera appeler par
son nom de famille.
Le
résumé de Roar est très simple. Hank vit depuis des années
au Kenya. Il est médecin. Le film commence par de belles scènes
démagogiques où ils soignent les habitants qui le remercient en
dansant. Il s'en va en moto dans de très beaux chromos (la photo,
superbe, est de Jan de Bont qui finira scalpé par un fauve). Hank
attend toute sa famille qui doit débarquer et va les rejoindre à
l'aérodrome en compagnie de son fidèle Mativo. Les distances étant
ce qu'elles sont, tout comme les routes, Hank et Mativo sont un peu
en retard.
Avec
leurs valises, les trois ados et leur mères, décident de prendre un
car à travers la brousse au lieu d'attendre Hank (une sombre
histoire de bateau déjà parti). Ils se feront débarquer au sommet
d'une colline et là, miracle du cinéma, la maison de Hank se trouve
dans les montagnes californiennes, reconnaissables entre mille. La
production a habilement maquillé les lieux pour que cela ressemble à
une savane africaine. Tout joyeux, la famille court vers cette
demeure immense au milieu de nulle part.
C'est
là qu'entrent en scène les dizaines de fauves qu'héberge Hank.
Lions, panthères, tigres mais aussi éléphants qui sont chez eux.
Référence hitchcockienne donc, personne ne remarque au premier
abord la multitude d'animaux sauvages ici et là. Madelaine et ses
enfants visitent la maison de bois, aux nombreux escaliers
brinquebalants, aux fenêtres qui se ferment à peine. Les enfants
essayent les lits. Au dessus de Madelaine, plusieurs lionnes
l'observent du toit ouvert : la chair fraîche arriver à bon
point.
Le
film se joue sur deux jours, en deux directions opposées, celle de
la famille coincée ici avec la menace constante des fauves. C'est un
film d'angoisse qui menace à chaque instant de se transformer en
slasher. Ils se cachent comme ils peuvent, où ils peuvent,
placard, armoire, frigo que les lions renversent sans ménagement.
John, le fil le plus âgé, à la barbe fournie, tente régulièrement
de partir des lieux, notamment en fonçant en moto. Les lions adorent
poursuivre ceux qui fuient, qui courent, qui roulent vite. Ils
détruisent le décor consciencieusement.
Dans
cette partie domestique où les personnages ne cessent à chaque
minute d'être prisonniers de cette furie féline, les lions et
autres fauves rentrent sortent des pièces, la maison semble à
chaque scène changer de forme, on découvre ici une nouvelle pièce,
là un nouvel escalier, tout menace de s'effondrer. Le finale de
cette chasse à l'homme par les héros lions se poursuit à
l'extérieur, dans une étrange angoisse burlesque où les corps de
Madelaine et de ses enfants n'en finissent de tomber à l'eau après
avoir tenté de fuir en pirogue.
La
deuxième direction est celle de Hank et Mativo, ils partent dans la
direction inverse, vont vers l'aérodrome. Ils sont épaulés par
deux tigres immenses que Hank traite comme des chatons « ce ne
sont pas des animaux domestiqués, ce sont des amis ». Là, il
faut faire un point sur le jeu catastrophique de Noel Marshall.
Véritable pile électrique, il éructe chaque réplique, il
sautille, il gesticule, il rigole quand il se fait déchiqueter par
ses amis. Quand un pneu de la jeep crève, il devient totalement
hystérique, c'en est involontairement hilarant.
Après
plus d'une heure de confrontation avec les fauves, Hank retrouve
enfin Madelaine. Je n'ai pas vraiment eu peur pour elle et ses
enfants, mais je suis resté estomaqué par cette idée de faire
jouer tout ce beau monde avec des lions sans aucun trucage, c'est ça
le truc de Roar, ce malaise de plus en plus prégnant qui me
fait rire jaune, d'autant que je ne peux pas m'empêcher de penser
qu'ils sont quand même très couillons de se cacher si
maladroitement, de tenter de se séparer pour se cacher avant de tous
se chercher alors qu'ils sont à côté les uns des autres.
Là
où le malaise atteint son apogée est paradoxalement lors de la
réconciliation finale. Au bout d'une heure vingt de film, ils
découvrent une maison à côté, bien plus solide, aux portes et
fenêtres qui ferment, enfin, ils s'y rendent et s'y enferment. C'est
sans compter sur l'intelligence des animaux. Gentiment, ils viennent
s'endormir à côté de la famille qui roupille comme si rien n'était
arrivé. Hank arrive enfin et affirme que les fauves sont sympas.
C'est alors un déluge de sourires et de caresses, la preuve par
l'image que cette utopie était réelle. Hallucinant !
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