Longtemps,
La Comtesse de Hong Kong a été invisible. Pas de ressortie
depuis 1967, peu de passage télé (je l'avais vu en décembre 1997
en VF), absent des éditions MK2 en 2003 quand tous les longs
métrages sont sortis en DVD. La critique de l'époque a été
désastreuse, jugeant l'histoire ringarde, venue d'une époque
révolue. Les monographies sur le cinéaste, par exemple celle de
Francis Bordat, collection 7e Art chez Cerf, éludent volontairement
le film de leur analyse. Ce scénario a été imaginé en 1931 par
Charles Chaplin pour Paulette Goddard et lui-même. Il se contente
d'incarner quelques secondes un vieux steward.
Unique
film en couleurs du cinéaste, La Comtesse de Hong Kong est
aussi son premier film au format large en 1:85, tous ses films
étaient en 1:33 (les muets) puis 1:37 (les sonores et les parlants).
Paradoxalement, tout est filmé en studio (en l'occurrence à
Pinewood en Angleterre), Chaplin ne prend pas la peine de sortir,
coinçant ses deux personnages Ogden (Marlon Brando) et Natacha
(Sophia Loren) dans une cabine de luxe d'un paquebot qui relie Hong
Kong à San Francisco. Aucun d'eux n'ira faire escale pour visiter
les villes étapes. Quand en fin de film, Natacha se rend sur une
plage de Hawaii, c'est une transparence accentuant l'effet factice du
scénario.
C'est
l'éternelle attraction des opposés, le millionnaire Ogden Mears est
proche de devenir Secrétaire d'Etat, il sera finalement nommé
ambassadeur en Arabie Saoudite. Elle est call-girl dans un cabaret de
Hong Kong. Harvey (Sydney Chaplin, l'un des fils de Chaplin pas son
frère qui jouait dans Charlot soldat) décide de faire venir
dans la cabine d'Ogden trois de ces « comtesses » surnom
que l'on donne à ces prostituées. Natacha prétend être la
descendante d'une princesse russe, arrivée à 13 ans en Chine et
forcée de vendre ses charmes. Natacha ne quittera pas la suite du
millionnaire, fort peu diplomate avec elle malgré son poste de
diplomate. Elle est uniquement vêtue d'une robe blanche et n'a pas
de passeport.
La
suite est composée de deux pièces, un immense salon et une chambre.
Les murs sont blancs et tout est éclairée par de puissantes lampes,
les ombres des acteurs sont dans tous les sens, tout est
terriblement mal éclairé par le chef opérateur créant une tenace
impression de théâtralité. L'humour se contente dans 80% du film à
du vaudeville basique : des portes qui s'ouvrent et qui se
ferment, et qui claquent. L'enjeu est que Natacha ne soit pas
découverte par les nombreuses personnes qui entrent dans la suite,
stewards, capitaine, journalistes ou secrétaire d'Ogden. Seul Harvey
sera au courant de la présence de Natacha et comprendra que son
patron est en train de tomber amoureux de la passagère clandestine.
Parmi
tous les gags, Chaplin reprise celui du mal de mer (comme dans Une
journée de plaisir) où le bateau tangue et provoque des
vomissements. Cette trivialité burlesque est prolongée avec l'envie
d'uriner d'Ogden qui met la musique très fort dans sa chambre pour
que Natacha ne l'entende pas pisser. Le seul gag drôle est quand
Ogden tapote de sa main la table basse devant l'inconséquence de
Natacha. Parmi les figurantes, on trouve Geraldine Chaplin (elle
danse avec Marlon Brando) et deux autres de ses filles, Josephine et
Victoria. La pauvre Tippi Hedren joue l'épouse d'Ogden, femme
glaçante et cynique mais qui découvre la supercherie de Natacha.
Happy end, Ogden renonce à sa brillante carrière et part retrouver
sa belle Natacha, mais tout est si définitivement superficiel qu'on
préférait quand ils se disputaient.
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