mercredi 7 novembre 2018

High life (Claire Denis, 2018)


Matt Damon dans Seul sur Mars, Ryan Gosling dans First man et aujourd'hui Robert Pattinson dans High life, la vie dans l'espace s'accompagne de l'effet Koulechov (c'est amusant d'observer combien les affiches de ces trois films sont similaires). Il faudra un jour se poser la question au sujet de ces acteurs blonds envoyés dans une navette spatiale et dans la voie lactée, sur Mars, la Lune ou au fin fonds de notre système solaire, non pas que ces trois acteurs ne soient incapables de donner la moindre émotion, mais les cinéastes et surtout Claire Denis jouent sur l'aspect lisse de ces interprètes.

Depuis qu'il a tourné pour David Cronenberg dans Cosmopolis, déjà une histoire où l'effet Koulechov était majeur, enfermé dans cette limousine comme dans cette boîte à sardines parallélépipédique qu'est le vaisseau spatial créé dans High life et déjà avec Juliette Binoche, Robert Pattinson ne cesse de se détourner de ce cinéma qui l'a fait naître et connaître (la saga Twilight). Life, Lost city of Z et Good time en attendant d'autres films. Personne n'aurait parié un caillou que le si insipide Edward Cullen deviendrait la coqueluche du cinéma art & essai.

Ça cause anglais dans ce vaisseau spatial mais ça rappelle l'Union soviétique et évidemment Solaris (celui de Tarkovski pas celui de Soderbergh). Pour bien faire comprendre qu'on est dans l'espace, notre héros apparaît en combinaison spatiale. Claire Denis et ses décorateurs et accessoiristes n'ont pas fait dans la surenchère, disons que ce serait un simple couloir de bureau où les portes et les rambardes seraient habilement déguisées et capitonnées pour faire légèrement futuristes. L'idée est qu'on sache immédiatement qu'on est dans l'espace.

Plus tard dans le film, tandis que la navette se déplace, Claire Denis filme le vide de l'espace, c'est-à-dire qu'elle sort dans l'intersidéral pour imaginer un trou noir dans lequel Robert Pattinson irait se perdre, s'engloutir, se fondre, comme un châtiment ultime de son parcours. Car il est un condamné à mort qu'un état, forcément futuriste, aurait balancé, sans gardiens ni témoins, dans l'espace au lieu de le faire croupir dans une prison du Texas ou du Kazakhstan. Il n'est pas seul dans sa boîte volante, attention histoire minimaliste et parfois baclée.

Le film ne se déplace pas seulement dans l'espace mais aussi dans le temps. Le présent, Robert Pattinson, souvent à moitié nu, couvert de tatouages, filmé comme un objet érotique, le vit avec un bébé, un nourrisson à qui il parle comme à une adulte. Claire Denis souvent avare d'explications toutes faites, d'autant plus qu'ici l'acteur passe du temps seul, parle peu (ou d'autres choses que le spectateur de SF chercherait à savoir), ne donnant pas à ses dialogues une force de narrations, laisse le spectateur deviner comment ce nourrisson est arrivé dans cette prison flottante.

Le passé de notre prisonnier est plus peuplé, des condamnés à mort comme lui. Là, ça parle beaucoup plus, de sexe essentiellement (Juliette Binoche et sa love machine), de désirs aussi, d'envie de meurtre un peu (le jeu pénible de Mia Goth). C'est un suspense formel minuscule qu'entend tenir High life, comment toutes ces personnes ont disparu de la prison spatiale, en adéquation avec le jeu de Robert Pattinson, somme toute fascinant dans ses postures de regards, sa bouche ouverte, ses gestes anachroniques, c'est lui le plus grand mystère de High life.

1 commentaire:

Jacques Boudinot a dit…

C'est surtout raté à cause d'une narration en flash-back
qui désamorce tous les enjeux narratifs du film.
Résultat : au bout d'une heure on a touché le bout du
bout du film.