mercredi 28 novembre 2018

Diamantino (Gabriel Abrantes & Daniel Schmidt, 2018)


Sur une belle image colorée de galaxie intersidérale, le nom de Diamantino s'affiche quelques secondes. Il est une star du football, adulé par des milliers de supporters venus dans ce stade immense que la voix off compare à la Chapelle Sixtine, rien de moins. Le football, surtout au Portugal, est une religion et Diamantino (Carloto Cotta, l'acteur était le très joli moustachu dans le très beau Tabou de Miguel Gomes) est le Dieu du ballon rond. Ce long travelling au dessus de la ville nocturne et qui débarque sur ce stade embrase le destin de Diamantino.

Le match de foot qui entame Diamantino se soldera par l'échec du tir au but du joueur. Il s'imagine aidé dans sa tâche majestueuse par des « petits chiens poilus » qui débarquent sur la pelouse du stade le tout dans un nuage vaporeux rose qui flotte tel une rêverie ouatée. Des petits chiens qui apparaissent comme des toutous géants et remplacent les autres joueurs. Diamantino est l'homme phare du football portugais, le seul, l'unique, mais en ratant son tir, il devient le moins que rien, le paria du football, et le pauvre gars ne comprend pas ce qui lui arrive.

Que faire quand il ne joue pas au football, traîner sur son yatch avec son papa chéri et découvrir que parfois la vie n'est pas marrante. Sur une faible embarcation, il croise des réfugiés africains. Tino, comme l'appellent ses deux sœurs, des jumelles méchantes comme les sœurs de Cendrillon, qui profitent son argent et de sa notoriété, a envie d'aider les gens et il veut adopter un petit « fugié », le pauvre footballeur n'est pas capable de dire « réfugié », il ne sait même pas ce que ça peut être un réfugié, il croit que tout le monde est riche.

Dans son château, loin de la ville, loin des tumultes, dans la campagne, il va accueillir Rahim (Cleo Tavares), petit immigré africain. Il lui installe une chambre avec plein de jouets, il lui donne à boire du soda Bongo, il le nourrit avec des gaufres au nutella et à la chantilly. Tino, torse nu, fier de son corps athlétique (Carloto Cotta est souvent à moitié nu, en slip, en short, en survèt), arrive dans la chambre du fils adoptif et tel un Cristiano Ronaldo plus vrai que nature, fait quelques photos pour les réseaux sociaux, content de sa bonne action.

A vrai dire, le film ne serait pas franchement palpitant s'il n'était qu'une critique du star system et s'il s'en prenait qu'au pauvre Cristiano. Les deux cinéastes américains, qui signent leur premier long-métrage, prennent des voies plus surprenantes et font dévier leur récit vers le fantastique et la science-fiction avec un haut sens de l'absurde et un constant humour. Il est aussi une farce politique où le spectre de l'extrême droite hante les simples d'esprit, les manipule, Tino sera l'objet d'enjeux politiques et scientifiques qui le dépassent.

Rahim n'est pas un adolescent mais une femme nommée Aisha et Aisha aime Lucia (Manuel Guedes) qui se déguise parfois en religieuse. La sexualité est l'un des motifs les plus troublants de Diamantino, son personnage éponyme ignore ce qu'est le sexe, Son corps se transforme comme celui des jeunes garçons sauvages de Bertrand Mandico se transformaient. Il faut voir dans ces films comme une Nouvelle vague sur les cinéma des genres, sexualité et série B comme le renouveau d'un cinéma d'auteur d'économie modeste mais puissant en évocation.

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