Séance
de rattrapage pour finir l'année 2017 avec Tom of Finland que
je n'étais pas allé voir au cinéma lors de sa sortie en juillet.
La dernière fois que j'ai vu un film finlandais, c'était le
chouette Oli Mäki, là aussi sur une figure connue de ce pays
si lointain et si froid. C'est d'ailleurs dans la glace que Tom of
Finland commence, avec toute une ribambelle de soldats qui
prennent un moment de répit pour plonger à poil dans les eaux
gelées d'un lac. C'est la seconde guerre mondiale, Touko Laaksonen
(Pekka Strang) est lieutenant.
Commencer
ce récit, qui court sur quarante ans, par la guerre en Finlande (le
pays lutte contre Staline pas contre l'Allemagne) et le finir par une
autre guerre mondiale, celle du SIDA où Touko est accusé à cause
de ses dessins d'avoir encourager la libération sexuelle, donc
l'épidémie, inscrit son personnage dans un état de lutte
permanente. Le film suit chronologiquement son histoire. La manière
dont il mène une double vie, comment un gringalet timide devient le
dessinateur Tom of Finland.
Il
n'est pas seulement timide, il est totalement accablé par le
conservatisme de l'époque, une société corsetée dans laquelle il
cherche, dans les parcs d'Helsinski, des hommes avec qui passer
quelques moments. Chez lui, il vit avec sa sœur Kaija (Jessica
Grabowsky), ignorante de la sexualité de Touko, elle décide d'avoir
un nouveau locataire Nipa (Lauri Tilkanen), jeune danseur, elle
imagine pouvoir l'épouser. Ce dernier deviendra l'amant de Touko
jusqu'à sa mort.
Touko
est dessinateur dans une agence de publicité et il est photographe à
ses heures. Dans sa petite chambre, il va commencer à dessiner ces
hommes à la virilité exacerbée, l'image du soldat russe, à la
fine moustache, qu'il tue lorsqu'il était soldat ne cesse jamais de
le hanter comme un modèle idéalisé. Dans la rue, il se plaît à
prendre en photo des motards. Lui-même commence à porter un blouson
de cuir, l'imagerie de l'art de Tom of Finland est ainsi expliquée.
Touko
est soumis dans sa vie privée, il subit l'acharnement de la loi et
de la répression. Son premier voyage à l'étranger, à Berlin, où
il espère faire connaître ses œuvres se solde par une arrestation.
Il ne doit son salut qu'à l'intervention de son capitaine d'armée.
Ce capitaine est bien plus prudent dans ses aventures amoureuses, il
joue au chat et la souris avec la police finnoise. Son mariage est
une façade et ses orgies sont des moments de liberté pour Touko et
Nipa.
Sur
les dessins, l'auteur signait de ses initiales TL, il efface le L et
inscrit Tom. Il envoie ses dessins aux USA dans les années 1960, la
grande époque des pseudo magazines de muscu où les personnages
beefcake peuplaient les pages. Encore coincé en Finlande,
Touko devient célèbre aux Etats-Unis grâce à deux jeunes gars,
Doug et Jack adeptes de la musculation et des moustaches. Ils
quittent leur patelin où ils risquent leur vie pour la Californie.
Quand
Touko atterrit enfin en Californie et débarque dans la maison de
Doug et Jack, tout le monde vit comme dans un magazine de Tom of
Finland, c'est la partie la plus forte du film au milieu d'un marasme
sociétal. Soudain trois flics entrent dans la propriété, Touko
pétrifié pense qu'ils sont venus les arrêter, mais non, ils sont
là pour attraper un braqueur de supérette. Touko en profite pour
prendre en photo l'un des flics tandis que tous les autres invités,
en cuir et petite tenue, continue leur ébats sexuels autour d'une
piscine.
Le
combat entre le fantasme, ces hommes aux muscles saillants, aux
grands sourires, au regard puissant et dominateur, et la sinistre
réalité, la répression, la maladie, la soumission est l'atout de
ce biopic où son personnage principal ne sourira jamais. En 2017,
les biographies les plus marquantes (Neruda, Jackie,
Barbara, Le Redoutable et ce Tom of Finland)
furent ainsi, sinistres et désespérées, avec des rayons de soleil.
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