En
cette année 1992, 25 ans déjà, Jackie Chan avait comme concurrents
principaux Stephen Chow et Jet Li. Côté comédie, Royal
tramp de Wong Jing
avait réussi à se hisser au sommet du box office, Stephen Chow,
avec pas moins de cinq films, reléguait Jackie Chan bon deuxième.
Côté action, Jet Li, héros des Il
était une fois en Chine
où il incarne le personnage de Wong Fei-hong s'était disputé avec
Tsui Hark et avait proposé ses services à Wong Jing.
Il
était donc logique que Jackie Chan fasse appel au réalisateur pour
tenter de rester au sommet des entrées. Wong Jing était à cette
époque-là le cinéaste de Hong Kong qui tournait plus vite que son
ombre, il enchaînait les films et faisait des suites à ses succès,
jamais Wong Jing ne s'est embarrassé à faire du bon goût et à
voler des idées à ses petits camarades. L’idée d’adapter en
live Niki
Larson (City
hunter en VO), malgré ses
presque quarante ans, s’est avérée particulièrement rentable.
Jackie
Chan est donc Niki Larson, constamment vêtu de sa veste blanche
qu’il porte sur un débardeur (rouge ou blanc). Niki, comme il le
dit lui-même, n’aime pas une femme, il aime toutes les femmes. Il
vit avec Kaori (Joey Wong), la nièce de son ancien assistant
(Michael Wong) qui demande à Niki de s’occuper de sa nièce mais
de ne jamais la séduire. Tu parles ! Niki Larson est un obsédé
sexuel et il ne pourra jamais résister à la tentation de séduire
la belle Kaori.
Cet
aspect cartoon sera une constante comique du film. A la fois visuel
par les couleurs vives, les raccords cut et des visages
sur-expressifs, et à la fois grâce aux gimmicks sonores qui
illustrent chaque facétie. C'est en début de film avec Michael Wong
que le cartoon est le plus net. La scène de bagarre où les coups
sont inscrits sur l'écran puis quand Michael Wong ne cesse jamais
d'agoniser (ce sera une des rares fois où l'acteur, souvent très
insipide, réussit à faire rire).
Niki
Larson est détective privé et vit dans un garage rempli de
voitures. Il dort sur un hamac et Kaori a bien du mal à le réveiller
de ses rêves érotiques (une horde de jeunes femmes en bikini le
caressent dans une piscine). Il est engagé dans une enquête, dont
on se moque un peu, ce qui compte c'est de rire. La fille d’un
milliardaire japonais a disparu. Il doit retrouver Kiyoko (Gotoh
Kumiko) qui fugue sur un paquebot pour suivre une croisière.
D’ailleurs tout le monde va se retrouver sur ce bateau.
Naori
y va avec son cousin Rocky (Tan Lap-man), un gringalet froussard. On
découvre aussi les autres personnages. Chingmy Yau et Carol Wan sont
deux policières infiltrées pour tenter d’éviter une prise
d’otage. Les terroristes sont forcément américains (Richard
Norton et Gary Daniels), caricatures de méchants au rire sardonique.
Il ne faut pas rater la séance de musculation de Gary Daniels en
slip et cheveux en catogan, sommet de kitsch. Et enfin, Gundam (Leon
Lai), un joueur professionnel qui utilise ses cartes comme armes.
Tout
est mis en place pour délirer complètement. Niki Larson embarque
clandestinement sur le bateau et n’a qu’un souci : trouver
de quoi manger. Le film se déroule en unité de temps et sa
recherche d’alimentation est le meilleur running gag du film. Les
filles doivent donc faire face à sa gourmandise, dans son esprit les
seins se transforment en hamburgers, les bras en ailes de poulet.
Pendant ce temps, le capitaine cherche à la choper pour le mettre
aux fers, il devra donc s’échapper par tous les moyens, se glisser
dans les endroits les plus exiguës, se cacher ici et là.
Jackie
Chan fait preuve d’une agilité constante pour se dérober. Il y
aura aussi quelques combats au corps à corps avec les terroristes
chorégraphiés par Ching Siu-tung. Le meilleur est à la fin dans un
affrontement avec Gary Daniels où les deux acteurs se transforment
en personnages de jeu vidéo et agissent comme tel, rebondissant,
ricanant et portant des déguisements ridicules. Gary Daniels ne
porte pas seulement son slip et Niki Larson devient successivement un
ninja retors et une danseuse sexy, c'est assez dingue !
C’est
sans doute en effet le ridicule des situations qui frappe le plus.
Peut-être que Wong Jing n’est jamais allé aussi loin dans le
mauvais goût. Il fait du personnage de Jackie Chan un homme stupide
et c’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles l’acteur
n’a jamais tourné avec lui une deuxième fois. Contrairement à
Stephen Chow qui a longtemps accepté d’être le couillon de
service dans les films, Jackie Chan tient à son standing et le
résultat est un pur exercice masochiste.
Mais
c’est ce qui fait la qualité du film, un des meilleurs de Wong
Jing, cette volonté d’aller jusqu’au bout du spectateur, jusqu’à
son épuisement. La séquence la plus ridicule est celle avec Eric
Kot et Jan Lam, une séquence sortie de nulle part où les deux
acteurs chantent un rap endiablé en cantonais, avec Chingmy Yau et
Carol Wan en choristes-danseuses. Tout le monde est habillé en short
moulant noir, arbore avec un sourire niais et danse dans les airs sur
la chanson qui s’appelle Happy Happy Gala Gala. Tout un programme.
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