mardi 16 février 2016

Turkish delight (Paul Verhoeven, 1973)

Turkish delight est l'histoire d'un amour fou, passionné et destructeur. Un amour entre Eric (Rutger Hauer, dans le premier des cinq films qu'il tourne avec Paul Verhoven) et Olga (Monique van de Ven). Ils se rencontrent sur une autoroute. Eric, sculpteur, part fâché de son boulot où son patron le traite comme un moins que rien. Parti sans rien, il fait du stop et Olga le prend dans sa voiture. Olga, à la chevelure rousse, a le même tempérament de feu. Ils s'arrêtent à une aire d'autoroute et font l'amour. Quelques kilomètres plus loin, ils ont un accident de voiture. Eric caressait Olga qui voulait enfiler un manteau de vison qu'il lui avait donné.

Olga vit chez papa et maman (Wim van den Brink et Tonny Huurdman), deux commerçants qui voient d'un bien mauvais œil leur gentille petite fille (à peine vingt ans) fréquenter un artiste sans le sou comme Eric. C'est la mère qui est la plus retorse, interdisant l'entrée de leur appartement à Eric, l'accusant d'être responsable de l'accident. Mais il lui en faut plus pour l'empêcher d'entrer. Le père le trouve plutôt sympathique, ils trinquent ensemble et direction la mairie où ils se marient en toute simplicité avant de partir en lune de miel au bord de la mer.

Leur nouvelle vie est très vite réglée. Eric travaille à une nouvelle sculpture qui sera installée dans le jardin d'un hôpital. Olga sera son modèle. La Reine viendra l'inaugurer, au grand dam de son protocole qui craint les débordements du couple qui vient dépenaillé, Olga sans soutien-gorge et Eric avec une chemise ouverte. Paul Verhoeven règle quelques comptes avec la bourgeoisie propre sur elle mais terriblement vulgaire. La scène du repas dans le restaurant chinois, filmée avec un filtre rouge, montre une famille qui fait littéralement vomir Eric.

Le reste du temps, Olga et Eric font l'amour, partout, sans arrêt et avec des orgasmes. Les deux acteurs passent la moitié du film à poil, sans une once de vulgarité, dans leur appartement qui sert aussi d'atelier à Eric. Ils baisent chez les parents d'Olga, dans des chiottes, dans leur lit. Quand ils se déplacent, toujours en vélo narguant les automobilistes, c'est pour se dépêcher d'aller faire l'amour. Eric jette alors le vélo n'importe où, ils courent comme des dératés et se foutent à poil. Paul Verhoeven filme ces scènes de sexe comme la chose la plus pure qui soit et avec un bel humour.

Mais cette pureté a un coût. Dans l'expression amour fou, la folie prend vite le pas sur l'amour. Chez Eric, cela passe par une violence due à sa jalousie extrême. Visuellement, Paul Verhoeven montre cette folie avec les asticots qui obnubilent Eric et qui surgissent devant ses yeux, avec la matière excrémentielle qui lie le couple (belle scène où Eric ramasse la crotte d'Olga qui se croit malade). Eric ira trouver l'inspiration, après une nouvelle séparation, dans une décharge publique. Olga se goinfre de loukoum (ces turks fruit du titre original) pour compenser l'absence d'Eric.

Rutger Hauer déploie une énergie phénoménale pour son personnage de chien fou, d'inadapté social. Avec ses cheveux mi-longs blonds, il fait fortement penser à Klaus Kinski. Monique van de Ven n'est pas en reste dans son incarnation d'une femme enfant coincée entre sa famille et l'amour de sa vie. La partition musicale du film alterne magnifiquement entre une musique guillerette quand tout va bien et des mélancoliques mélopées de l'harmonica de Toots Thieleman quand tout va mal. La subtilité du film est dans ses passages entre la comédie et la tragédie.















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