mercredi 17 février 2016

Barberousse (Akira Kurosawa, 1965)

L'Institut Lumière à Lyon propose dès demain une rétrospective Akira Kurosawa, l'occasion de revenir sur mon film préféré du cinéaste japonaise : Barberousse. Il ne faut pas se fier à la durée du film : il y a des films d'une heure vingt qui semblent interminables. Les trois heures et six minutes de Barberousse, entr'acte compris, valent le coup d'œil et filent sans qu'on s'en apercevoivent.

Le film se déroule au Japon au début du 19ème siècle. Non pas un Japon glorieux peuplé de samouraï valeureux et de geishas évaporées, mais un Japon sale, crasseux, populeux où la pauvreté assaille les villageois. Akira Kurosawa a choisi de placer son film dans un hôpital de campagne, décor quasiment unique du film. Il est tenu par Kyiojio Niide dit Barberousse, interprété par Toshiro Mifune, il doit son surnom à la couleur de sa barbe qu'il gratte de la main quand il réfléchit.

Noburo Yasumoto (Yuzo Kayama), un jeune médecin issu d'une classe sociale argentée a été muté dans cet hôpital. Mécontent, il pressent qu'il risque de briser sa carrière de médecin et il refuse de suivre les cours de Barberousse et n'en fait qu'à sa tête. L'un de ses actes de rébellion est de ne pas revêtir l'uniforme de médecin. Une jeune fille prisonnière d'une maison de geisha depuis son enfance est malade, elle sera recueillie et soignée par Noburo qui en tombera amoureux.

Barberousse suit l'évolution de ces trois personnages et de quelques autres en annexe, les malades qui défilent, les femmes du village. Le récit est d'une grande limpidité où se mêlent flash-back, discours humaniste, combat entre Barberousse et des bandits, romanesque échevelé et romantisme exacerbé. La précision avec laquelle Akira Kurosawa décrit la vie dans un hôpital de campagne, l'aspect documentaire n'est pas contredit par l'aventure amoureuse entre les personnages.

Bien au contraire, elles se répondent l'un l'autre. C'est tout un système d'opposition que met en œuvre Akira Kurosawa dans son film : le sale contre le propre, l'amour contre la prostitution, la jeunesse contre la vieillesse, l'innocence face à la sagesse, les pauvres contre les riches, et bien sûr, la science contre la superstition. Mais, jamais il n'y a de manichéisme édifiant, ni de manipulation du spectateur, ce qui en fait sa grandeur et sa générosité.

Barberousse marque la fin d'une époque chez Akira Kurosawa : c'est sa dernière collaboration avec l'immense Toshiro Mifune. L'acteur était devenu incontrôlable. Ils ne cessèrent de se disputer durant les deux longues années de tournage. Toshiro Mifune obsédé par sa nouvelle position de star et sa carrière à Hollywood refusait que le cinéaste le dirige. Barberousse est aussi le dernier film en noir et blanc d'Akira Kurosawa qui passera à la couleur en 1970 avec Dodes'kaden après cinq années de dépression où il ne tournera pas.















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