jeudi 11 février 2016

La Tour 2 contrôle infernale (Eric Judor, 2016)

Résumé des épisodes précédents. Le duo Eric et Ramzy au cinéma reste et demeure La Tour Montparnasse infernale de Charles Némès (un compagnon de route de l'équipe du Splendid), un film calibré pour le duo où il développait ce qu'on avait pu voir d'eux dans leurs spectacles mais axé sur un solide mais minimaliste scénario, qui a raflé la mise. Puis, la terrible dégringolade de Double zéro par Gérard Pirès (l'auteur du premier Taxi), suivie de celle des Dalton et enfin la rencontre avec Quentin Dupieux, petit prince du surréalisme moderne. Je me rappelle mon ébahissement devant Steak, puis de cette suite de films qu'Eric Judor a fait sans Ramzy Bedia pour Dupieux. Pour enfin arriver, 15 ans plus tard à La Tour 2 contrôle infernale. L'histoire de deux spationautes au cerveau délavé après être passés à la centrifugeuse du centre spatial d'Aix en Provence. Ils deviendront bagagistes à l'aéroport d'Aurly (l'orthographe vient du film).

Trois groupes se distinguent. Le duo Eric et Ramzy, les terroristes et les technocrates. Le mode comique global du film est celui du futur antérieur. Une manière de revisiter le passé, ici nous sommes en 1981, avec les yeux d'aujourd'hui. Les Austin Powers de Mike Myers ou les Ron Burgundy d'Adam McKay et Will Ferrell ont exploré ce futur antérieur. Dans La Tour 2 contrôle infernale cela crée des néologismes pour l'époque que certains s'acharnent à corriger pour cadrer avec leur temps. L'exemple le plus frappant est celui de « cyber-terrorisme » qu'utilise Marina Foïs parce que les terroristes qui attaquent Aurly utilisent un ordinateur, des portables ancestraux et de taille gigantesque et des images 3D. Immédiatement, le ministre de l'Intérieur rétorque que le mot cyber n'existe pas et qu'il faut parler, en se moquant de sa secrétaire, d'ordinateur-terrorisme.

Le film décline ce futur antérieur tout simplement parce qu'il organise les origines de La Tour Montparnasse infernale, exactement de la même manière que les deux trilogies de Star Wars. Il faut faire coïncider entre les deux récits les personnages incarnés par les mêmes acteurs. Eric et Ramzy parlent tout le temps de leur bébés respectifs qu'ils doivent vite aller nourrir (le film est en temps unitaire). Ce seront ces enfants qui seront les laveurs de carreaux en 2001 quand ils auront 20 ans, aussi stupides que leurs parents. Marina Foïs est enceinte jusqu'aux dents et sa fille sera sans doute cette femme qui attaque la Tour. D'ailleurs, pour se placer en 1981, tout le monde fume des clopes autour de cette femme enceinte, parce qu'en 1981, le tabac n'était pas nocif. Quant à Serge Riaboukine, il affirme avoir un frère jumeau qui aura 40 ans dans 20 ans et qui se vengera.

L'humour d'Eric et Ramzy, comme celui du personnage de Philippe Katerine repose sur l'escamotage des mots. En premier lieu sur les noms de leurs personnages. Eric est Ernest Krakenkirk, mais le kirk est muet et on prononce Kraken, Ramzy est Bachir Bouzouk, mais le R final de Bachir est muet lui aussi. C'est un plaisir réel de retrouver ces jeux de mots, certains très élaborés (le plan épervier) certains plus faciles. Philippe Katerine joue avec le plus grand sérieux le chef des terroristes (aux motivations plus que maigres) qui sait à peine parler français, sujet de moqueries de ses sbires qu'il abat à la moindre contrariété. Malgré quelques beaux moments, quelques plans poétiques (le hangar avec les valises suspendues), quelques trouvailles visuelles (le sang qui n'en finit pas de couler des mains de Ramzy), le film manque paradoxalement de liant entre les groupes. Eric Judor n'a pas encore tout à fait percé le mystère du montage, ça viendra si le public lui en laisse l'occasion.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour Jean,

Je viens de découvrir votre nouveau blog!
AU sujet de la tour2controle infernale, vous n'en parlez pas dans votre critique, mais Eric Judor a réalisé la série Platane, où il joue son propre rôle. Il y a d'ailleurs plusieurs épisodes où tourne la suite de la Tour Montparnasse Infernale... dans un aéroport.
La série est pas mal foutue. L'humour développé y est différent de leurs premiers films ou ceux avec Dupieux.
Si vous ne l'avez pas vue, je vous la recommande.