Hans
Gruber veut voler l'argent du milliardaire Takagi et John McLane va
l'en empêcher. Voici l'intégralité du scénario de Piège de
cristal. Cette maigreur narrative était ce que reprochait la
critique de 1988. Par chance John McTiernan est un metteur en scène
de génie et Piège de cristal est un chef d’œuvre de mise
en scène. On prend du plaisir à l'histoire mais on en prend parce
que tout mise sur l'action immédiate dans un axe vertical,
évidemment c'est une tour, et un axe horizontal, plus discret mais
qui décèle parmi les plans les plus beaux du film.
Comme
il avait présenté la vie de John McLane, John McTiernan présente
les étages de la tour. C'est en courant que McLane grimpe les
escaliers passe d'étage en étage du 29e jusqu'au toit. Pieds nus
donc et en marcel, il débarque dans les bureaux d'études de Takagi
où d'immenses maquettes de ses projets architecturaux sont
présentés. Ce sont des endroits idéaux pour se cacher quand
arrivent Gruber et plusieurs sbires, ils ont emmené Takagi. McLane
observe couché (axe horizontal), pistolet à la main prêt à
dégainer, mais Gruber lui vole le geste et abat le milliardaire.
C'est
une nouvelle échappée de McLane vers les étages supérieurs d'où
il peut observer ce qui se passe qui relance l'action. Il lui faut un
maximum de renseignements sur Gruber et sa bande, il lui en sera
donné l'occasion avec une bonne blague (il met l'un des terroristes
dans l'ascenseur) et s'allonge au dessus de l'ascenseur, en le
faisant descendre, John McTiernan combine les deux axes et montre que
McLane domine la situation. Ainsi placé, il peut écouter, en bon
flic, les ordres de Gruber et apprendre combien il a d'hommes dans la
tour.
L'ascenseur
est au centre de cette première partie de chasse à l'homme, McLane
l'emprunte de manière détournée, sur sa trappe puis à l'intérieur
même de ses fondations pour échapper aux hommes, enfin dans les
conduits d'aération, là encore il est couché mais dans un espace
extrêmement réduit, sans lumière naturelle (il allume son zippo).
John McTiernan s'amuse à filmer son acteur dans des jeux de lumières
opposées et donnera l'image la plus iconique du film, John McLane
allongé dans un mouvement horizontal douloureux, face caméra.
Il
est temps de faire intervenir l'extérieur dans cet imbroglio en
huis-clos pour apporter l'aide qui manque à McLane. Au fur et à
mesure qu'il décime les hommes de Gruber, des personnages
s'agglutinent au pied de la tour. Le premier, tout en rondeur, en
circonvolution, à l'allure lente, au physique bonhomme est Powell
(Reginald VelJohnson). Venu faire une ronde après l'alerte de
McLane, il pense à un canular mais un corps jeté du haut de
l'immeuble atterri sur le capot de sa voiture, la première chute
verticale spectaculaire avant celle de Gruber.
Cette
fois le film se partage entre trois lieux, McLane seul dans des
conduits étroits où son débardeur devient noir, où ses pieds
saignent, où il se met finalement torse nu, le dénuement physique
n'est contrecarré que par les prises de guerre, chaque fois qu'il
tue un terroriste, il prend ses armes. En dessous, Gruber perd pied,
ses troupes panique et circulent dans tous les sens, inversant
progressivement les données initiales sur le plan parfait de Gruber
et l'improvisation de McLane.
Troisième
situation, au pied de la tour. La mécanique narrative fait que à
chaque homme de main de Gruber tué par McLane correspond l'arrivée
d'un personnage au pied de la tour. Chacun veut devenir le héros qui
va vaincre Hans Gruber. Robinson (Paul Gleason) le chef-adjoint du
LAPD borné qui brime Powell, le journaliste sans scrupules Dick
Thornburg (William Atherton, déjà un affreux dans SOS fantômes)
et deux agents du FBI Johnson et Johnson (Robert Davi et Grand L.
Bush) variation belliqueuse des Dupont et Dupond de Tintin.
« Il
n'y a que John pour rendre dingues les gens » dit Holly à une
de ses collègues. Outre les flingues et les explosions, McLane
affronte Gruber par joutes verbales via talkie-walkie. Avec sa
propension au sarcasme, il débine le moral de son ennemi peu habitué
au « yippee-ki-yay motherfucker » du flic newyorkais,
devenu le symbole du film. Piège de cristal, sublime
production de Joel Silver a changé le cinéma d'action à Hollywood,
le film a longtemps cantonné Bruce Willis dans ce rôle. Le film a
30 ans, il paraît rajeunir à chaque vision.
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