Avant
de voir Miracle mile, je n'avais jamais entendu parler de ce
film ni de son réalisateur Steve De Jarnatt. Tourné en 1987, sorti
en 1989 ici ou là, oublié pendant 30 ans avant de revenir en juin
dernier en salle en France et aujourd'hui en DVD, Miracle mile a
un acteur connu dans son rôle principal, Anthony Edwards, second
rôle important dans Top Gun sorti l'année précédant ce
tournage et quelques années plus tard, il sera l'un des médecins de
la série Urgences. Mine de rien, ça fait tout drôle de le voir
avec tous ses cheveux.
Le
film commence comme une comédie romantique (mettons à l'image de
Recherche Susan désespéramment, archétype des romances de
l'époque où les deux tourtereaux se rencontrent par hasard). Ici
dans le musée d'histoire naturelle de Los Angeles. Harry Washello,
costume bleu et lunettes rondes, se promène et suit du regard avant
de la suivre tout court Julie Peters (Mare Winnigham), petite bonne
femme pimpante vaguement baba cool. Le générique s'accompagne d'un
petit film sur l'évolution, du big bang jusqu'à la civilisation.
Cette
civilisation de 1988 est celle de la fin de mandat de Ronald Reagan
dont on ne parle pas dans le film mais que tous ses personnages
vivent : la fin de la guerre froide qui va revenir frapper au
coin de la porte d'une cabine téléphonique. Il est est tard dans la
nuit, vers 4 heures du matin, et Harry répond à ce téléphone qui
sonne. Une voix angoissée explique que deux missile lancés depuis
le Dakota du nord vont venir exploser dans une heure à Los Angeles.
Evidemment, Harry n'y croit pas jusqu'à ce qu'il comprenne que cela
pourrait être vrai.
Comment
notre personnage est-il arrivé à 4 heures du matin devant cette
cabine téléphonique qui annonce l'apocalypse ? Par une simple
accumulation de contre-temps. Julie voulait passer du temps avec son
grand-père, conséquence, elle donne rendez-vous à Harry plus tard,
puis elle recule encore le rendez-vous, ils se verront à minuit et
quart devant le restaurant typiquement américain le Johnie's. Pas de
chance pour Harry qui a décidé de faire une sieste, son réveil ne
sonne pas et il se lève avec trois heures de retard.
Le
compte à rebours commence, celui de la fin du monde. L'une des
choses remarquables dans Miracle mile est de filmer toute
cette civilisation qui va disparaître avec l'explosion des deux
bombes atomiques. Le très ancien comme ces mammouths du muséum mais
aussi toutes ces enseignes lumineuses, ces néons, ces publicités
sur les bâtiments et les commerces qui font la particularité de la
ville que le cinéaste filme abondement et ces horloges qui tournent
affirmant l'inexorabilité de l'apocalypse.
Dans
le restaurant, un diner classique où la serveuse (O-Lan
Jones, vue plusieurs fois dans des films de Tim Burton) sert du café
infect aux clients avec lassitude, les clients discutent de tout et
de rien autour du comptoir en forme de L tandis que le chef cuistot
(Robert DoQui, le chef de la police dans Robocop) s'affole de
l'arrivée de Harry et de son discours incohérent. Encore que
personne ne veut l'écouter, ni l'executive woman au volumineux
téléphone portable, ni les deux éboueurs, ni l'homme soûl qui
discute avec un travesti.
Là
encore Steve De Jarnatt prend un soin tout particulier à diversifier
ses personnages et à surtout à ne pas chercher à les caricaturer,
ils forment un Los Angeles où l'on ne dort jamais (et ce sera encore
plus vrai dans une scène ultérieure où Harry et Julie rentrent
dans un centre de remise en forme où l'on fait de la muscu ou de
l'aérobic à 5 heures du matin). Ils finissent par se laisser
convaincre par Harry que deux missiles approchent et qu'il faut fuir
au plus vite dans une confusion des dialogues qui n'est pas sans
rappeler la verve de Howard Hawks.
Le
film entre alors dans sa dernière phase qui consiste à filmer cette
dernière heure de vie. Elle se résume pour Harry à retrouver Julie
qui habite dans un autre quartier. Il faut donc trouver un véhicule.
C'est une course poursuite où les embûches pour se pauvre Harry ne
cessent de s’accumuler dans un comique forcément tragique. Le
comique est accentué par l'ignorance de Julie de la guerre nucléaire
(on ne saura jamais pourquoi elle a lieu) et le tragique avec un
finale comme on n'en verra plus jamais dans aucun film américain et
marqua la fin de la carrière du cinéaste.
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