lundi 31 décembre 2018

J'ai aussi regardé ces films en décembre


Cassando the exotico ! (Marie Losier, 2018)
L'image au bord rond est jolie, venue de la caméra super 16 de la cinéaste, une caméra portée qui permet de suivre le catcheur partout dans un portrait rigoureux et imaginaire. Imaginaire car parfois la cinéaste s'embringue dans quelques scènes expérimentales calées comme des pauses entre la chronique de Cassandro. L'image est accélérée, elle part dans tous les sens, elle décadre le sujet dans une visée artistique. Rigoureux parce que ce film sur le plus célèbre catcheur gay qui bosse depuis 27 ans sur les rings du Mexique et des USA raconte beaucoup de choses en peu de temps (le film fait à peine 75 minutes). Cassandro évoque son passé : ancien toxico, alcoolique, il parle de ses nombreuses opérations consécutives aux blessures pendant les matches, il se recueille sur la tombe de sa mère qui lui appris le maquillage, il parle de son père avec qui il s'est longtemps disputé et qui est son meilleur ami depuis quelques années. Cassandro raconte sa vie avec sourire, une vie foutraque et trépidante, colorée et bigarrée avec ses costumes extravagants et sa coiffure que Régine portait dans les années 1980. Parfois Cassandro déprime, il demande à Marie Losier d'éteindre la caméra – ce qu'elle ne fait pas forcément – ils discutent sur skype, il veut tout arrêter. Et la séquence suivante, il reprend du poil de la bête. La générosité de Cassandro est infinie, elle est montrée dans toute sa splendeur lors de la tournée européenne. Il donne des cours de catch à des jeunes catcheurs, il se donne sans compter, avec une joie d'apprendre les meilleurs coups comme les meilleures esquives. Le catch de Cassandro, ça n'est pas du cinéma, c'est très beau.

Wildlife (Paul Dano, 2016)
C'est marrant comme ce premier film de Paul Dano est à l'image de l'acteur, totalement sans aspérité mais sans une seule faute de goût. Tout est bien raconté, les acteurs jouent bien, le décor est bien exécuté, la tension entre les personnages est palpable, l'époque est reconstituée sans ostentation mais avec précision, quelques thématiques de cinéaste d'auteur se dégagent mais en fait de compte Wildlife regorge de tout ce que je n'ai pas envie de voir. Le film a pourtant fait l'ouverture de la Semaine de la Critique à Cannes cette année. La sagesse est l'une des choses les plus ennuyeuses au cinéma.

Miraï ma petite sœur (Mamoru Hosoda, 2018)
Le parti pris formel radical de Miraï ma petite sœur consiste à confiner le récit dans un espace clos, une petite maison au beau milieu d'une zone pavillonnaire d'une grande ville du Japon. Papa est architecte, c'est lui qui a dessiné cet étrange appartement en triplex, maman vient de donner naissance à la petite Miraï et Kun le fils aîné, 4 ans tout juste, est jaloux comme un pou. La petite famille vit avec le chien Yukko. Ce confinement semble sonner comme un appel aux critiques et aux spectateurs pour rappeler que Mamoru Hosoda est l'anti Miyazaki, qu'il faire un film entre quatre murs. Le pari est à moitié réussi. Dès que Kun se met dans une colère noire, il sort dans le jardin et se met à voir le futur (d'abord avec le chien Yukko qui devient un prince mystérieux, ensuite avec Miraï adolescente) dans la première moitié du film puis découvre le passé (de sa mère, son père, son grand-père). Le tout a pour but de montrer comment un enfant se construit. Ce récit programmatique un peu répétitif et presque trop édifiant. Le moment le plus émouvant est précisément quand le film sort de ce cadre, dans le parc quand Kun apprend à faire du vélo.

L'Empereur de Paris (Jean-François Richet, 2018)
Le film se rêve en parangon de film d'action français de qualité. Puisqu'il faut bien le reconnaître que depuis Le Pacte des loups des Christophe Gans, c'est-à-dire depuis 2001, un siècle, une génération de cinéphiles entière, rien n'a vraiment existé. Vincent Cassel 18 ans plus tard joue plus essoufflé que jamais, comme si c'était la norme pour créer la tension. Les scènes d'action sont filmées en gros plan, comme le faisait Ridley Scott lors de son pénible Gladiator, c'est dire la ringardise du film et l'ennui profond qu'il distille petit à petit au fur et à mesure des retournements de situation plus improbables et incohérents les uns que les autres. Tout le monde joue en hurlant ses dialogues, surtout les hommes aux visages atrocement grimaçant, palme du cabotinage à Denis Lavant qui semble le seul à comprendre le ridicule de la mise en scène de Jean-François Richet. Tous les acteurs ont le double de l'âge des actrices qui elles semblent sortir de chez le dentiste et le coiffeur. Ce contraste physique s'appelle du sexisme. Ce cinéma est vraiment tombé bien bas.

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