lundi 14 septembre 2020

Trois films d'Agatha Christie


Je fais une petite halte dans les films adaptés des romans d'Agatha Christie, c'est l'un de mes minuscules pêchés mignons – tout ça remonte à une histoire familiale, ma mère était fan, je lui montrais les films. J'ai déjà écrit sur Le Crime de l'Orient Express de Sidney Lumet, le meilleur de tous, Hercule Poirot est incarné par Albert Finney et, très rapidement, sur Meurtre au soleil. Là, je me suis enfilé Ten little Indians de Peter Collinson (1974), Mort sur le Nil de John Guillermin (1978) et Le Miroir se brisa de Guy Hamilton (1980). Agatha Christie revient à la mode, par l'esprit parfois (A couteau tirés de Rian Johnson), dans de nouvelles formules hélas réalisées par Kenneth Branagh (Mort sur le Nil sort en octobre).








On le sait, ce qui importe dans les Agatha Christie, ce n'est pas de deviner l'identité du criminel, c'est impossible et vain surtout, mais ce sont les acteurs. Les 10 acteurs de Ten little Indians (titré Dix petit nègres) reflètent l'origine de la co-production pan-européenne du film, Charles Aznavour (le premier à mourir), Stéphane Audran, Richard Attenborough (presque toujours filmé en contre-plongée) Oliver Reed et d'autres vedettes de l'époque. Tout est filmé en huis-clos, en Iran avec une idée qui aurait pu être originale, l'action est contemporaine de sa réalisation, pas de costumes, de robes de soirée pour les personnages. C'est bien dommage car c'est cela aussi qui est amusant, ce jeu de galeries où chacun campe dans sa classe sociale. Le film est terriblement ennuyeux, très statique et paradoxalement le plus vieillot de tous.













Sans doute parce que Albert Finney ne voulait pas jouer à nouveau Hercule Poirot, c'est Peter Ustinov qui reprend le rôle dans Mort sur le Nil. Il est moins guindé que son prédécesseur, n'hésite pas à rire de lui-même mais conserve son attitude prétentieuse (il sait qu'il est le seul à résoudre l'énigme). La plus grosses différence est que Peter Ustinov parle français, il peut sortir quelques phrases au milieu de son anglais. Là aussi le huis-clos est important, comme dans Meurtre au soleil en 1981, dans un bateau à aubes qui fait une croisière sur le Nil. Une jeune héritière est assassinée pendant le trajet. Hercule Poirot qui a toujours son oreille dans tous les coins va se charger de trouver qui a commis le crime. Bien évidemment, comme Le Crime de l'Orient Express, comme dans Meurtre au soleil, tout le monde se connaît, tout le monde a un mobile.

Dans Le Miroir se brisa, la formule subit une variation, Angela Lansbury est Miss Marple. Elle a une particularité, elle ne se rend jamais sur le lieu du crime, elle n'interroge jamais les témoins et éventuels suspects. Elle reste chez elle à boire son thé et faire du tricot et tire les vers du nez à sa petite bonne comme à son neveu, inspecteur de police de Scotland Yard dépêché sur place pour l'enquête. C'est dans ces échos que se jouent toujours les avancées et progrès de l'enquête, c'est d'autant plus amusant d'entendre des éléments qui forment ce petit puzzle. C'est un jeu de piste où Elizabeth Taylor, Tony Curtis, Rock Hudson et Kim Novak sont dans une petite ville anglaise pour tourner un film holywoodien. Les personnages de Kim Novak et Elisabeth Taylor se détestent cordialement et s'envoient des horreurs l'une l'autre. Là aussi est le petit plaisir de ces films, entendre des mesquineries par ces vieilles stars hollywoodiennes.
















Les films ne manquent jamais d'humour, cela aussi est très appréciable. Ne serait-ce que parce que Elizabeth Taylor et Kim Novak jouent des parodies d'elles-mêmes, elles sont engoncées dans des costumes un peu ridicules, elles sont imbues d'elles-mêmes. Angela Lansbury dans la toute première séquence du Miroir se brisa, regarde un film projeté dans son village, la pellicule crame mais elle annonce aux autres spectateurs qui est l'assassin, elle a déjà deviné grâce aux indices laissés par le récit. Hercule Poirot n'est jamais en manque d'aphorismes qui laissent perplexes ses interlocutaurs. Mais ce sont les duos qui amusent le plus entre le détective belge et les suspects. Angela Lansbury joue une vieille alcoolique dans Mort sur le Nil, elle titube à chaque scène, ce sont deux interprétations totalement opposées.

Je parlais plus haut des costumes, les actrices sont toujours hautes en couleur. Bette Davis est en vieille dame respectueuse qui martyrise sa « bonne », sa femme à tout faire, elle habillé en garçonne. C'est Maggie Smith qui fait cette bonne désargentée obligée de travailler pour son acariâtre, dans Meurtre au soleil, elle sera au contraire très lumineuse. Jane Birkin est dans les deux films, une bonne dans Mort sur le Nil, une mondaine dans Meurtre au soleil. Tout le monde ment dans ces films, tout le monde a quelque chose à cacher, tout le monde commet des minuscules erreurs. Hercule Poirot est là pour traquer ces mensonges, erreurs, cachettes, parfois aidé par un vrai policier (David Niven dans Mort sur le Nil) qui ne comprend pas la complexité de toutes ces gens. Même quand on sait déjà qui est l'assassin, il subsiste ce plaisir désuet de voir toute cette machinerie à l’œuvre. Moi j'aime bien ça.

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