jeudi 11 avril 2019

Olivia (Jacqueline Audry, 1950)


Largement oubliée aujourd'hui, Jacqueline Audry a pourtant l'honneur d'avoir été la première femme française à réaliser et mettre en scène un film de long-métrage parlant, cela quelques années avant Agnès Varda et quelques décennies après Alice Guy et Germaine Dulac pionnières du cinéma qui n'ont œuvré que dans le cinéma muet. De Jacqueline Audry, je n'avais vu avant cet Olivia que Gigi tourné avant Vincente Minnelli (les deux films sont également pénibles) et Huis-clos diffusé l'automne dernier sur Arte, avec Arletty dans le rôle de la tentatrice. Olivia vient de ressortir et il est projeté dans quelques salles pour le Festival Play It Again.

Autant le dire, je ne connais pas beaucoup ce cinéma français qui va de la fin de guerre à la Nouvelle Vague, soit une quinzaine d'année où le divertissement primait sur la mise en scène. Ce que Truffaut et ses amis des Cahiers du cinéma appelaient l'Académisme est bien présent pendant la durée d'Olivia, une reconstitution de l'époque où se déroule le récit, grosso modo au début du 20e siècle. Le film se contente d'un seul décor, une maison bourgeoise de Fontainebleau, plusieurs étages où les jeunes filles du pensionnat circule au gré des amitiés et inimitiés qui se forgent lors de l'année scolaire d'Olivia.

Pour moi, il faut un temps d'adaptation avec le phrasé de 1950, cette manière de diriger les actrices, un peu compassée, très sérieuse avec une volonté d'insister sur le mots dans les dialogues, histoire de mieux accentuer le sens des répliques. Le film a une importance singulière puisqu'il décrit des amours interdites, Olivia tombe amoureuse de sa préceptrice Mademoiselle Julie (Edwige Feuillère), sans comprendre ce qui lui arrive. Le roman publiée quelques temps auparavant avait évidemment fait scandale et son auteure avait dû le signer avec un pseudonyme. Jacqueline Audry elle signait bien ses films où elle magnifiait les amours lesbiennes.

Il existe pourtant un lieu où Olivia et trois de ses camarades de classe partent régulièrement se réfugier, la forêt. Le spectateur n'a pas le droit de découvrir cette forêt, il n'en entend que du bien dans la bouche de ses personnages. La forêt est le lieu où Mademoiselle Julie passait le meilleur de son temps avec Mademoiselle Cara (Simone Simon) malade depuis que Julie ne veut plus aller dans la forêt avec elle. Le film fonctionne ainsi, des jeunes filles propres sur elles, aux robes corsetées (les tenues sont incroyables) qui ne rêvent que d'émancipation sous les regards intenses des préceptrices.

Il n'y a guère que Mademoiselle Dubois (Suzanne Dehelly) qui ne semble pas vraiment comprendre de quoi il retourne. Elle est professeur de mathématique mais ne comprend rien à l'algèbre, seul l'intéresse la nourriture, elle mange sans arrêt avec la complicité de Victoire (Yvonne de Bray) la cuisinière de la pension, une garçonne au caractère bien trempé, qui voit dans cet appétit féroce sa frustration sexuelle, le tout sous des atours comiques plutôt bien vus. Le film lance ainsi diverses métaphores sur la sexualité, sur le refoulé et sur la frustration dans la France de l'époque, certes c'est un peu appliqué mais pour 1950 cela devait être fort.

Aucun commentaire: