jeudi 25 avril 2019

La Valise (Georges Lautner, 1973)

Rendre un court hommage à Jean-Pierre Marielle en regardant La Valise peut paraître étonnant vu que ce n'est pas son meilleur film. Depuis la mort de l'acteur, les réseaux sociaux que je fréquente, les sujets radio que j'entends, donnent une réalité de ce que Jean-Pierre Marielle a réalisé en 40 ans de carrière au cinéma. Ils sont finalement peu nombreux à pouvoir se targuer d'apparaître presque toujours avec un visage unique et d'avoir joué des rôles si différents. Cette moustache au milieu de son visage, bien plus imposante que celle de son acolyte Jean Rochefort, était somme toute le centre du génie de son jeu.

On a beaucoup cité son personnage de musicien janséniste dans Tous les matins du monde d'Alain Corneau, beaucoup moins celui de gros beauf libidineux d'Un moment d'égarement de Claude Berri, on a beaucoup entendu des répliques merveilleuses des films de Joël Séria avec lequel il a fait plusieurs films dont l'émouvant et anarchiste Les Galettes de Pont-Aven. Ce qui ressort chaque fois est l'émotion de sa voix caverneuse dans les drames où il prêtait son corps et la délicatesse avec laquelle il parvenait à sortir les pires horreurs. On a entendu de nombreuses de ses répliques, quelques dialogues cocasses depuis deux jours.

Les deux touchent au sublime dans Tenue de soirée de Bertrand Blier. La scène mérite d'être décrite par le menu tant ce qu'il produit autour de Gérard Depardieu, Miou Miou, Michel Blanc et Caroline Silhol est digne des plus grands. Depardieu et sa bande ont cambriolé chez Marielle, un type dépressif. Ce dernier leur offre le couvert. Puis le trio veut partir mais Marielle, avec regret, sort son flingue car il veut avec sa femme une partie fine. Tous refusent mais Jean-Pierre Marielle sort à Depardieu avec un vouvoiement et un naturel que seuls les films de Blier produisent ceci : « Moi j'veux vous voir baiser ma femme, un par devant, un par derrière, Pendant ce temps-là, j'vous enculerai. »

L'acteur avait alors 54 ans et une ribambelle de succès parmi eux La Valise. Rien à voir avec le jeu de RTL mais c'est un film d'espion comme seule la France en concevait, en parodie romantique. Trois espions, trois pays, trois cultures et une seule femme, Françoise (Mireille Darc) artiste de cabaret que le commandant Bloch (Jean-Pierre Marielle), des services secrets israéliens rencontre à Tripoli. Or les Libyens ne sont pas franchement amis avec les israéliens, ou les israélites ou les juifs comme le dit le capitaine Augier (Michel Constantin). Ce dernier travaille pour la France et doit sortir Bloch de son pétrin : il s'est réfugié dans l'ambassade de France et il sera exfiltré par la valise diplomatique. Soit une vraie valise, une énorme valise qu'il va trimballer pendant tout le film.

Seulement voilà, rien ne se passe comme prévu, sans quoi le film n'aurait qu'une courte durée et serait un simple reportage sur l'espionnage. La première galère vient d'une grève à l'aéroport. Retour à l'hôtel où Bloch a rencontré Françoise. Il commence à raconter à Augier dans plusieurs flash-backs comment il l'a rencontrée, comment il l'a séduite, comment il en est tombé amoureux. La jalousie gangrène sa tranquillité voilà la nouvelle galère. Il demande à Augier d'aller la surveiller et ce qui devait se passer se passe, Augier tombe lui aussi amoureux de Françoise. Comme plus tard le milliardaire grec Baby (Michel Galabru) puis le lieutenant de l'armée égyptienne Abdul (Amidou), le tout à travers la Libye, la Tunisie et l'Egypte.


Ce qui compte dans les rapports entre les hommes et la femme ce sont les disputes continuelles qui entraînent des quiproquos, des retards dans leur itinéraire. On se déplace en voiture, en jeep, en avion, en chaloupe. Chaque fois, ce pauvre Bloch est obligé de se réfugier dans sa valise, coincé comme un couillon, engoncé et chaque fois, il peste comme un beau diable en sortant un complainte sonore particulièrement douloureuse, un « oïe yoïe yoïe yoïe » que seuls la voix et le ton de Jean-Pierre Marielle a pu créer. Ce son est hilarant, il apporte une drôlerie irrésistible à une histoire particulièrement cocasse surtout quand le cinéaste et son scénariste Francis Veber lorgnent un peu trop du côté du burlesque franchouillard facile. Logiquement ce plus qu'apporte Jean-Pierre Marielle méritait qu'il reçoive le dernier plan du film.

























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