jeudi 23 août 2018

1941 (Steven Spielberg, 1979)

1941 est largement le mal aimé de la filmographie de Steven Spielberg, tourné entre Rencontres du troisièmes type et Les Aventuriers de l'arche perdue (mal aimé dans la première décennie de sa filmographie, je pense que personne n'aime Le Terminal). 1941 est le cas unique de comédie burlesque et peut-être est-ce que j'aime autant ce film parce qu'il ressemble beaucoup au style de Robert Zeemckis qui en a écrit le scénario avec son comparse Bob Gale. On retrouve quatre acteurs de Crazy day, le premier film de Robert Zemeckis dans quatre rôles principaux (Nancy Allen, Bobby Di Cicco, Eddie Deezen et Wendie Jo Sperber).

C'est un cas de récit explosé comme on en voit rarement dans le divertissement, aucun personnage principal mais plusieurs groupes (celui des bidasses dirigés par Dan Aykroyd avec Treat Williams, Frank McRae, John Candy et Mickey Rourke), des duos (Nancy Allen et Tim Matheson / Eddie Deezen et Murray Hamilton / Dianne Kay et Wendie Jo Sperber / Bobby Di Cicco et Perry Lang) et des solos (John Belushi, Robert Stack, Slim Pickens). Chacun a sa partition comique, son rôle dans le récit mais le tout est de faire mélanger ces individualités, de les faire passer d'un ensemble à un autre et des les voir réagir face à l'arrivée des Japonais (le duo Toshiro Mifune et Christopher Lee).

Tout se déroule en une seule journée à Los Angeles, le 13 décembre 1941, une semaine après l'attaque de Pearl Harbor. Dans les rues, les décorations de Noël sont déjà installés (guirlandes et Père Noêl gonflables), au cinéma on projette Dumbo (le général que joue Robert Stack veut le voir et en connaît les dialogues par cœur), les soldats se préparent à une grande soirée dansante où ils pourront flirter avec les jeunes femmes. Mais l'armée craint une invasion des Japonais par l'air, mais c'est par sous-marin qu'ils vont arriver (première scène en parodie des Dents de la mer). Ils veulent attaquer Hollywood et se retrouve vers San Monica.

De la manière que les groupes de personnages sont disparates, l'action a lieu sur plusieurs lieux. Si l'action finale a lieu au bord de l'océan – comme elle avait commencé (dans le parc d'attractions et sur la falaise dans la maison de la famille Douglas), les protagonistes se déplacent tout au long de la nuit dans un mouvement qui apparaît sans aucune coordination, manière de décrire le chaos de la guerre surtout quand elle n'a même pas lieu avec une volonté démiurgique de faire non seulement exploser les groupes de personnages pour mieux les recomposer mais aussi de faire exploser les décors qui ont jusque là abrité ces personnages, dans la grande tradition des films de guerre épiques, le genre préféré de Robert Zemeckis.

Film de guerre mais avant tout film comique. Celui qui se donne à fond est John Belushi en pilote d'avion dégénéré qui voit des Japs partout. Cigare au bec, vitupérant, il traverse le ciel et trouvera plus barré que lui, le capitaine Maddox (Warren Oates), qui porte bien son nom. Mis au placard par le général Robert Stack, Maddox voit aussi des ennemis partout. Dans le genre timbré, Robert Stack est pas mal mais joue inversement à John Belushi, il retombe en enfance (il regarde Dumbo), il ne semble pas se préoccuper de l'invasion quand les deux autres semblent espérer cette invasion japonaise histoire de redorer leur blason et de justifier les déferlements de mitraillettes, la guerre est pour eux un jeu d'enfants. Bref, les militaires sont des gamins.

Dans le même genre de facéties, le duo que forment Donna (Nancy Allen) et Loomis (Tim Matheson) se détache du récit. Donna est l'assistante du général, Loomis est un sergent. Il n'a envie que d'une chose, pour coucher avec elle. Elle n'accepte que dans un avion, en plein vol. Seulement voilà, il a été viré de l'académie de pilote. Mais cela ne l'empêchera de faire toutes les bases aériennes pour trouver un coucou. Là encore, les personnages dans les hautes sphères de l'armée américaine planent à mille lieux, incapables de prendre des décisions rationnelles, ils n'agissent que pour leur propre compte (un film, une baston, un coup en l'air) et chacun d'eux apportera sa part dans le chaos qui se prépare au centre de Los Angeles.

Inversement, on suit le parcours d'un jeune gars, Wally (Danny Di Cicco), cuistot le jour et danseur la nuit. Assez vite, il va attiser la haine de Stretch (Treat Williams, très loin de son rôle de hippie antimilitariste dans Hair), un soldat bas de plafond qui veut danser avec la petite amie de Wally. Au milieu de toutes ses micros batailles, celle entre Wally et Stretch occupe l'ensemble du film, une course poursuite totalement inspirée de celle de personnages de cartoons (Tom et Jerry ou Bip-bip et le coyote) avec son climax, la soirée danse et la baston qui la suit. Ce sont eux qui tiennent le film, du petit boui-boui où les disputes commencent jusqu'à la maison des Douglas. 1941 est un éloge du cinéma burlesque déguisé en film de guerre, c'est brillant et subtilement hilarant.



























Aucun commentaire: