Il
y a tout juste 50 ans, Jean-Luc Godard s’apprêtait à commencer le
tournage de Week-end, le couple vedette était tenu par Jean
Yanne et Mireille Darc. Elle racontait dans son livre de souvenirs
(les propos sont rapportés dans la biographie d'Antoine de Baecque
consacrée à JLG) que c'est elle qui était allée rencontrer le
cinéaste pour changer de registre, puis que le tournage fut fort
difficile, que Godard l'humiliait sans cesse, la faisait lambiner
avant de lancer « moteur », qu'il l'avait fagotée dans
des tenues étriquées. Week-end est une bizarrerie
godardienne, coincée entre La Chinoise et Le Gai savoir,
eux filmés avec sa garde rapprochée (Jean-Pierre Léaud, Juliet
Berto et son épouse Anne Wiazemski) et amorçant son virage
gauchiste.
Mireille
Darc est souvent filmée de loin dans Week-end, en plans très
larges. Jean-Luc Godard la mettait en scène à contre-emploi de tout
ce qu'elle a fait jusqu'alors, c'est-à-dire essentiellement des
rôles de femmes de tête. Mes deux films préférés de Georges
Lautner, son cinéaste de prédilection, sont Les Barbouzes et
Ne nous fâchons pas. Entourée de Lino Ventura, Francis
Blanche, Bernard Blier et Charles Millot, ainsi que des visites
rutilantes de Jess Hahn, elle joue dans le premier une veuve
soi-disant éplorée. Elle fait tourner chèvre tous ces espions
venus s'emparer de brevets. Comme dans tout film du duo Lautner
Audiard, ce sont les répliques qui valent plus que les situations et
surtout les numéros de cabotinage, comme dans Ne nous fâchons
où elle est censée être l'épouse de Jean Lefebvre.
L'image
la plus célèbre de Mireille Darc vient du Grand blond avec une
chaussure noire, encore un film d'espionnage mais moins
parodiques que ceux de Georges Lautner. Elle apparaît face à Pierre
Richard dans une longue ronde terriblement échancrée où tout son
dos est découvert jusqu'au bas des reins. Elle s'appelait Christine
et elle allait ensuite mettre quelque chose de plus confortable.
L'idée du film, contrairement aux personnages de Georges Lautner,
était de mettre un élément perturbateur mais calme dans l'univers
bourré de quiproquos de Pierre Richard, le chien fou incapable de
séduire l'une des rares actrices blondes du cinéma français. Elle
avait ne coiffure et un nez incomparables, une diction et une voix
lente un peu hésitante, un jeu à la limite du faux. Elle avait
arrêté le cinéma en 1986.
Dans
l'ordre : Le Grand blond avec une chaussure noire (Yves Robert,
1972), Week-end (Jean-Luc Godard, 1967), Les Barbouzes (Georges
Lautner, 1964), Ne nous fâchons pas (Georges Lautner, 1966)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire