jeudi 12 décembre 2019

Quand l'inspecteur s'emmêle (Blake Edwards, 1964)

Faisons les comptes : ou plutôt laissons le commissaire Dreyfuss (Herbert Lom) faire les comptes, c'est ce à quoi il procède à la toute fin de Quand l'inspecteur s'emmêle en s'adressant rouge de colère violente à son subalterne l'inspecteur Jacques Clouseau. C'est rare dans une comédie à forte tendance burlesque d'arriver à un tel nombre de morts, que des assassinats avec différentes armes et différentes méthodes, toutes expéditives. Le mort tombe raide sans passer par la case ambulance.

L'ouverture de Quand l'inspecteur s'emmêle, une vraie fausse suite de La Panthère rose, commence en France dans le château cossu d'un dandy (George Sanders qui semble un peu perdu, il ne doit pas avoir compris le scénario). Un long plan séquence de nuit à l'extérieur, un ballet des habitants de cette demeure s'amorce, maîtres et domestiques passent d'une pièce à l'autre, empruntent un escalier puis un couloir, se croisent et s'évitent. Enfin un coup de feu part et voici le premier mort.

Dreyfuss ne comprend pas pourquoi Clouseau a été mis sur cette affaire. Nous non plus d'ailleurs. C'est le début d'un gag récurrent du film, comme de la série, le commissaire se voit soudain souffrir d'un tic nerveux embarrassant : son œil gauche ne cesse de cligner au fur et à mesure de l'enquête. La colère de Dreyffus et sa haine envers son inspecteur croit proportionnellement au nombre de morts qui s'accumule. D'autant qu'il a l'impression que personne ne l'écoute.

Dreyffus a beau dire à ses supérieurs que Clouseau est une calamité, il revient chaque fois sur cette enquête. Même quand il se retrouve au poste après avoir pris en filature la suspecte N°1, mademoiselle Maria (Elke Sommer). Clouseau est persuadé d'être le roi du déguisement, mais les policiers qui patrouillent ici et là qui le surprennent ne sont pas de cet avis. Autre gag récurrent : Clouseau dans un panier à salade qui passe chaque fois dans la même rue.

Maria la bonne du château a été retrouvée avec un revolver à la main le soir de ce meurtre et pile en face du mort. Tout le monde l'aurait condamnée – et tous la condamnent d'ailleurs – sauf Clouseau convaincu de son innocence. Seulement voilà, les morts dans ce château s'accumulent. Chaque fois Maria a l'arme du crime dans la main. Chaque fois Clouseau reste convaincu de son innocence. Voilà pour un troisième gag récurrent.

L'amour, l'amour le tient. Il en fait des choses pour sa jeune femme blonde. Il va faire du naturisme (à l'époque et dans le film on dit nudiste). C'est toujours marrant les gens tous nus, ça mange pas de pain, c'est pas voyeuriste (le film est sorti la même année que Le Gendarme de Saint-Tropez autre réflexion comique sur les nudistes.). Ensemble, ils vont aussi beaucoup au spectacle (ballet russe, flamenco etc). Chaque fois un mort. Le spectacle est tuant.

Autant Clouseau minaude avec Maria autant avec tous les autres personnages il est odieux. Avec tous ces assassinats, c'est aussi le grand paradoxe du film de Blake Edwards : le rire vient d'un personnage particulièrement antipathique, souvent insupportable, persuadé d'avoir tout vu, tout connu, tout fait, il ne comprend pas qu'il traite son majordome Kato (Burt Kwouk) tout comme son inspecteur adjoint Hercule (Graham Stark) comme des demeurés.

Finalement Clouseau est détestable, le visage de Peter Sellers quand il parle aux autres surtout à tous ses suspects dans le finale qui rappelle ceux des romans d'Agatha Christie. Il est cassant, son visage se ferme et son regard se fait glacial. Par rapport à La Panthère rose, le ton de Blake Edwards s'est durci et les misères subies par les autres (marcher sur les pieds, faire se détruire Dreyfus à petit feu), il en fait porter la responsabilité aux autres.


Et ce nombre de morts. Le plus gros gag du film est finalement que l'on ne sait même pas qui a tué cet homme dans la première scène (c'est sans doute expliqué dans la dernière scène mais j'ai déjà oublié, comme chaque fois que je regarde le film). Là encore, Blake Edwards déjoue l'attente du spectateur, il préfère le raffinement de la préparation des crimes quand Maria et Clouseau vont aux spectacles que le nom du tueur. Mais encore une fois, le nom on le connaîtra. Et les morts : 14 si j'ai bien compté.






















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