mercredi 1 mars 2017

Les Oubliés (Martin Zandvliet, 2015)

Quand j'ai vu Les Oubliés, le film s'appelait encore Land of mine et il n'avait pas encore nominé à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère (en l'occurrence, du danois, de l'allemand et quelques phrases en anglais). Certes, le film a raté l'Oscar mais il sort aujourd'hui, soit tout de même 9 mois après son passage à Ecrans Juniors, une sélection de films mettant en scène des personnages jeunes et présentés en marge du Festival de Cannes et à destination des lycéens. Sur l'écran, les personnages ont donc l'âge des lycéens qui étaient dans la salle, une salle pleine et silencieuse.

Ces oubliés (évidemment tirés d'une histoire vraie, comme tous les films en ce moment) sont de jeunes soldats allemands. Et quand j'écris jeunes, il faudrait dire que ce sont des adolescents. Dans les derniers temps de la deuxième guerre mondiale, Hitler et ses sbires, voyant la défaite arriver à grands pas, forcent les plus jeunes hommes d'Allemagne à intégrer l'armée du Reich. Ce sont des gamins, ils peinent à rentrer dans les uniformes gris trop grand pour eux, ils ont encore des boutons sur leurs visages juvéniles.

L'air hébété, ils sont accueillis par les vainqueurs qui ont désormais tous les droits sur eux. Le temps de la vengeance des Danois est arrivé, avec son lot d'humiliation. Ce sont les adultes qui punissent ces pauvres gamins comme s'ils étaient des criminels de guerre. C'est cette injustice qui frappe le plus dans le début des Oubliés, entre l'innocence des anciens bourreaux (ou vus comme tel) et de l'accusation des anciennes victimes (qui vont se rendre justice eux-mêmes). Le boulot de ces jeunes soldats : enlever les mines des plages danoises.

Avant d'envoyer les gamins sur la plage avec le gros risque qu'ils se fassent sauter, c'est l'heure de l’entraînement, c'est le moment de l'apprentissage du dégoupillage des mines. Des leçons données par un officier méprisant avec sévérité, avec un taux de cruauté certain et avec un espoir de sa part de voir les gamins exploser. Et c'est ce qui va arriver. Il faut convenir qu'il est assez rare pour un film de faire mourir des adolescents et les scènes font preuve d'une certaine dureté et d'une volonté de réalisme.

Le cinéaste danois suit ensuite ces jeunes soldats dans l'accomplissement de leur tâche. Ils sont parqués dans une cabane en bord de mer. A côté, une ferme avec une fermière veuve et rancunière et sa fillette. Le soldat danois qui garde les allemands va manger à la ferme, il est d'abord sourd aux conditions de vie des adolescents, il est dans la même position que l'officier, que cette fermière. Tout le monde regarde de haut les Allemands qui ont faim, froid et peur, tel ce sergent britannique qui humilie l'un d'eux en lui pissant dessus.

Bien que cousu de fil blanc, Les Oubliés est prenant et surprend par sa franchise et sa mélancolie. Le garde chiourme va bien entendu s'attacher à ces jeunes. Les personnalités de chacun s'affirme au fur et à mesure, mention spéciale aux jumeaux. Leur destin est tragique, les explosions dramatiques accélèrent l'émotion et l'empathie. L'enjeu est de savoir qui tiendra jusqu'au bout, qui survivra jusqu'à la promesse de l'officier de les laisser rentrer chez eux une fois la plage déminée. Hélas, les promesses n'engagent que ceux qui y croient.

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