jeudi 22 octobre 2020

...à Valparaiso (Joris Ivens, 1963)

Je connais moins l’œuvre documentaire mais poétique de Joris Ivens que les films documentaires et politiques du cinéaste néerlandais, alors voici ...à Valparaiso (avec des points de suspension avant le à, pour appuyer sur l'idée de l'attente, de la surprise. Valaparaiso ville portuaire du Chili, c'était filmé avant Allende, avant Pinochet, mais de toute façon le film n'est pas politique, il décrit cette vallée du paradis, puisque c'est la traduction de Valparaiso, on s'amuse du commentaire de Chris Marker sur les images de Joris Ivens

« Un regard calme, courtois, ami ». C'est ainsi que la voix off décrit le point de vue sur la ville et les habitants. C'est ce qu'on entend au milieu du film. Jusque là Joris Ivens et Chris Marker joue à la fois sur la grande histoire et l'anecdotique, sur le passé glorieux du port chilien jadis passage obligé pour aller de l'Atlantique au Pacifique, joyau de l'Amérique du sud, ça c'était avant la construction du canal de Panama par les Etats-Unis (on voit une caricature comme celles qui illustrent les livres d'histoire), on voit les gravures de la colonisation.

Tout ça c'est dans la dernière partie en couleurs, des couleurs qui étonnent après 20 minutes en noir et blanc. Des couleurs vives, presque des chromos, presque des cartes postales, ce qui contraste avec ce que le film raconte. On retrouve certains plans similaires, dans deux visions différentes, c'est dire si le film prend le parti concret et abstrait de mettre plier deux points de vue. C'est tout l'inverse d'un court d'Histoire à vrai dire, c'est plutôt de la géopolitique où les Nations se seraient succédé dans le coin, Espagnols, Hollandais et Français.

L'anecdotique consiste à montrer la petite vie de la population. Le film se fascine pour ces « ascenseurs » comme on entend, ces petits funiculaires qui grimpent de bas en haut (et inversement) avec tout ce qu'il faut pour vivre, victuailles et vêtements. Ce haut et bas frappe beaucoup Chris Marker tout en remarquant que vivre en haut veut dire qu'on est pauvre, malgré le bon air que respirent les enfants, dit-il ironiquement. Bref, le film ne filme que les gens d'en haut et montre toutes les difficultés de cette vie.

Sinon, il y a aussi les escaliers. Immenses, longs, raides et présents partout. Les escaliers, comme chacun le sait, il est plus facile de les descendre que de les monter. Pour aller en bas, l'idéal est d'utiliser la rampe – et les enfants s'en donnent à cœur joie. La montée est fastidieuse pour tous, vieux et jeunes, bien portant comme malades. Visuellement, plus que les ascenseurs, les escaliers découpent le cadre comme autant de barrières à franchir pour aller en bas, pour aller dans les dancings ou se baigner comme une récompense bien méritée.

On dirait que rien, ou pas grand chose, depuis 1963 n'a changé dans ces villages qui se superposent, sans eau courante, en vérité des bidonvilles où s'entassent les pauvres de Valparaiso. Peu de paradis là-haut, un peu d'enfer parfois quand les ascenseurs sont en panne. Alors évidemment que oui que tout est politique dans le film, que les petites histoires, les détails racontés sur un ton badin sont l'occasion de dresser un portrait très vivant imbriquant l'humour et le politique, c'est ce que j'aime dans ces petits films courts tournés et produits à cette époque.




































 

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